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LA SEYBOUSE
La petite Gazette de BÔNE la COQUETTE
Le site des Bônois en particulier et des Pieds-Noirs en Général
l'histoire de ce journal racontée par Louis ARNAUD
se trouve dans la page: La Seybouse,
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Écusson de Bône généreusement offert au site de Bône par M. Bonemaint
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2024 est mort, 2025 est né
Chers Amies, Chers Amis,
Bon, voilà une bonne chose de faite. Les Réveillons sont passés où sur le point de l’être. Nous venons ou nous allons nous souhaiter une bonne année, et échanger des vœux ! Quelle bonne perspective, on fait le plein de bonnes résolutions. Cela veut dire que l’avenir nous intéresse, que nous le voulons toujours plus beau et que, chacun comme nous le pouvons, nous allons nous y employer.
Le 1er janvier est bien sûr le Jour de l’An (la « tête » de l’année comme diraient nos frères d’autres confessions). Le jour d’une nouvelle année que l’on espère toujours plus belle, plus pacifique que la précédente tant il est vrai que notre monde a de quoi nous faire frémir.
La Seybouse et tous ses contributeurs souhaitent à tous les lecteurs fidèles ou nouveaux une Bonne Santé et une joyeuse année 2025 pour être pleinement fidèle à la foi de chacun et disciple de la paix, pour crier au monde et à ses proches notre espérance de voir une paix perdurer qui peut offrir le vrai sens de toute vie. Ce passage à une nouvelle année civile nous invite à une attention particulière aux attentes, aspirations et questions de nos contemporains.
La Seybouse est toujours prête à recevoir des textes concernant l’histoire de notre terre natale et en attendant Notre Saint-Augustin se rappelle à tout le monde avec sa crèche.
Avec notre Ami Assus, on vous souhaite un bon mois, une bonne fête des Rois et de bons moments à lire ce numéro.
Jean Pierre Bartolini
Diobône,
A tchao.
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Chers lecteurs de La Porte Latine,
Lisez cette lettre elle vaut son pesant d'or humoristique. Son auteur est digne de l'Académie française et son destinataire - chacun reconnaîtra le sien - campe bien l'adage qui dit que "heureusement, le ridicule ne tue pas, pas même en politique. Sinon, nos cimetières seraient remplis de nos gouvernants".
Cher Monsieur le Tribunal,
J'ai pris connaissance, il y a quelques jours, de votre décision d'interdire la crèche de Noël traditionnellement installée dans le hall du Conseil Général de la Vendée.
Quelle mouche vous a donc piqué ?
Vous avez fait des études, je suppose.. Peut-être savez vous donc que Noël vient du latin " Natalis" qui veut dire Naissance. Alors je vais vous livrer un secret que vous voudrez bien transmettre à vos confrères qui peut-être nagent avec complaisance dans la même ignorance que vous. La naissance dont il est question est celle d'un certain Jésus de Nazareth né il y a un peu plus de 2000 ans, je dis ça parce qu'étant donné que vous n'avez pas interdit les illuminations de Noël, je suppose que vous ignoriez ce détail.
Voyez-vous, Noël n'est pas l'anniversaire de la naissance du Père Noël ( je suis désolé si je casse ici une croyance ancrée en vous ) mais bien celle de ce Jésus. Interdire une crèche sans interdire toute manifestation publique de cette fête est aussi stupide que si vous autorisiez la fête de l'andouillette tout en interdisant la consommation d'andouillette le jour de la fête de l'andouillette.
La crèche c'est ce qu'on appelle une tradition. Et ne me faites pas croire, Monsieur le Tribunal, que le principe de la tradition vous est étranger. Sinon comment expliquer que les magistrats exercent leur métier dans un costume aussi ridicule si ce n'est parce qu'il est le fruit d'une tradition ?
Vous êtes un briseur de rêves, Monsieur, vous êtes un étouffeur de sens. La crèche c'est Noël et Noël c'est la crèche.
La crèche c'est aussi l'histoire d'une famille qui faute de droit opposable au logement est venue se réfugier dans une étable. C'est un signe d'espoir pour tous les sans logement.
La crèche c'est aussi un roi arabe et un autre africain qui viennent visiter un juif. C'est un signe d'espérance et de paix en ces temps de choc de civilisations et de conflit au Moyen Orient.
La crèche c'est aussi des éleveurs criant de joie et chantant dans une nuit de décembre. Connaissez vous beaucoup d'agriculteurs qui rigolent en cette période de crise? La crèche c'est un bœuf, symbole de la condition laborieuse de l'homme.
Enfin, la crèche, c'est un âne, même si une rumeur court disant que cet âne a quitté la crèche en 2013 pour rejoindre le Tribunal administratif de Nantes et ne semble pas en être revenu.
Malgré le fait que vous allez sans doute, par souci de cohérence, vous rendre à votre travail le 25 décembre, je vous prie de croire, Monsieur le Tribunal, à l'expression de mes souhaits de bon et joyeux Noël.
Jean Santon
Sources : Lecteur joyeux de LPL / La Porte Latine du 26 janvier 2019
http://laportelatine.org/insolites/141206_on_a_brule
_le_pere_noel/141206_on_a_brule_le_pere_noel.php
ARTICLE DEJA DIFFUSE, mais la polémique fait encore jaser par la LDH et autres associations, alors on ne peux s'empêcher d'en rire.
Voici d'autres crèches pour se foutre de la gueule des détracteurs. Selon une tradition aujourd'hui interdite ! Voyons, s'ils ne vont pas interdire tous ces légumes et la charcuterie aussi ! Vous voyez jusqu'où ça « crèche » la connerie, tient ils vont interdire aussi le verbe.
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La Clémentine
Par SUANEZ Sylvestre
Echo de L'ORANIE N° 262
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Une perle de rosée
S'était un matin déposée
Sur une fleur d'oranger
Porteuse d'un doux message
Pour un futur mariage
Au foyer d'un beau verger.
C'était à "Misserghin-E"
Où vivait la "Mandarine"
Qui voulait bien se marier
Elle rêvait d'être "Tsarine"
Mais, était la consanguine
D'un amer "Bigaradier".
Ils ont échangé "Pollen"
Susurré des p'tits poèmes
Au coeur d'une orangeraie
La "Sebkha" buvait soleil
La brise l'iode et le sel
Aux miroirs du grand marais
Au climat de cet "Eden"
Ils se sont promis "L'hymen"
Résultat; nul et sans effet.
Ils allaient conter tourment
Auprès de l'abbé Clément
Le priant de les greffer.
Le père applique sa science
Mêlant pollen, pistil, patience
Avec foi bénédictine.
C'est ainsi qu'en 1902
Naissait joli fruit juteux
Baptisé "Clémentine"
Carillonnée à la ronde
Elle faisait le tour du monde
sans pépin "La clémentine"
Tirade:
Si le fameux PARMENTIER a nourri bien des peuples,
Le moins connu ABBE CLEMENT lui, les a régalés.
SUANEZ Sylvestre
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Le Curé de Saint Cyprien
Envoyé par Jean-Claude PUGLISI.
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"Ces spectres
que j'ai envie de réveiller."
Cette histoire s'est passée autrefois, dans un petit port de l'Est Algérien où, existait une paroisse, dont le Saint patron, n'était autre que Saint Cyprien de Carthage. Depuis déjà longtemps, un nouveau curé était un jour arrivé, afin de prendre en charge les destinées de cette paroisse, qui, jusqu'à présent, n'avait pas pu avoir de prêtre. Autant dire, que la population de ce village, lui fit un accueil très chaleureux et enthousiaste = drapeaux de bienvenue dans les rues, foule au passage de la voiture du prêtre... etc. Mais, à première vue comment pouvait se présenter ? ce nouveau curé au regard du village. C'était à le voir de près, un homme sec de taille moyenne, affecté d'un air qui se voulait sévère, lequel, laissait apparaître, un visage figé sans l'ombre d'un seul sourire et dont l'âge approximatif devait avoisiner la soixantaine. Ce prêtre, reçut tous les hommages des gens de la cité et sans aucuns signes d'une quelconque reconnaissance, assista quelque peu fraîchement à la liesse de ce petit peuple, qui demeurait depuis toujours dans le village.
Cependant, peu après et au cours des ans qui suivirent, des voix discrètes et silencieuses, se sont faites entendre au sein des chaumières et un bien curieux et réel sentiment, devait progressivement se propager au sein de la population. Mais, en quoi ? cette étrange attitude, pouvait-elle à ce point surprendre et déranger bien des personnes = c'est parce que ce curé, n'avait pas une seule fois, eu un visage souriant et surtout, qu'il avait très peu causé avec une population, qui, pourtant, l'avait parfaitement reçu les bras grands ouverts. Mais, cependant, très heureux d'avoir enfin un prêtre, chacun des fidèles devait l'accepter tel qu'il était. Puis le temps passa, puis, des mois et années s'écoulèrent..
Cependant il pris dès le départ, la paroisse sérieusement en main et célébra normalement une messe basse tous les matins, ainsi que la grand'messe du dimanche. Parallèlement, il se consacra à faire le catéchisme aux enfants du pays, à assurer les unions maritales, les baptêmes et les enterrements. Mis à part son air bourru et sévère, il devait toujours s'acquitter avec application, dans ses fonctions de curé de la paroisse. Le reste du temps, il restait presque invisible, se cantonnant dans sa cure où, il ne recevait jamais personne. Il était régulièrement assisté par une demoiselle d'un certain âge, qu'il avait ramenée avec lui lors de son arrivée, ainsi que son fidèle et dévoué sacristain de la paroisse, qui, était un personnage, au tempérament quelque peu puérile. Parfois, on le voyait au volant de son antique voiture, toujours accompagné de sa gouvernante. Il sillonnait les routes de la commune, pour aller dire la messe et autres cérémonies, dans les villages avoisinants qui n'avaient pas de prêtre.
Bien que des mois et années se sont écoulées, notre curé n'avait pas changé d'un pouce et son caractère bourru et orageux persistait toujours au-delà du temps. Cependant, la curiosité de ses ouailles, devait un beau jour l'emporter et discrètement, certains, se sont mis à l'affût, pour espionner les allers et venues de ce curieux personnage. Par exemple, on devait le voir traîner du côté Boulif, parfois, près du ravin du trésor, mais, aussi souvent, dans le cimetière à une heure bien tardive. Que cherchait-il ? et qu'allait-il faire en ces lieux particuliers. Un soir, il fut surpris dans le cimetière et pour se justifier, il devait trouver le prétexte de dire, qu'il venait prier pour l'âme des morts. Mais, cette explication fut loin de convaincre ce fidèle, qui, ne se priva pas, d'aller raconter cette curieuse rencontre à la ronde. En attendant, ce prêtre, continuait à célébrer des messes et à faire, tout ce qui est dévolu au sein de son ministère. Il menait avec sa gouvernante, une vie toute simple et frugale, dans le secret de sa personne et de son presbytère, recevant régulièrement son sacristain, avec lequel, il s'entretenait parfois de longs moments, ce qui n'était pas sans attirer l'attention et la curiosité de ses fidèles, qui, à la longue, se posaient souvent quelques questions, à vrai dire toujours les mêmes.
Ce singulier personnage, avait fini par attirer la curiosité de ses paroissiens et chacun de ses actes, étaient toujours discrètement observés de près par les gens du village. Par exemple, on devait remarquer que très souvent le soir, une lumière brillait assez tard dans la sacristie, ce qui ne manquait pas d'attirer les ragots = que faisait-il ? aussi tardivement en ces lieux. Or, un soir de novembre, certains riverains ont voulu le savoir et ils ont attendu patiemment dans le noir qu'il sorte de l'église. A cette heure, le village était désert et pas une âme dehors. Nos riverains, emboîtèrent discrètement les pas du curé suivi de son sacristain, en pensant qu'ils se dirigeraient vers sa cure, mais, à leur grande surprise, le prêtre pris une direction insolite = celle du cimetière. Il devait pousser le portail d'entrée et s'introduire dans les lieux, suivi discrètement de près par les trois riverains, qui, devaient ce soir là, assister à un curieux spectacle venu d'un autre monde = dans un coin du cimetière à la clarté de la lune, le prêtre avait aménagé une pierre tombale, sur laquelle, son sacristain, avait installé tout un attirail de messe. Puis, il avait revêtu un surplis et s'était mis à dire silencieusement la messe. Mais, ce qui intrigua les trois compagnons, ce fut qu'au cours de la messe, des ombres silencieuses ont surgi des caveaux, pour entourer le prêtre de tous côtés. A moment donné, il fit face à ses spectres et il semble, qu'il leur fit une homélie silencieuse sur un sujet, que nos trois compères n'ont guère pu entendre. A la fin de la messe, il donna sa bénédiction et tous les spectres regagnèrent doucement leurs tombeaux. Nos trois hommes, stupéfaits par la scène qu'ils venaient de vivre, assistèrent au départ du prêtre et de son sacristain et dans la nuit, il devait regagner sa cure en toute discrétion.
Bien que nos trois hommes, furent troublés par la scène qu'ils avaient vécue, ils ne manquèrent pas d'en parler autour d'eux, s'attirant ainsi le plus souvent, des quolibets et des critiques plus ou moins venimeuses. Comment pouvait-on admettre sérieusement ? que, leur curé, avait fait en nocturne une messe dans le cimetière et de plus, la présence de tous ces spectres rassemblés autour de lui, ne rendait pas cette drôle histoire bien authentique, mais, en tout cas, quelque peu tirée par les cheveux. Les critiques et moqueries allaient bon train, à tel point qu'au bout d'un moment, nos trois hommes finirent par se demander, s'ils n'avaient pas, peut-être ? un peu rêvé et que dans le noir du cimetière, ils s'étaient bâtis cette histoire abracadabrante, sortie toute droite de leur imagination. Bientôt, on ne parla plus de cet incident, mais, nos trois hommes, restaient fermement persuadés, qu'en cette nuit de novembre, ils avaient vraiment assisté à un spectacle bien insolite... Puis, le temps a passé et un beau jour, nos trois bonhommes se réunirent en secret, pour faire le point sur une histoire, qu'ils avaient vécue en direct ce soir-là. Après moult discussion, ils décidèrent, de pister une nouvelle fois le prêtre, pour savoir s'il retournerait un soir au cimetière. C'est à tour de rôle, qu'ils montèrent la garde autour de l'église et de la cure, puis, un soir tard, l'alerte fut donnée et nos trois hommes, se mirent à suivre une ombre qui sortait de l'église, accompagné par une autre personne. C'était le sacristain, qui, suivait docilement cet ombre, qui n'était autre que celle du curé. Ils prirent la direction du cimetière et s'introduisent dans les lieux, par le portail toujours grand ouvert, suivis de près par nos trois personnages, qui, se dissimulèrent discrètement, à seulement quelques pas du prêtre. Le même scénario devait se reproduire et le curé servi par son fidèle sacristain, commença à dire la messe. C'est alors que lentement devaient surgir de toutes les tombes, une foule de spectres silencieux, qui vinrent en bon ordre entourer les officiants.
Durant la messe, on notait que tous ces spectres, avaient l'air de chanter en silence et même, il semble qu'à un moment donné, la communion leur fut donnée. Avant l'Ité Missa Est, nos trois bons hommes n'y tenant plus, firent éruption auprès du prêtre, pour lui demander quelques explications et alors curieusement, tous les spectres avaient rapidement rejoint leurs sépultures. Pas gêné le moins du monde, notre curé leur dit qu'il était venu en ces lieux, pour dire une messe pour l'âme des morts et sans aucune forme de procès, il plia ses bagages et parti sans se presser suivi du sacristain.
Ce prêtre, continua cependant à occuper la paroisse et comme ses exploits s'étaient répandus comme un traînée de poudre, il se borna un jour, au cours de la prêche d'un dimanche, alors que l'église était pleine de fidèles, de dire qu'il lui arrivait parfois, d'aller en secret de nuit au cimetière, pour dire une messe pour le repos de tous les défunts, sans toutefois avoir l'obligation d'en informer ses ouailles, qui n'étaient pas concernés par cette curieuse célébration.
Bien plus tard, le prêtre fut démis de ses fonctions, par Monseigneur l'Evêque, qui avait appris ce qui s'était passé. Il fut nommé dans une petite paroisse où, il ne resta pas bien longtemps, car, son attitude bizarre, devait révéler un état psychiatrique évident, lequel, devait l'amener dans un établissement spécialisé.
Depuis ce jour, on n'entendit plus parler - du Curé de Saint Cyprien, mais, très longtemps, cette histoire devait rester gravée, dans la mémoire du petit peuple de Saint Cyprien.
Jean-Claude PUGLISI
de La Calle de France.
Paroisse de Saint Cyprien de Carthage.
( 28 février 2024.)
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ARRIVÉE A ORAN EN 1840
Par M. VILLARD
ACEP-ENSEMBLE N° 285
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Le 7 septembre à onze heures, le paquebot la Pharamond arriva en vue de Mers- El-Kébir.
Nous étions partis de Marseille le 2, il y avait donc cinq jours que nous tenions la mer par un vent contraire et un temps affreux.
Les malades étaient nombreux à bord : femmes, enfants, passagers, passagères de toutes classes étaient étendus dans Ies cadres, dans les hamacs, couchés sur des banquettes, sur le pont. C’était, depuis que nous avions perdu de vue les côtes de France, un spectacle peu séduisant à contempler.
Rien ne défigure plus complètement, ne décompose plus les traits. n'anéantit plus les facultés mentales et physiques, rien ne rend plus laid, ce que I’on appelle le mal de mer.
A propos du mal de mer, un officier de marine me disait qu'il avait constaté que ce mal, quelque violent qu'il fut, était guéri instantanément par I’approche d’un grand danger ou par la vue de la terre où I'on va aborder.
A bord quand on crie : Terre ! Les plus languissants reprennent leurs forces, et ceux qui sont étendus, sans mouvements, se relèvent pour voir.
Terre ! C'est la guérison qu'on annonce, et rien que I'annonce guérit le malade.
Ce fut précisément ce qui arriva à bord du Pharamond.
Quand on signala la terre d'Afrique, tous les malades, hommes et femmes se redressèrent, s'approchèrent du bastingage en dépit du roulis qui redoublait de violence. Ils se tenaient les uns aux autres, et ils demeuraient anxieusement curieux, regards tournés vers un seul unique point. Le mal de mer avait soudainement disparu.
Nous avions en face de nous, la côte rocheuse sur laquelle se reflétait le prisme des ardents rayons de soleil à son zénith.
Le vent venait de tomber : le navire marchait à toute vapeur et il glissait rapidement.
Le paysage se dessinait de plus en plus nettement.
Tous, les passagers avec des éclairs de joie dans les yeux, interrogeaient l'horizon en calculant la distance à parcourir.
Bientôt l'entrée de la rade de Mers-El-kébir se découpa dans la côte, dominée par la chaîne des montagnes qui court jusqu'à la plaine des Andalouses.
Rasant l'extrême point qui commande le port, nous entrâmes en rade.
Appuyé sur le bastingage, j’admirais ce magnifique point de vue qui se déroulait autour du navire comme un panorama magique.
J’avais en face de moi, Oran assis au fond du golfe, avec ses maisons mauresques aux murs blancs, sans fenêtres et couronnées par une terrasse plate, ses maisons espagnoles aux tons bruns avec leurs célosies vertes, ses maisons françaises aux toitures d’ardoises et ses mosquées aux coupoles arrondies, aux tours carrées, étroites et hautes, surmontées par des flèches soutenant le croissant d’or. Oran se prélassait en amphithéâtre et coupé, à son centre par un ravin blanc, profond, planté de palmiers qui étendent leurs élégants parasols.
A gauche d'Oran se dressait, menaçant, sur un rocher énorme, un grand bâtiment de construction mauresque, espagnole et française avec ses longues murailles crénelées, dominant toute la ville et toute la rade, et bordé, à ses pieds par une ceinture de batteries basses. C'était le Château Neuf, I'ancienne résidence des gouverneurs espagnols, l'ancien palais des beys et la demeure actuelle du général commandant la Province.
A droite le quartier de la marine que domine une haute montagne, le Santa-Cruz, coiffé d'un vieux fort en ruines et orné d'une chapelle que vénère la population espagnole. Plus près, un autre fort et la ligne des rochers s'étendant jusqu'à Mers-El-Kébir. Un splendide et éblouissant soleil à son zénith éclairait ce paysage qui avait pour horizon un ciel d'azur.
J'étais en pleine contemplation, lorsqu'une légère secousse imprimée au paquebot, me rappela que nous venions de jeter l'ancre.
De nombreuses embarcations accouraient vers nous ; mais en tête de ces embarcations, s'avançait un canot monté par deux hommes en uniforme et conduit par quatre rameurs.
C'était la Santé qui venait s'informer, avant de nous donner la permission de débarquer, si nous n'apportions pas avec nous un peu de l'honnête choléra qui désolait alors la France, mais qui n'était pas encore venu visiter l'Afrique.
Le commandant prit sa patiente et il descendit les premières marches de l'escalier extérieur.
Le canot accosta sans toucher la marche intérieure de l'escalier, et l'un des deux officiers de santé ouvrit un instrument ressemblant à s'y méprendre, à une paire de gigantesques fers à friser.
Il prit la patiente à l'aide de ces pinces démesurées, il déplia le papier sans le toucher avec ses doigts et en tenant tout grand ouvert à une distance des plus respectables de son individu.
La première des qualités d'un chef de santé est d'avoir la vue longue, car il est obligé de lire, toujours grâce à ses pincettes, à une distance de plus d'un mètre et demi.
Le monsieur examina gravement la patiente avec une impassibilité énervante pour nous qui attendions le prononcé du jugement qui allait nous condamner ou nous acquitter, et la prolongation de l'attente commençait à faire prendre à notre inquiétude des proportions pénibles.
Tous les passagers étalent près des bastingages, la bouche béante, les yeux très ouverts, la physionomie anxieuse, immobiles, leurs malles près d'eux, leurs paquets à la main, tous prêts à s'élancer vers les embarcations.
Depuis qu'on avait été en vue de la rade, tous, oubliant leurs souffrances, et guéris subitement par l'approche de la terre, s'étaient habillés, parés, nettoyés, préparés pour le débarquement.
Les embarcations de tous genres et de toutes sortes entouraient le navire, se tenant cependant à distance.
On échangeait, du bord, avec ces embarcations, des signes, des cris de salutations : l’impatience et l'attente redoublaient et la perplexité se peignait sur tous les visages.
L'officier de santé examinait toujours la patiente, qu'il ne touchait qu'avec son instrument.
Enfin il la referma, avec ses pinces, sans I'effleurer des doigts, et il la tendit au Commandant qui attendait.
Pour bien comprendre la valeur de ces mots terribles : être en quarantaine, il faut avoir passé plusieurs jours en mer, par un temps affreux, privé de tout, sans vivres frais, entourés de malades, au milieu de passagers entassés les uns sur les autres : il faut enfin apercevoir la terre si ardemment souhaitée, mettre d’avance le pied sur ce sol immobile après lequel on aspire, jouir par la pensée de tous les bienfaits qui vont faire oublier les inconvénients et les privations du séjour du paquebot et, au moment où l’on croit toucher la réalité de ses rêves, où l’on tend la main un ami, se voir brusquement privé de tout, éloigné de tout, séparé de tout.
Mettre un passager en quarantaine, c’est le faire passer brusquement sans transition, de l’état d’homme libre à celui de prisonnier, et encore le prisonnier voit-il de près son geôlier, peut-il communiquer avec quelqu’un du dehors, ne le fuit-on pas, n'a t-il pas l’aspect d’un pestiféré. Tandis que le malheureux condamné par la prévoyance de la santé, à la quarantaine, voit s’élever subitement, triples grilles de fer entre lui et ses semblables.
Ce qu'on lui offre, on le lui tend au bout d'un grand bâton, on lui donne à manger comme aux animaux féroces, sans oser s'approcher de lui.
Les lettres mêmes, écrites de sa main, sont lacérées et passées au vinaigre. Tout ce qu'il a touché, tout ce qu’il touche devient un objet d’horreur et de répulsion.
Il a une cour pour se promener, un mauvais lit pour dormir, il est privé de tout, et pour consolation il a la perspective de l’épidémie don on lui fait la politesse de le croire menacé.
Le moyen-âge a oublié le supplice de la quarantaine dans ses tortures.
Le pavillon hissé, un vide s’était fait autour du navire, les embarcations se tenaient à distance respectueuse, notre abominable isolement commençait.
La route d’Oran
De Mers-El-kébir à Oran, nous avions 9 kilomètres à faire car Mers-el-Kébir, ce Gibraltar de la province algérienne, est à I’extrémité Nord du golfe dont Oran occupe le centre et forme un cap s’avançant dans la Méditerranée.
Une chaîne de montagnes dont les points culminants, le fort Saint-Grégoire et le Santa-Cruz, n’atteignent pas 420 mètres d'altitude, relie la ville au port, enfouissant sa masse dans les eaux bleues du golfe, dont elle décrit le contour occidental.
Avant notre domination en Afrique, la route ou pour mieux dire le sentier que prenaient les Arabes, allant de Mers-el-Kébir à Oran ou vice et versa, gravissaient péniblement jusqu’aux crêtes des montagnes qu'ils suivaient ensuite du point de départ au point d’arrivée. Sorte de chemin du Diable, véritable casse-cou dont les chevaux arabes eux même avaient peur, que les ânes franchissaient en dressant leurs longues oreilles et en baissant la tête, et qui, de mois en mois, causait régulièrement la mort de quelque cavalier dont la monture avait fait une faute ou de quelques piétons dont le pied avait failli. Hommes et chevaux roulaient sur les flancs dénudés des rochers et allaient rebondir dans la mer.
Depuis vingt ans, heureusement, il n’en est plus ainsi, et aujourd’hui, l’on peut franchir la distance qui sépare Oran de son port naturel en toute sécurité, soit à pied, soit à cheval, soit à âne, soit même en voiture.
Une magnifique route, aussi pittoresque que puisse le désirer un amateur de la nature sauvage et aride, a été taillée dans le marbre et elle, serpente presque horizontalement sur le flanc des hautes montagnes. Des amis avaient fait la route à cheval pour venir à ma rencontre, mais pour le transport de mes bagages, il nous fallait retourner à Oran, en voiture.
Il y avait, sur la route, stationnant devant le petit fort, cinq à six voitures de louage, nous en prîmes une.
Quand je dis voiture, en parlant du véhicule dans lequel nous nous hissâmes, c'est que je n'ai pas d'autres expressions à employer
Cette voiture était un vieux carrosse espagnol, comme son conducteur propriétaire qui était aussi espagnol et comme le sont tous les carrosses et les cochers d'Oran.
Il y a beaucoup d'Espagnols à Oran. On doit cela, d'abord à l'ancienne domination de l'Espagne qui a duré jusqu'à la fin du siècle dernier, puis au voisinage de Ceuta et de Melilla, où l'Espagne a ses présidios, c'est à dire ses bagnes.
Les échappés des présidios viennent se réfugier dans la ville la plus proche.
Aussi à Oran, à cette époque il y avait beaucoup d'Espagnols, quelques Français et presque pas de Maures. Je parle des habitants fixes et non pas de la garnison.
Quant aux voitures, à l'exception de celle du général commandant la province, on ne rencontrait que des véhicules semblables à celui que nous venions de prendre.
Ce véhicule n'était ni un coupé, ni un fiacre, ni une calèche, ni une charrette, ni un landau, ni un phaéton, ni un omnibus et cependant c'était un peu tout cela.
D'abord il avait quatre roues, deux petites et deux grandes, puis un timon orné de ses deux chevaux efflanqués. Sur ces quatre roues était posé, sans le moindre ressort, mais bien soutenu par quatre grosses cordes, une espèce de bateau plat pareil à ceux dont se servent les passeurs sur nos rivières, mais dont l'avant et l'arrière avaient été sciés au préalable.
Les deux bords du bateau servent de côtés à la caisse de la voiture, puis sur ces deux côtés se dresse une sorte de charpente extrêmement compliquée, établie à I'aide de ferrailles rouillées, de morceaux de bois multicolores et de toile cirée s'en allant en lambeaux.
Une banquette posée en travers à l'avant sert de siège au cocher : c'est là son salon, l'endroit où il reçoit ses amis et amies auxquels ou auxquelles il veut bien offrir place sans se préoccuper le moins du monde de notre assentiment.
Une cloison un tiers bois, un tiers fer, un tiers vide (espace réservée aux vitres absentes), sépare le conducteur de sa pratique e met cette dernière dans la situation de bêtes curieuses transportées dans des voitures ad hoc.
L’introduction dans la machine s'opère par derrière, comme dans un omnibus.
Dans quelques-unes, cependant l'entrée peut être livrée par deux larges brèches faites de chaque côté, et qu'une portière pantelante essaye en vain de reboucher après I'entrée du voyageur.
Une fois le prix établi avec le cocher, une fois installé tant bien que mal dans le carrosse, vous attendez.
Vous pensez partir immédiatement ? Pas du tout.
Le cocher espagnol ne se préoccupe jamais de celui qu'il mène. Le locataire provisoire mis en jouissance de sa propriété, le cocher s'en va vaquer à ses affaires. Vous criez, vous menacez, vous réclamez, rien n'y fait.
Espera ! Espera ! Vous répond-il tranquillement sans se presser d'un pas.
Espéra est un verbe dont le peuple espagnol fait un effrayant abus, et qui signifie à la fois attendre et espérer.
Ces deux suprêmes expressions de la sagesse humaine (à ce que prétendent certains philosophes qui ont ou n'ont eu probablement jamais besoin de rien), ont le pouvoir d'irriter au plus haut degré les nerfs du voyageur impatient.
Enfin le cocher veut bien consentir à prendre place sur le siége, il rassemble nonchalamment les rênes, il fait claquer son fouet bruyamment et il crie à tue-tête : -Anda ! Anda !
Les malheureux chevaux secouent leurs têtes embarrassées et surchargées de grelots et de sonnettes, ils font un effort et ils s'élancent.
Aussitôt vous entendez un extravagant vacarme qui vous assourdit les oreilles : ce sont des craquements, des gémissements, des bruits de vieilles ferrailles, puis vous vous sentez balancé en avant, en arrière, à droite, à gauche. Ne vous effrayez pas !
Ces bruits discordants, ces balancements désagréables, proviennent du mouvement même du véhicule mis en marche.
C'est la caisse qui craque et se disjoint, c'est la charpente soutenant la toile cirée qui entrechoque ses garnitures ferrées, c'est le bateau qui obéit à I'impulsion que lui communiquent les cordes.
Après quelques minutes d'étonnement vous finissez par vous boucher les oreilles, pensant que l’augmentation du vacarme décèle la célérité de l’attelage.
Cette fols encore vous vous trompez
Le bruit cesse brusquement, le coffre devient immobile, la voiture est arrêtée.
Votre cocher a rencontré un ami, un compatriote avec lequel il échange les nouvelles du jour.
Il allume une cigarette, serre la main à l’amigo et vous voilà de nouveau roulant sur la route.
Si vous partez de Mers-El-kébir pour vous rendre à Oran, vous avez les montagnes à votre droite et les eaux de la rade à votre gauche, vous êtes sur la route et vous pensez avec une certaine apparence de raison, que le trajet va s'accomplir dans votre voiture, sans nouvel incident.
Mais vous avez oublié que votre cocher est Espagnol, et qu'un véritable Espagnol ne connaît que deux façons d’être dans la vie : être amoureux ou ne pas l’être.
Si votre conducteur n’est pas amoureux rendez grâce au ciel. Cependant vous n’en arriverez pas plus vite pour cela.
Une fois sur la route, comme il n’y a pas à se tromper puisque la route est seule et unique, et aucunement croisée par le plus petit sentier, le cocher laisse tomber ses rênes, il s’installe dans un coin, et se livre aux douceurs de la sieste, laissant ses chevaux entièrement libres de leur allure, et n’entrouvrant l’œil que si la voiture verse en montant sur un quartier de rocher.
S'il est amoureux au contraire, la chose est tout autre. Il est heureux, ou malheureux..
S'il est heureux, si sa novia, sa quérida lui a donné un rendez-vous pour la nuit prochaine, s'il espère la rencontrer sur la route, il crie, il chante, il gesticule, il fait le beau, il se pavane, il abandonne également les rênes, s'étend tout de son long sur sa banquette, du dessous de laquelle il tire une guitare et il entame une interminable romance tout en raclant le malheureux instrument qui gémit.
Vous gémissez aussi car vous Allez tout aussi lentement, et de plus vous êtes réellement abasourdi.
Mais qu'est-ce que ces inconvénients, comparés à ceux que vous prodigue le cocher amoureux mais malheureux dans ses amours.
Celui-là est sans cesse furieux : il injurie ses bêtes, il injurie les passants, il injurie la route, il injurie sa voiture, il nous injurie si vous tentez une légère observation.
Que de mauvais sang font faire les cochers Espagnols aux Français en voyage !
Heureusement celui qui nous conduisit le jour de mon débarquement à Mers-El-Kébir, était sans doute amoureux et content, car il nous conduisit convenablement, et, pour un demi-douro en sus du prix de la course, il consentit à ne pas racler sa guitare.
En une heure et demie la distance fut parcourue et nous atteignîmes la voûte qui sert à la fois de porte d'entrée à la ville et de tête à la route de Mers-El-kébir.
Nous passâmes sous cette voûte pratiquée dans le rocher même et nous entrâmes dans la ville.
Oran a gardé le triple cachet de sa triple domination. Elle est à la lois mauresque, espagnole et française, comme construction, comme végétation et comme population.
Nous traversâmes le quartier de Marine, le Ravin et atteignîmes Château-Neuf.
Le Château- Neuf, amas de constructions, dont les styles différents indiquent, comme la ville le triple passage des conquérants, est bâti à 1'est d'Oran, sur un rocher dominant entièrement la ville et la côte. On jouit du haut de ses terrasses d'un coup d'œil magnifique.
Rensom avait pour habitation, le pavillon le plus élevé du Château-Neuf, lequel était encore surmonté d'un Petit marabout formant belvédère. De là, je pourrais contempler à l'aise le magnifique panorama qui se déroulait aux quatre points cardinaux.
Devant moi, sous mes pieds, à cinquante mètres en contre-bas, j'avais Oran, la vieille ville dont l'origine remonte aux périodes carthaginoises.
Les différentes dominations à Oran.
Plus tard, pendant la domination arabe, Oran dépendit du royaume de Tlemcen, mais des franchises locales très étendues ayant donné un puissant essor à son commerce maritime, occasionnèrent de fatals démêlés de voisinage.
Les Espagnols mécontents de l'audace des pirates d'Oran, armèrent une flotte pour les punir.
Ils débarquèrent à Mers-El-Kébir en 1505, et ils s'emparèrent d'Oran en 1509, sous les ordres du cardinal Ximenès. Ils gardèrent cette conquête près de trois siècles.
En 1791, le tremblement de terre qui détruisit une partie de la ville et les attaques réitérées du bey Mohammed, déterminèrent les Espagnols à évacuer leur conquête.
Maître d'Oran, les Turcs suivant leurs habitudes, s'empressèrent de démolir les constructions de leurs prédécesseurs
Puis, plus tard, ils furent obligés de relever ce qu'ils avaient détruit, mais leur œuvre de restauration était à peine ébauchée que nous nous emparions de la ville. C'était en 1834.
Nos troupes ne trouvèrent pour ainsi dire que des ruines, aussi fut-on obligé de tout reconstruire.
Du haut du Château-Neuf, je voyais le plan naturel de la ville entière.
Oran est divisée en deux parties réunies par un pont qui joint le flanc de la montagne de Santa Cruz au plateau de la ville. C'est ce pont qui relie au-dessus du ravin, au fond duquel coule l'Oued-el-Rahhi.
Cette division naturelle forme deux villes qui sont toutes deux habitées par des peuples différents et qui le sont encore.
Sur la rive droite de l'Oued-el-Rahhi se trouve la ville indigène avec ses mosquées, sa casbah, son marché qu'approvisionnent les Arabes avec leurs caravanes de chameaux.
Sur la rive gauche se trouve la ville espagnole que dominent les forts construits par les anciens maîtres, et où se dressent les églises catholiques en opposition aux mosquées.
A peu de distance de la porte Saint-André, ouvrant sur la route de Misserghin, le quartier juif qui a conservé l'aspect misérable que ce quartier a dans toutes les villes turques, s'étend à la droite de l'église.
Entre le quartier indigène et le quartier espagnol, se développe, depuis notre occupation, le long du ravin, sur les deux rives, un troisième quartier qui est notre œuvre.
Là, les rues sont belles, bien percées, droites, alignées, bordées d'élégantes maisons ; il y a des places, des boulevards, des promenades, de belles églises.
C'est là que se trouve la préfecture, la mairie, le théâtre dominant le ravin et placé en face de la promenade qui a, pour perspective, la rade et Mers El-kébir.
Un verdoyant vallon consacré aux jardins de luxe et de produit sert de débouché au boulevard.
A droite de la ville, rue du Château-Neuf, au Nord, s'étendent, se confondant à I'horizon avec le ciel toujours azuré el sans nuages, les flots de la Méditerranée.
Au sud, le ravin blanc avec ses bouquets de palmiers, d'orangers, de grenadiers, ses haies de cactus, ses buissons d'aloès dont les feuilles puissantes opposent aux animaux féroces une barrière infranchissable. Une haie de cactus, avec ses successions de raquettes énormes garnies d'épines, est la meilleure des enceintes.
Le ravin blanc est ainsi nommé parce que son sol est recouvert d'une couche crayeuse qui, sous le rayonnement des rayons solaires, ressemble à une vallée de neige. Là se trouvent les fours à chaux.
Au-delà du ravin s'étend la grande plaine encore couverte de palmiers nains et que traverse la route d'Aïn Temouchent
A l'Est, se déroule et se dessine dans les vapeurs topaze, la pointe du Ras-el-Arouga que domine au loin le cap Carbon qui, avec le cap Falcon, forme les points extrêmes du golfe d'oran.
Une haute montagne se dresse à hauteur du cap Carbon, c'est le Djebel-Rahmar ( montagne des lions).
Absorbé dans ma contemplation et ne me lassant pas de laisser promener mes regards sur ce merveilleux paysage que je contemplais pour la première fois, j'étais en pleine extase et je n'avais pas vu passer le temps.
Bibliographie:
La Popote par Ernest Capendu
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MUTILE N°9, 1er octobre 1916
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LA MARRAINE DE LA TRANCHEE
Pour Mlle Tinou Gareau
Lorsqu'un de nos soldats est seul
Qui donc, à son âme penchée,
Murmuré d'une voix d'aïeul
Ce tendre petit mot : «filleul»
Là Marraine de la tranchée.
Lorsque pour tromper son ennui,
Il sort une lettre, cachée
Déjà son « cafare » s'est enfui
Qui donc parle bas avec lui ?La Marraine de la tranchée
Lorsque revenu de l'assaut
Il veut préserver sa tranchée,
Qui donc lui fit ce plastron chaud.
Qu'il soit d'un petit air finaud ?
La Marraine de la tranchée.
Quand dans un corps à corps fougueux,
Dans une ardente chevauchée
Il va du rêve, plein tes yeux
Qui soutient son port belliqueux ?
La Marraine de la tranchée.
Lorsqu'il est tombé tout sanglant
Sur une plaine desséchée,
Quel est donc ce portrait charmant
Qu'il baise avec emportements
Là Marraine de la tranchée..
Quand pour la décoration
Qu'il a vaillamment, « décrochée »
Il bondit eh permission,
Qui recoiffe noble Lion ?
La Marraine de la tranchée.
Puis lorsque est fini son séjour
Et qu'il repart l'âme arrachée
Quel est le magnifique amour
Qui change sa peine en humour ?
La Marraine de la tranchée.
France, crois en ton zélateur,
De lauriers tu seras jonchée,
Mais au grand jour libérateur
Bénis l'Ange consolateur :
La Marraine de la tranchée :
Claude-Maurice ROBERT
Mutilé de Guerre
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VIEUX BASTION DE LA CALLE
Par A. LABBIZE
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Mémoires d’Apatride
De M. André GASPERINI
Envoyé Par M. Sylvain Gasperini (son fils)
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A Vava Inouva
Parce que tu tenais à ton anonymat et t'adresser uniquement à ceux qui t'aimaient d'un amour vrai et inconditionnel.
Jamais rien ne comblera l'absence et le vide de ton départ, de cette PUTAIN de vacuité que même la nature n’oserait combler, de cette PUTAIN de perte, infinie, que je supporte tous les jours et avec laquelle j’apprends à vivre, pour, finalement, ne retenir que la peur et la haine, le dégoût et la frustration, la rage et la colère.
Je t'aime du plus profond de mon être, je t'aime de tout mon cœur, je t'aime du plus profond de mon âme torturée par ce gouffre sans fin que tu as laissé derrière toi, je marche dans tes pas et vis dans ton sillage.
Pour toi l'étranger sans terre, l'inconnu sans nom, pour toi l'homme sans valise et sans identité autre que celle chèrement concédée par cette putain d'existence que je conchie.
A toi l'Exilé et pour toi l'Apatride.
Désormais immortel et affranchi du fardeau de cette PUTAIN d'humanité, à présent, libéré, tu es partout chez toi et plus proche des tiens que tu ne l'as jamais été…
Voici ses écrits.
J'avance
J'avance pour connaître la réponse au bout de ce tunnel. J'ai peur bien sûr, le danger est présent, ma vie flotte comme un cerf-volant suspendu au souffle qui le porte. L'avenir est sombre car le futur est proche. Je suis seul, terriblement seul, je renais de mes cendres, j'ai été, je suis et je vais devenir. Je ne pense plus à demain papa, car comme pour toi ma journée dure vingt – quatre heures. Je vais continuer car je te ressemble et je veux que tu me prennes dans tes bras là-bas où tu m'attends déjà.
J'avance pour vous aussi, je ne veux pas vous décevoir, je suis un mari et père je dois être à la hauteur même si je suis petit, je veux être encore cette nacelle qui vous porte, mais comme la rivière qui dépose ses alluvions le débit de ma vie devient insuffisant. J'avance pour exister encore un peu c'est le seul droit que je m'accorde, tant pis si le tunnel est sombre, si je me cogne à ses parois, tant pis pour les pleurs qui m'empêchent de mieux voir, peu m'importe le voile qui assombrit mes jours car je vais connaître ce que l'humanité n'a jamais pu savoir.
J'avance car je veux que la mort me rende tout ce que j'ai perdu, elle est là je le sais, je ne dois pas la décevoir, elle peut être belle si je suis convenable. Elle vous laisse le dernier choix, la pitié où le respect, je veux que la faucheuse me respecte. Elle peut prendre mon corps mais pas son âme, son aura car je vous en fais cadeau. J'en appelle à la bonté divine, je ne suis pas un ange mais je demande le repos éternel pour que la lumière puisse retomber sur vous. J'ai froid de cette froidure maladive qui s'installe même dans ma chambre bien chauffée, qui pénètre dans mes veines chaque jour un peu plus et qui devient froideur pour me rendre insensible et souvent indifférent. La maladie me transforme, elle est la main de la faucheuse, je la sens peser sur mes épaules qui portent le poids de sa puissance, je tombe, je me relève bien vite mais ce n'est pas sa main qui me remet debout.
J'avance car le chemin est court, fatiguant mais limité. Je ne veux pas être surpris, je veux la voir, la combattre avec mes armes pour que le jour venu je vois ma destinée même si sa puissance doit régler tout ce qui doit être. J'ai de la peine aussi, teintée d'amertume, de dégoût, je me retire de la vie sociale sans pour autant être asocial je refuse toute convenance qui blesse ma vie privée, toutes les règles de bon usage, je redeviens cet adolescent qui rejette tout pour ne plus être emmerdé. Les règles sont différentes, je ne joue pas, ne triche pas, je ne fais pas semblant. Quand la scène est petite et le théâtre trop grand, l'acteur isolé ne part pas avant la fin d'un spectacle garni de regards attentifs, de témoins oculaires qui sont seuls devant le rideau qui tombe. Je deviens soliste j'interprète les derniers morceaux de mon existence, un One-man show où l'émotion n'a d'égale que sa peur ou sa colère. Je suis un tout et son contraire à la fois raisonnable et résigné quand la sagesse se soumet au sort qui lui est réservée. Je suis fatigué par cet effort intense qui diminue ma résistance à vaincre la fatalité, le cours des événements, mon être se couvre dun voile de lassitude, de soumission pour que le jour et la nuit par pudeur rendent décente et délicate la solitude dans laquelle il s'isole.
J'avance vers ma destinée irrévocable, déterminée, puissance souveraine qui règne sur mon existence, devient paradis perdu, et pareil à l'aurore l'entoure d'une lumière nouvelle. C'est troublant de penser que rien n'est plus pareil, que tout est subjectif conditionné par cette souffrance qui donne envie de crier, de se mettre en colère, de ne plus être gentil, de détester certains, d'être bien trop vivants. L'homme qui combat se doit d'être méchant la pitié et la peur n'ont jamais survécu sur les champs de bataille qui font de lui un héros ou soldat inconnu. Je porte ma bannière sans troupe à mes côtés, je ne veux pas mourir, pas encore même si une nouvelle blessure brise ma poitrine et me transperce le dos, surpris de ne pas tomber la vie me porte encore parce-que je l'aime comme un dernier amour qui m'entraîne sur d'autres rivages, d'autres frontières pour que je puisse encore aimer le vin si doux de l'existence où le silence s'installe sur cette route définitivement déserte.
J'avance vers toi qui veut m'apporter repos, laisse-moi encore tenir sur les flots, donne-moi le temps de regarder plus haut pour que je puisse voir l'étoile qui me fait bien défaut. Je ne suis pas pressé et puis souffrir encore sous le poids brûlant de mon terrible fardeau. Si le néant arrive, il engendre le vide sur ces belles personnes qui m'aiment pour ce que je suis, qui ont pris les coups à ma place et qui n'ont jamais détesté tout ce que j'ai pu aimer. Je pense à toi qui a conduit ta vie sans jamais la trahir, qui porte bien plus fort l'héritage de nos familles anciennes, bravo et je t'aime parce-que tu es et tu seras toujours. Mon parcours te montrera la voie, ne fait jamais ce que j'ai pu comprendre car si tu me tiens la main je ne pourrais jamais te dire que l'on se reverra. On s'aime de cet amour exclusif qui ne supporte rien, qui heurte nos existences pour mieux les réunir. Je t'aime comme sur ce chemin qui nous menait à l'école, séparés par les bancs le nez sur notre cahier nous attendions la cloche pour aller pleurer des crêpes à celui qui ne nous en a jamais donné. Je taime parce-que tu me ressembles, bien sûr tu ne parles pas et tu nécris pas mais cest ton esprit qui guide ma main alors ces mots ce sont les tiens moi je ne fais que les écrire voilà notre victoire.
J'avance, sans oxygène le souffle se brise sous l'effort et l'été qui arrive n'apporte pas ses odeurs bienfaisantes. Dans ma poche se trouve le billet des pauvres gens un billet sans retour, pour une destination inconnue.
Peu m'importe le voyage pourvu qu'il soit sans heurts, qu'il n'y ait pas d'opposition violente, de désaccord profond, alors je verrai passer les jours sans tristesse, on ne vous donne pas la vie puisqu'il vous faut la rendre, elle est un legs aux générations futures entre ce qui existe et ce qui deviendra, parce-que jamais personne n'est parti de rien. Mais je ne suis pas pressé de transmettre, il faut encore bâtir un peu, continuer pour l'exemple, oh! bien sur je ne serai pas un immortel et ne serai jamais à l'Académie Française, l'écriture m'aide à vivre l'instant présent elle est une thérapie un soin pour ne plus vomir, pour laisser couler sans crainte le mauvais sang qui tache les carreaux, pour accepter de ne pas être grippé, de ne plus avoir les oranges pressées de ma mère ni les livres de mon père et que la solution si elle existe, je dois la trouver. L'homme a toujours cherché à savoir et pour ne pas disparaître, il a gravé ses idoles sur les pierres, vénéré des dieux de toutes sortes, il a taillé, creusé, édifié, s'est couvert d'or et de diamant, dressé des pyramides tournées vers le soleil et aujourd’hui défie latmosphère et ses planètes. Lhomme cherche à savoir doù il vient mais surtout où il sera alors qu'il lui faut simplement voir le jour se lever et la nuit quand elle tombe. Si Sartre disait que «l'enfer c'est les autres» c'est qu'il admettait que la vie le soit et c'est ce que je ressens aujourd'hui, le repos n’existe pas sur cette terre, rien ne peut se faire sans souffrance, sans combat, l'homme passe son existence à comparer celle des autres, non pour faire valoir les ressemblances mais pour en établir les différences.
C'est un mal pour un bien, la richesse est dans la différence, je ne veux pas être et ne suis pas comme les autres, la musique est différente et le manège ne tourne pas dans le même sens, chacun a le droit de choisir son chemin mais chacun doit savoir aussi qu'il finira toujours au même endroit, voilà la ressemblance.
J'avance vers une porte sans poignée qui s'ouvre hésitante en grinçant sur ses gonds, elle attend le visiteur, l'invite à se rapprocher, ouvre le passage qui se referme sur lui. Je ne suis pas surpris mais étonné d'être déjà là. C'est un endroit nouveau, une autre façon de voir, combien de gens sont-ils passés ici? Beaucoup certainement, combien en sont ressortis? Sans aucunes traces le chemin est libre il fait un peu plus froid que dehors un peu plus sombre aussi, l'odeur est différente elle ne flotte pas mais s'écrase sur le sol comme un poids dans le dos qui force à avancer. Une autre porte s'ouvre sur une lumière artificielle, sur une pièce immense qui abrite des hommes et quelques femmes, tous allongés plus ou moins réveillés, je dis bonjour personne ne répond. C'est une ruche de va et vient incessant, de multitude de bruits, avertisseurs sonores, ronflements, soupirs et quelques plaintes aussi. Je visualise le tout rapidement et repère le transat sur lequel on m'allonge, ma chemise s'ouvre quelque chose se branche sur ma peau nue et le voyage commence.
«Tout va bien ?» la question est logique, banale, conventionnelle, posée par un visage sans charme mais souriant. Combien de personnes dans notre vie nous ont posé ce genre de question stupide? Et à chaque fois la réponse est la même:»tout va bien». Pourtant le pire est présent, exposition désolante de lassitude silencieuse, imprégnée sur les murs jaunis pour un vernissage de misère humaine. Mais personne ne quitte le quai, les amarres ne sont jamais larguées le temps ne compte plus on doit être au point zéro où les principes ne forcent plus la raison puisque tout ici est résigné. C'est un cloître, une collégiale sans cour ni jardin revêtue de la même dignité, de la même fonction qui permet aux uns et aux autres de communier et d'être en parfait accord avec tout ce qui peut être affectif. Ici personne ne s'excuse d'être malade, le monde extérieur peut appeler, la ligne est occupée, le silence radio de rigueur, la maladie ne dérange pas, personne ne s'identifie à l'autre, on ne compare pas, on compatit, on souffre de la même façon, on subit tout simplement. Je naime pas cet endroit, je voudrais tant que lon me dise «lève –toi et marche» mais je ne suis pas seul, je n'ai pas le monopole de la souffrance mon âme ne peut se libérer, pas encore et ce n'est pas le bruit régulier de l'horloge qui changera le cours des choses. Quelqu'un se lève un fantôme qui traîne avec lui son «arbre de vie» vers les toilettes, je remarque que moi aussi j'ai envie de faire pipi, je regarde mon «arbre» et pour la première fois je compte les «branches». Sept c'est le nombre de «fruits» suspendus à chacune d’entre elles, qui est le bon, le méchant, la brute ? La porte des WC s'ouvre et le fantôme ressort. Quatre c'est son nombre de «fruits». Mais ici le nombre ne vaut rien, tout est copie conforme la table est servie pour un repas unique.
J'avance au bout des remords, des chagrins trop souvent contenus. J'éloigne ma vie de celle des autres pour que chacun garde sa place et que je puisse quitter la mienne. Si la beauté est intérieure elle ne l'est pas chez moi, alors je remets mon corps à la science pour que l'erreur soit réparée. Il faut partir propre c'est important, ça rassure le regard qui pour une fois vous trouve beau. Une bohémienne m'a dit un jour:»Il y a dans ta vie une femme brune qui te veut du mal, donne – moi une pièce et je te dirai qui elle est!» J'ai retiré ma main et je suis parti. Le mal à toujours ses raisons pour en vouloir aux autres il se construit sur un château de cartes qui tombent les unes après les autres mais jamais sur la dame brune, la vérité arrive quand le travail est terminé. Je ne cherche pas à savoir, je veux vivre chaque instant comme le dernier n'en déplaise à la naufrageuse. Le rivage est le salut pour celui qui dérive, l'espoir se remet aux étoiles et aux vents favorables afin que le navire s'échoue et qu'il ne sombre pas. La croix est lourde et je voudrais que l'on m'aide, lItalien peut-être avec son air bon qui fait de la maladie étalée sur son bureau un produit négociable, consommable et pousse la délicatesse jusquà demander mon accord. Mais je vous en prie prenez, ne demandez rien, ne frappez pas à la porte je ne suis pas là pour l'ouvrir, j'ai l'habitude de l'absence, elle est à l'orphelin ce que la nuit est à l'aveugle.
J'avance et avec les jours qui passent le soleil revient, fait ressortir les barbecues, les tondeuses rasent tout sur leur passage, les repas en plein air se parfument de viandes et de poissons grillés, les boules de pétanque se balancent aussi vite que les canettes qui se vident, chaque rue et ruelle résonne du chant des bienheureux, les familles se rassemblent les amis se reçoivent, personne ou presque ne manque à ce manège car ce ne sont pas les trois places vident qui l'empêchent de tourner. Soyez heureux je suis aimé de loin, votre amour est aussi fort que la distance qui nous sépare, faite votre vie je termine la mienne je dois régler le montant qui me reste à payer par cette pièce que l'on m'a réclamée. Rigolez c'est bien, arrêtez vos visites je refuse le parloir, je ne suis pas laboureur, il n'y a aucun trésor enfoui, ma terre est sèche depuis bien longtemps et chez moi plus rien ne peut se cultiver, je vous ai tout donné, il n'y a plus rien à prendre vous pouvez partir parce-que comme disait mon père «je préfère vous savoir heureux loin de moi, que malheureux à côté». Jai encore du boulot celui de rallonger mon existence pour que ma femme ne soit pas trop vite définitivement seule, je ne suis pas bricoleur et lItalien verra ce qu'il peut faire, l'endroit qui accueillera mes cendres aussi est important, je le veux ombragé mais pas trop pour laisser passer le soleil, je veux être enterré par mes racines et mes amis proches aussi pour les soutenir mais que les belles filles, les belles familles, les petits enfants les neveux et nièces ne se dérangent pas car ce n'est pas leur place. Je voudrais être César et ses orgies, bouffer et boire jusqu'à s'en rendre malade, sentir le sol se dérober quand on bien «vécu» tomber dans un coma qui vous fait voyager, dépasser les frontières pour aller voir ailleurs et verser toutes mes larmes sur ces nouveaux rivages.
J'arrive dans ta demeure ma chère dame brune, allume la cheminée, dresse la table et prépare ton repas, je suis ton serviteur mais pas ton domestique, reçoit moi comme ton hôte et découvre ton visage, le combat est perdu, avance ton verre que je boive ton breuvage.
J'avance et j'aperçois la route, le virage est trop court pardonnez- moi d'avoir freiné trop tard, la fatigue ralentit les gestes, décroche les mains du volant et vous plonge dans l'abîme où vous fermez les yeux. Il y avait d'autres chemins sans doute je n'ai pas pris le bon, si les rois mages suivaient l'étoile du berger j'aurais dû faire comme eux et regarder un peu plus souvent la mienne pour m'apercevoir qu'elle ne brillait pas toujours. L'homme consume sa vie comme un mégot de cigarette, il tire dessus avec frénésie l'écrase pour la rallumer aussi vite, passe de l'une à l'autre et quand le cendrier est plein s'aperçoit mais trop tard que derrière lui tout est brûlé. Le désert est immense mais je ne suis pas seul c'est une consolation, un lot de moindre importance pour candidat malchanceux et même si la branche est pourrie on cherche toujours à l'attraper parce-que ce qui nous inquiète ce n'est pas quelle se casse mais ce qu'il advient si on ne l'atteint pas.
Rendez-moi vos copies» Ce mot nous l'avons tous entendu nous avons tous vu aussi le tas se former sur le bureau du prof, il aurait pu me dire que j'étais trop curieux qu'il ne fallait pas écouter aux portes ni faire tourner les verres, il aurait pu retirer ma copie la foutre à la corbeille, ou j'aurais pu tout simplement ne pas la lui donner, mais ce qui écrit reste à jamais gravé. Je ne suis pas innocent je veux plaider coupable, je ne cherche pas à fuir la décision finale, je veux simplement que le bourreau me montre son visage, ce n'est pas le temps qu'il me reste qui me pose un problème c'est ce que je peux en faire. Dehors tout a changé le printemps a chassé l'hiver, les arbres recommencent à fleurir, les cheminées ne fument plus et le ciel se découvre un peu plus sur une vie qui redonne des couleurs à l'été qui arrive, je voudrais en profiter aussi avant que ma saison s'achève, j'en ai marre d'être seul je ne supporte plus que chacun «fasse sa vie», même la maladie ne me rend pas important, j'étais seul quand javais faim, je suis seul dans ma douleur, parce-que jai mal à tel point que je vomis tout ce quil ny a plus à rendre, jappelle mais pas une oreille nentend, je pleure aussi le coussin peut témoigner mais je nai pas besoin de témoignage personne ne plaidera ma cause il y a beaucoup plus urgent les femmes, les belles-familles qu'il faut aller visiter surtout pour les fêtes et lorsqu'il fait beau, la pelouse qu'il faut entretenir, les gosses par obligation, les amis sans qui le paraître ne pourrait exister et enfin le téléphone que l'on ne lâche jamais, toute une vie bien remplie en quelque sorte dirigée de main ferme par les «pièces rapportées», pièces maîtresses de tout ce système bien soumis dans son organisation et la chanson d'aujourd'hui n'est plus de savoir où sont les femmes mais surtout où sont les mâles.
Je regrette de m'être bien sacrifié, j'avais une vie moi aussi loin de vous mais je l'ai abandonnée et je n'ai laissé personne de ma famille derrière parce qu'ils sont indispensables et surtout intouchables. Quelqu'un m'a dit un jour «aide- toi et le ciel t'aidera» c'est ce que j'essaie de faire peut-être que là – haut j'aurais une petite place, un petit coin tranquille où je pourrais reprendre mes lectures, retourner vers le pont des soupirs avec les condamnés où l'un d'eux me dira «laisse nous et pars vers cette lumière où ta famille t'attend» Voilà ma richesse, ma culture, tous ces humbles gens expatriés de France par Napoléon III, Italiens, Espagnoles, Maltais, Français tous ces gens qui me rediront «avance petit et n'ai pas peur». Le chemin est encore long beaucoup d'étapes restent à franchir, passages obligatoires où chacun vous dira bonjour presque par habitude où d'autres baisseront la tête pour vous laisser la place, où le silence s'installera pour mieux se faire entendre, ce genre dendroit qui donne envie de sexcuser de ne pas être présent, de penser que le pire est ailleurs et quà tout prendre il faut garder ce que lon a. Mais tout va bien continuez de ne pas vous déranger de faire comme si tout était normal, de vous servir de moi pour pleurer vers les autres et d'aller ramasser le baiser de Judas de vos «tendres» épouses et qu'elles se rassurent je vais bientôt laisser la place, elles pourront allumer leurs cheminées et regarder s'il ne reste pas encore quelque chose à cramer.
J'avance et j'entends des portes qui se ferment derrière moi tant mieux je n'aime pas les courants d'air inutiles plus rien ne pourra aérer mon esprit, je n'ai plus de temps à perdre il y a encore une deuxième étape la plus critique celle qui fera de moi quelqu'un d'autre je vais poser ma valise aux pieds d'un lit, celle que je traîne depuis soixante trois ans et si quelqu'un veut 'ouvrir qu'il ne s'étonne pas de la voir vide. Je mesure le temps un mois, cinq mois une année peut être mais pourquoi faire? je n'ai plus envie de vous parler, de vous voir, partez courir dans vos jardins, allez cueillir des jonquilles, ramassez le muguet pour vos femmes, vos belles familles, réunissez vous en familles, mangez, buvez éclatez vous et peut-être que l'écho de vos ébats parviendra jusqu'à moi pour me confirmer à jamais ce que je suis devenu. Je vais arrêter d'écrire ce n'est plus le moment de régler mes comptes je devais le faire bien avant et puis je suis trop fatigué, alors au-revoir, à bientôt, adieu enfin choisissez le terme qui vous plaira...
A . G le, 03.05.2015
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LES LARMES SOUS LE SOLEIL
Je voulais raconter ma vie à Marseille, mais il est trop tard maintenant, cela n'intéresse plus personne, c'est comme si la mer me rejetait deux fois. Vingt ans d'une vie sans les autres et pourtant c’était à eux, pour eux, que je voulais écrire.
Je repense à ce lieu où avec ma femme j'aimais regardais le plus loin possible l'horizon bleuté de la Méditerranée. C'était un de ces endroits où ma solitude devenait plus légère, où elle chassait les pensées qui brûlaient mes yeux et où par moment je croyais être heureux.
J'avais quarante ans quand je suis retourné à Marseille, le même âge que mon père quand il a «débarqué», ce n’est pas je crois le fait du hasard mais les fondations d’un patrimoine qui se construit comme ça au fil du temps, avec son histoire qui vous fait vivre et qui vous fait mal aussi parce qu’elle n’intéresse plus les autres.
Pourtant mon seul regret c’est que mon père n’ait pas revu son Pays et lorsqu’une jeune fille me dit qu’elle en revient très enchantée, qu’elle veut y retourner, je sais alors que ce regret devient beaucoup plus fort car mon père a bien été volé, expatrié même jusque dans la parole pour n’avoir jamais pu «leur» faire entendre que son Pays était si beau !
Alors on ne raconte pas sa vie à des gens qui vous l’ont enlevée, ou d’autres qui n’ont plus de mémoire et parce que les souvenirs deviennent trop intimes quand plus personne ne veut les partager.
Je croyais être un enfant du sud mais je me libère, je ne suis de nulle part.
Pourtant je suis le fruit de l’amour avec ce jus si doux qui coule dans mes veines mais comme l’arbre qui pleure en épandant sa sève, le jus de l’existence s’évapore et se sèche car chaque jour qui passe me laisse un peu plus las et quand l’espoir ne sera plus de mise, je demande à la science et à tous ceux de ma famille de me laisser partir car je veux vivre et mourir d’amour.
La mort enlève la vie mais jamais la mémoire.
Le 15 Janvier 2015 ANDRE GASPERINI
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LES MOTS
Ils sont inutiles, dans des circonstances douloureuses bien établies. Je préfère le silence, les soupirs entendus, les regards dérobés pour ne pas trop déranger. Les mots rendent sale aussi contagieux que la maladie qui vous ronge, ils sont l’émanation de l’esprit et l’esprit malade qui les reçoit ne les accepte plus, ils peuvent jeter des torrents de je t’aime, vous noyer en parlant d’amour mais ne seront jamais la main qui se tend et vous relève chaque jour un peu plus. J’ai entendu beaucoup de mots, j’en connais beaucoup aussi, je sais la valeur du message, bien appris le sens de la parole, mais j’ai surtout compris son silence.
Comme ce jour où le professeur me rend ma copie «ornée» d’un zéro bien rouge, qu’il me regarde sans prononcer un mot. Il venait simplement de rendre ma feuille un peu plus propre.
Si les mots n’ont jamais bercé mon enfance fragile, les jus d’oranges que ma mère pressait tous les jours, ce goût acide frais et sanguin qui coulait dans ma gorge, la sensation du gant humide qu’elle appliquait sur mon visage avec délicatesse, les livres posés au pied de mon lit que mon père me ramenait avec un baiser déposé le soir sur mon front, étaient la seule chose que ma petite existence avait besoin, l’amour, leur amour.
Bien sur les mots finissaient par sortir, feutrés, ailleurs dans une autre pièce, les sons s’entrechoquaient silencieusement, imperceptibles laissant place à ma lassitude pour laisser couler des larmes jusqu’au creux de mon cou. Je fermais les yeux, la main posée sur mon livre je m’endormais dans une paix profonde.
J’ai passé mon enfance à lire, je n’aimais pas ses jeux, je prenais mes livres j’en buvais les mots d’une soif d’être ailleurs, je partais et vivais avec eux car ils ne m’étaient pas adressés, j’aimais le dos du bossu que l’on caressait, le misérable qu’on traînait dans la boue et les moulins à vent qui avaient balayé ceux qui un peu plus tôt me traitaient de binoclar.
Je suis d’une famille méditerranéenne où la parole s’étale sur des tablées interminables, où chacun à quelque chose à dire même si les mots n’intéressent plus, sans avoir le droit de parler j’écoutais ces adultes qui en s’en apercevant, finissaient par les déformer me privant du seul motif qui me liait à eux, muet et sourd mon esprit retournait vers mes livres où mon enfance était restée.
J’ai reçu les mots pour les ressentir d’un goût médicamenteux qui coule dans mes veines, d’une chaleur stupide qui fait frissonner, d’une douleur qui creuse l’estomac, comme la maladie des autres qui contamine la mienne.
Mon enfance n’était pas malheureuse, elle évoluait dans un monde qui n’était pas le sien avec la place que les adultes voulaient lui accorder. Je jouais avec mes frères mais moins avec l’aîné qui possédait les droits que je ne puis avoir, me contentant de peu en partageant beaucoup.
J’acceptais ce partage où la règle n’avait pas d’exception, un compromis de notre vie et où chacun attendait son tour sans prononcer un mot.
C’était l’essentiel de ma jeune existence, d’attendre ce jour sans que l’on dise non, je bannissais ce mot qui fermait mes frontières, calculais souvent l’espace à franchir et le courage qui pouvait les ouvrir. Rebelle à chaque mot qui stoppait mes envies je finissais toujours par ne pas demander.
Le maître d’école nous faisait rejoindre notre place nous demandant de nous taire sans que personne ne parle, debout devant son pupitre, les bras croisés il scrutait nos tenues prenait son temps pour que le « silence» règne et finissait par dire «vous pouvez vous asseoir» La frontière venait de s’ouvrir j’étais resté debout. Il s’avança vers moi me pris par les épaules en appuyant dessus il me redit «tu dois t’asseoir». Je l’ai regardé du haut de mes dix ans et j’ai répondu «non». Ce mot je lui faisais cadeau, je n’en voulais plus, je lui donnais il était l’héritier de ce que je n’avais pas. La classe silencieuse s’est poursuivie sous son autorité et quand la cloche a retentit il a libéré les liens du banc où j’étais attaché.
Un philosophe a dit que s’il devait refaire sa vie elle serait identique avec les mêmes erreurs et d’avantage encore mais il sût que cela n’arriverait pas. Les mots ne valent rien si rien ne peut se faire.
Je vivais sous l’autorité parentale où rien ne pouvait se faire sans l’acceptation du père, ma mère qui ne travaillait pas besognait son logis jusqu’au-boutisme, fidèle à ses envies, ses idées, ses limites qu’elle menait jusqu’à l’extrême. Alors bien sur les conséquences avaient un prix, sa volonté finissait par s’étioler et le manque d’air de sa maison bien propre retombait sur nous parce que nous étions seuls à pouvoir le ressentir.
Je n’aimais pas l’enfance, je voulais aller à la plage, ma mère n’aimait pas le sable, rejoindre mon frère au Champs de mars non plus, je n’étais pas l’aîné et le cinéma dépendait des résultats scolaires.
Je ne sortais que pour suivre le chemin qui conduisait ma mère au bureau de mon père. Nous traversions le port, je regardais les grues des dockers affairés, les énormes masses noires des bateaux amarrés, et j’enviais tous ces gens qui s’y engouffraient balayés par le vent, sans savoir que le cours de l’histoire allait un jour «combler» mes espérances.
Le dimanche nous partions en famille, la voiture de mon père s’arrêtait le matin aux portes du cimetière où nous allions nous recueillir sur la tombe de mes grands-parents. Le lieu me plaisait avec son chemin bordé d’arbres aux pointes allant défier le ciel, où le soleil déjà haut resplendissait sur d’innombrables couleurs, où l’ombre et sa fraîcheur dessinait les allées, pour que le jour et la nuit puissent caresser les vivants et les morts.
Les mots restaient secrets, enfouis dans les esprits ils s’en allaient rejoindre ceux qui nous avaient quittés en laissant une trace sur notre joue humide.
De La corniche magnifique la mer étalait sans vergogne son horizon bleuté, j’admirais les plages, enviant ceux qui pouvaient s’y baigner. La voiture prenait son temps c’était la vraie sortie, qu’il ne fallait pas rater puis elle se rangeait vers une belle maison tenue par les amis de mes parents qui affectueusement venaient nous accueillir. A l’heure du goûter généreusement servi, je me forçais à boire le chocolat bien chaud, et au moment venu je disparaissais pour vomir aux pieds des arbres ce que mon estomac ne pouvait plus tenir.
Oh! bien sur j’adorais mes parents, ma mère était si belle qu’elle me rendait jaloux, tout en elle heurtait ma jeune conscience et me faisait douter. Je voulais ses caresses et j’attendais ses gifles. Sa maison soignée, rangée dans ses moindres détails par ses mains délicates, laissait pénétrer le soleil qui rayonnait sur sa douce personne. Elle m’aimait d’un amour exclusif qui rejetait tout ce que j’imaginais lui dire, les mots sont dérisoires quand rien n’est partagé.
Mon père était droit, juste et honnête un brave type souvent effacé mais tellement présent. Je craignais ses colères mais j’aimais sa justice. Il décidait toujours et prenait le temps de la réflexion il n’aimait pas devoir regretter. Musicien par passion, fils d’une mère Lyonnaise professeur de musique, il prenait sa trompette, plaçait soigneusement la sourdine et entonnait pour nous ravir l’Ave Maria, je l’admirais tant que là aussi les mots devenaient inutiles.
J’aimais l’école, plutôt bon élève surtout pour les cours de français, je trouvais cette langue belle, riche, je scrutais les gestes de l’institutrice qui par un léger crissement de craie écrivait des mots joliment étalés, où le noir et le blanc se mélangeaient pour parfumer la classe. Elle entourait un mot et demandait à chacun d’en expliquer le sens. Je ne levais pas le doigt, j’attendais les réponses des petits camarades, je connaissais la mienne, je voulais savoir si le mot pouvait changer le cours des choses et jusqu’où il pouvait mener. Elle écoutait les réponses, tournait la tête de droite à gauche, j’évitais son regard, les yeux baissés de celui qui calcule sa réponse je m’isolais dans ma béatitude certain que le sermon finirait par tomber. C’était une petite brune typée et au fur et à mesure des explications elle secouait sa tête comme une salade dans un panier trop grand, son petit corps s’agitait, s’étendait de plus en plus près à fondre sur sa proie. Elle s’avança vers l’écolier, le pris par le col de sa blouse grise et le flanqua devant le mot éphémère, cerclé, immaculé, elle écrasa le nez du grand maigre au milieu du cercle le pris par l’oreille et le fit disparaître par un visage qui avait servi d’éponge. Il regagna sa place la main plaquée sur son oreille d’où s’échappait un léger filet de sang, nos yeux embrumés se fixèrent un moment, c’était mon frère et j’avais ma réponse.
Je voulais grandir vite dans un monde qui s’agitait beaucoup, le cours Bertagna se vidait plus tôt, les petits groupes s’éparpillaient comme un nid de fourmilles que l’on écrase. Les rares sorties étaient inexistantes et la radio hurlait. L’atmosphère pesant apportait des bruits que je ne connaissais pas. Tout était semblable mais rien n’était pareil, la ville aux abois était prête à muer car elle allait changer par un grand homme libérateur. Mais l’oppression persistait sous notre toit, ma mère pleurait souvent s’emportait beaucoup et nous giflait par sa contrariété. Mon père rentrait plus tôt et après les embrassades on filait dans notre chambre. Je voyais par la fenêtre la grande photo d’un homme plaqué au mur qu’on nommait Général. Il était venu, nous avait compris mais rien n’avait changé.
Les congés scolaires duraient trois mois que l’on passait à Maison Blanche chez mes grands-parents maternels, bonheur inoubliable, je les adorais mais surtout le grand-père qui bêtise sur bêtise ressuscitait l’enfance. Il bossait à la gare et les trains frôlaient sa maison qui n’en finissait plus de trembler. J’étais avec lui dans la cour, assis sur sa chaise un détective dans les mains les lunettes au bord du nez il lisait des choses qui le faisait pleurer, un train arriva beaucoup plus lent, il releva ses lunettes me fit signe de la tête, je me suis retourné j’ai baissé mon pantalon et j’ai montré mes fesses aux voyageurs. Il éclatait de rire et nous chantions en chœur: «quand j’étais petit je n’étais pas grand, je montrais mon cul à tous les passants!». «André vient !». Il me mettait sur ses genoux, me tortillait l’oreille et me donnait un bonbon. Il avait fait la grande guerre mais n’en parlait jamais, seul son tableau rempli de médailles témoignait du vécu ou quand il murmurait «putain de guerre». Ses mots doux et rigolos me pliaient quand il disait gendarme à ma grand-mère. J’avais choisi dans son poulailler un petit poussin tout jaune, chétif qui mourut de vieillesse. Le temps passait trop vite, il fallait repartir. Ma grand-mère et sa fille étaient torrent de larmes, lui aussi avait les yeux humides mais ses larmes ne débordaient jamais de ses lunettes. «Papa j’ai peur de la photo du Général». Je voulais dormir avec «l’aîné» dans la grande chambre où resplendissait le piano de ma grand-mère. Nous avions dormis ce soir-là les trois frères dans cette grande pièce et au lever du jour la chambre libérée explosait sous la bombe, le mot ressenti dans sa pure expression avait sauvé deux vies.
Je n’avais pas grandi, pas assez pour comprendre, l’étau se resserrait sur mon petit cerveau, je n’allais plus à l’école et ne faisais plus rien. J’allais dans la chambre de mes parents, j’ouvrais un grand placard je prenais une chaise et ma main se servait au hasard un livre parmi la multitude.
Le pont des soupirs fut mon dernier livre ouvert et jamais terminé sur cette terre natale.
La vie d’un homme sans jeter l’opprobre sur sa famille dépend de son berceau, l’enfant qui naît arrive en pleurant et l’homme qui meure en fait de même. «On ne choisit pas ses parents, on ne choisit pas sa famille» mais celui de se battre. Le mot peut prendre la connotation que chacun selon sa sensibilité voudra bien lui donner. Il est pour moi le seul chemin de l’homme, le cordon de la vie et la mort, l’ombre ou la lumière. Il faut grandir mais pas trop vite dans la fusion étroite qui passe l’enfant à l’adulte d’aujourd’hui. Le vent du sud écrasait la ville en souffrance, les taxis cédaient la place aux ambulances, les sirènes hurlaient à chaque coin de rue, des véhicules militaires affluaient de partout et le couvre-feu venait d’être instauré. Sur le Champs de mars absorbé par les engins de guerre les arbres étaient au garde-à-vous devant la cohorte qui se mettait en place pour vivre l’évènement. J’observais de ma fenêtre cette scène sur laquelle devait tomber le rideau rouge. La voiture arriva très vite un homme s’éjecta de l’habitacle et disparut dans un immeuble, rejoignit le véhicule qui disparut de la même façon.
Les gens apportaient de la nourriture aux soldats du contingent, certains s’embrassaient, se serraient la main, d’autres se donnaient des claques dans le dos, un ensemble réciproque qui aurait pu durer si la bombe n’avait pas explosée. La façade s’effondra comme un château de cartes, l’immeuble vomissait le sang, gémissait, hurlait à travers ses vitres éclatées, s’effondrait de douleur et d’effroi les mots qui s’enfuyaient apportaient le malheur. L’enfance qui se construit dans le fracas se brise comme la vague sur les rochers et dépose en une mousse légère les restes de l’innocence, ma vie ombre et lumière est un combat que je vais poursuivre, et peut m’importe ses souffrances si c’est sa volonté.
A Saint-Apollinaire le 15 février 1975, Mathilde devient ma femme et me donne un an plus tard la fierté d’être père. Selon sa volonté nous avons trois garçons, cordon de notre vie qui nous conduit vers la lumière, je ne connais pas mon espérance de vie mais je ne regrette rien, j’aime ma femme cette belle personne que je respecte, et mes fils bien entendu car ils sont tous les quatre cette lumière étoilée qui conduit mon chemin.
Kévin, Anaïs, Emilie, Lucie, Maxime et Chloé votre grand père vous aime.
Les mots, gratuits ou sincères, cruels ou émouvants sont la responsabilité de celui qui les prononce, et la propriété de celui qui les écrit. Je préfère l’écriture à la parole, sur une feuille le mot se pose, se voit, se transforme, prend tournure par l’esprit qui lui transmet son âme. Le lecteur est seul devant le mot qui peut communier ou rejeter les sentiments sans heurts ni précipitation car l’expression est libre. Sur le papier le mot se grave, s’incruste, insère des fragments de vie, prend matière pour faire éclore le patrimoine de notre humanité. Cette richesse n’existe que dans les livres où le mot se parfume de tendresse et de violence pour parler de la vie des autres sans pitié ni complaisance, il propose et n’impose rien il nous laisse libre. Je préfère lire le mot que de l’entendre car je peux le garder où le jeter pour qu’il brûle en enfer.
Mon père a écrit ses mémoires je mentirais si je dis que tous les soirs je lis, mais j’ouvre un passage au hasard je revois son écriture et ses mots, ça me suffit. Je referme le livre je lui dis «papa je t’aime». Le mot secret me fait du bien car il mène à l’action. Je conduis ma vie par les gestes qui peuvent aider, je force l’énergie à écouter car elle se nourrit de charité chrétienne.
Cela ne fait pas de moi quelqu’un de bien, j’ai fait du mal me battant souvent pour des mots et des causes inutiles, si mon sang a coulé il s’est mélangé aux autres, le temps n’est plus aux regrets les forces diminuent il faut de l’espace pour trouver le repos. L’ombre ou la lumière voilà ma vie, voilà mon existence comme la peau de chagrin le chemin se réduit, je n’ai pas peur du cordon qui se coupe mais de l’ombre qui tombe sur les autres.
Le mot élément de la langue expression de l’esprit est bon, grand, spirituel grossier ou injurieux, ordonne et sanctionne.
Il reste Un mot le dernier combat de l’ombre ou la lumière mais celui-là il porte un nom.
Quand le mot s’arrête l’âme l’emporte dans l’immensité du ciel et pareil aux nuages il disparaît chassé par le vent de l’éternité.
A.G. le, 23.02.2015
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DES VACANCES ETERNELLES
Sur le quai noir de monde, la foule se pressait avec ardeur, discipline et résignation vers la passerelle, bras tendu dérisoire de cette masse noire qui balançait son impatience dans la ferveur du port, où se mélangeaient les odeurs et les bruits, étouffant ainsi les plaintes, les cris, les jurons et les pleurs de ceux qui devaient s’en aller.
Je suivais cette vague humaine, agrippé à ma mère et tout près de mes frères. Je ne voulais pas les perdre et surtout pas mon père qui courait en tout sens et qui donnait ses ordres:
«Allez les enfants! Dépêchez vous, suivez cette colonie.»
On partait en vacances en Métropole, le temps que tout se calme, c’est ce qu’il avait dit.
La Métropole, étrange monde imaginaire où tout serait plus calme, beaucoup plus vaste aussi, loin du bruit, des cris, des bombes, des armes qui résonnent, des concerts de casseroles accrochées aux balcons, et bien loin des «ninis» (les Arabes pour moi), qui me faisaient la guerre. Alors excité et ravi, j’ai suivi ma famille dans les entrailles du monstre.
Il venait d’engloutir les restes de mon enfance.
Marseille, Métropole de soleil, je regardais partout et tout était immense. Le voyage bien que douloureux ne fut pas long, le monstre venait de nous jeter sur cette terre nouvelle, on l’appelait Marseille et on était en France. Chez nous, chez moi.
· «Regardez les Pieds Noirs, ils viennent de débarquer !»
· «Des fils de l’OAS, faudrait les fusiller !»
· «Tous des ratons, y’a pas de travail pour eux !»
· «Ils viennent manger notre pain qu’ils aillent bouffer ailleurs !»
Le Mistral qui soufflait ce matin de mai 1962, emportait avec lui mes illusions perdues.
La 2 CV de mon père ne roulait pas très vite, accroché au rétro Charlot se balançait, je l’ai suivi longtemps, plus loin qu’Aix-en-Provence, il m’a pris dans ses bras et je me suis endormi.
Il sera mon ultime compagnon et mon dernier refuge.
Le derrière fracassé par la barre du fauteuil, (place centrale «réservée» au plus petit des trois), je sortais du sommeil en laissant Maison Blanche et Fort de L’eau où j’étais retourné.
Sur le chemin fatiguant d’une route interminable, mon père suivait le point planté au milieu de la carte. Absorbé par sa conduite il ne disait pas grand-chose, mais regardait ma mère assoupie, la carte de France posée sur ses genoux. « ça va mieux poupette ?». La question restera à jamais sans réponse et seules les pensées des uns et des autres se rejoignaient dans un profond soupir.
C’est l’église que j’ai vue en premier, puis la silhouette chétive qui avançait lentement dans ce décor lointain en traînant avec elle le poids de son fardeau et celui de son âge. La vieille dame contourna la maison du Bon Dieu, s’engouffra sous un porche aussi sombre que l’était son fantôme et disparut sans jeter un regard. Le courant de l’histoire venait de s’allumer
· « Ne fermez pas les portes Rinou, ici tout est tranquille et y’a personne qui vol !.»
L’inconnue qui s’exprimait (sosie de ma grand-mère), comprimait ma mère de ses bras charpentés en balançant de grandes claques ravageuses sur ses petites épaules, si bien que cette pauvre femme secouée de sursauts, le nez écrasé sur l’opulente poitrine, son petit corps menu gigoté par la pieuvre, ne put contenir le torrent de ses larmes. Si ce flot de tendresse aurait du m’émouvoir, la crainte qu’il finisse par avoir raison d’elle, m’empêcha de contempler la scène.
Ainsi était Tante Emilie.
L’oncle Pierre, gendarme de son état, était un homme qui souriait. Il «faisait dans la diplomatie» (c’était son mot), et toujours le sourire aux lèvres.
Je posais la question :
· Tu cours après les voleurs?
· Bien sur
· Et tu tires sur eux?
· Ah! non, je n’ai jamais tiré sur personne! Et puis tu sais ici y’a pas beaucoup de voleurs…
Trois jours après, Charlot disparaissait…
Asnières-les-Dijon, petit village de Bourgogne perdu au nord-est de Dijon ne faisait pas de bruit. La clarté et les heures suspendues à l’horloge de l’église, guidaient la centaine d’âmes qui venaient le hanter.
L’Abbé Foltête connaissait tout le monde et chacun d’ailleurs allait de son invitation pour cet homme immense, imprégné de croyance et pour qui, pas un ne manquait au sermon du dimanche.
Il avait le ton sévère mais ne s’emportait jamais, sauf le jour où Marcel lui dit que Marie était grosse parce qu’elle était pleine de «grasse»; la brosse du tableau noir s’échappa de sa main et je reçu en pleine poire l’offrande qui lui fut adressée.
Les heures de catéchisme venaient de débuter...
Trois rues principales desservaient le village : Le lavoir, le château, le cimetière…plus personne n’y venait, il était le vestige et la mémoire d’une civilisation lointaine où l’époque oubliée d’une vie de labeur suintait sur les pierres que le vent caressait. C’était un beau lavoir ouvert aux quatre vents, perdu sur un chemin envahi par les ronces, passage obligatoire vers le grand bois qui s’étendait derrière.
L’endroit était magique cerné de solitude, le crépitement des bestioles sous les feuilles desséchées, le concert des oiseaux au-dessus de nos têtes, ne troublaient pas non plus ce quotidien tranquille et, cette sensation étrange d’être les seuls au monde venait nous envahir.
Les propos qui vont suivre ne sont pas le reflet de l’auteur, mais la vie d’un gamin dans la tourmente des «grands».
Il venait de nulle part, planté là comme une bouse dans ses bottes crasseuses, un bâton dans la main, le béret sur la tête, ne ressemblait à rien, n’inspirait rien de bon, il puait le crottin accroché au veston avec cet air idiot de celui du village.
· Ben vingt Dieu ! c’est t’y qui vous a dit d’venir ?
· Faut pas traîner par là, vous avez rien à faire !
Il parlait fort et gras tout en roulant les R et comme sa question s’adressait à des sourds, il entreprit alors de se rendre plus vexant :
· C’est vous les Arabes ?
· On est Français, pas Arabes ! J’ai voulu rectifier… Je regardais mes frères, Marcel était aussi blanc que Christian était rouge.
· Mon père m’a dit que les rapatriés, c’étaient tous des bicots
· Ton père c’est une tête de nœud !
Je venais de lui claquer ma réponse insultante, et protégé par mes frères qui s’étaient mis devant, je continuais ma déferlante d’injures :
· Vous les Français, vous êtes des frangaouis !
· Des Patos
· Vous êtes tous cornout et bastonnades!!! (cocus battus)…
· Et tu diras à ton père qu’il aille n….. ses m….
L’avantage était pris par des mots dont j’ignorais le sens, nourris par la douleur qui m’avait transformé, et l’obligation de vouloir exister. Délaissant le combat l’idiot s’en retourna; il repartait en fouettant les ronces, mais comme un chacal qui achève sa proie, il se prit sa dernière estocade :
· Tu vas où ?
Faut qu’j’aille garder les vaches !
· Ah ! c’est pour ça que tu pues !!!
Il avait disparu et j’étais convaincu qu’on allait se revoir…
L’oncle avalait sa soupe avec avidité, le temps à cette époque était très dur et c’était le seul repas chaud du soir. La tête baissée vers le bouillon, le souffle court, le geste sur, il plongeait avec rapidité sa grosse cuillère dans le breuvage épais, s’envoyait le liquide fumant dans «l’orifice» par des suçons brûlants, tant et si bien que je finis par penser, bien plus pour combler ce moment que par méchanceté, qu’il finirait noyé dans son potage.
Après le bisou du matin et peu avant de partir, il donnait à la tante ses recommandations d’usage en lui demandant de la diplomatie. Mais elle parce que nature oblige, ne pouvait s’empêcher d’épancher ses humeurs et tout ce qui pouvait la déranger. La maison s’amplifiait crescendo de ses contrariétés et la toile d’araignée inévitablement se refermait sur nous. Alors comme les regrets arrivent toujours trop tard, elle finissait sans vergogne par se donner l’absolution :
· «mais non Rinou ! Pourquoi ? Fallait pas les taper !…»
La nuit dans sa chambre j’entendais ma mère renifler et sa voix tremblotante chuchotait à mon père :
· «ça fait deux mois, faut plus continuer et les enfants ont faim !»
· «j’ai rendez-vous demain à la Circonscription électrique, j’aurai du travail !»
Alors je replongeais dans un monde de misère, de honte et de cauchemars où le petit homme en noir venait me retrouver.
L’Algérie proclamait l’indépendance et mon père recevait le solde de tout compte. Les envahisseurs établissaient le siège, les cailloux volaient dans tous les sens et propulsés par l’envie de détruire ils s’écrasaient sur les carrés de paille. Les combats vigoureux s’étendaient sur la plaine, chacun se faisait face habité par la rage mais pas un par miracle, ne tombait sous ses coups. Mais quand la «guerre» devenait plus sournoise et qu’un projectile faillit toucher sa cible, des cris s’élevaient qui suspendaient le temps. Pourtant ce jour là il s’écroula sans bruit, d’abord sur les genoux puis le nez dans la paille. Des petits lutins tournoyaient devant lui scintillants comme ces milliers d’étoiles merveilleuses qui brillaient dans ses yeux. Il était si bien ! Juste un peu dérangé par le bruit sourd qui martelait son crâne. Il pouvait rester là maintenant, sur son coussin de paille le nez dans les étoiles pour danser avec elles dans ses rêves d’enfant.
· «relèves toi ! T’as le cou rouge, il faut rentrer !»
On l’avait remis debout.
Comme un chacal qui ne lâche pas sa proie il fixait mon regard. Son sourire d’idiot accroché à ses lèvres il dominait l’espace. Il savourait son temps et dans ses griffes il retenait le mien, mais sans doute satisfait du devoir accompli, il repartait vers le château, en tenant dans sa main la fronde qui venait de laver, l’affront du premier jour.
Un matin d’été dans un pré de Bourgogne, la première guerre des pierres venait de s’arrêter.
· «vous voyez les enfants, là bas c’est l’Algérie où je suis né !»
C’était en mai 1992, aux Goudes à Marseille, métropole de soleil, chez moi.
Mais là pour une fois, c’était une autre histoire.
(Pour Gisèle mon rayon de soleil à qui je demande de se battre et de garder l’espoir.)
(Pour Brigitte qui verra le jour au même pays et même endroit que moi, en souvenirs de notre vie professionnelle et en toute amitié.)
(Pour mes parents, ma femme, mes enfants, Lilas et ma petite Jonquille dont les cendres au large du Frioul sont allées rejoindre la terre de mes ancêtres.)
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Chroniques du Bastion de France
par Jean Claude PUGLISI,
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Ali pieds de plomb et Messaoud
Il y a déjà bien longtemps que j’ai eu très envie de me raconter certaines petites histoires d’autrefois, qui sans façon sont venues mettre en scène, deux personnages éminemment célèbres et hauts en couleurs de La Calle de France : j’ai nommé : Ali pieds de plomb et Messaoud.
Mais qui donc étaient ces deux individus ?
Ali, alias "pieds de plomb" était un solide gaillard grand et costaud, qui devait peut-être à cette époque friser de près la cinquantaine. Il arborait une belle et éternelle paire de moustaches noires bien fournies - dans le pur style des années 1900.
Vêtu d’un antique et éternel costume noir délavé par le temps et de propreté douteuse, il cheminait pieds-nus d’un pas lourd et pesant, toujours coiffé d’un béret de couleur assortie à ses vêtements. On aurait bien dit chemin faisant qu’il écrasait des œufs, tant sa façon de marcher était particulière : ce qui devait tout naturellement, lui valoir le beau et massif sobriquet d’Ali pieds de plomb, qui à vrai dire lui allait à la perfection.
C’était un homme tranquille et sans histoire qui bien que marginal, vivait d’une façon toute pacifique et entretenait même des rapports tout à fait normaux avec autrui. Il faisait partie d’une grande et bien connue famille Calloise et on disait qu’il avait autrefois suivi une bonne scolarité et même obtenu le prestigieux certificat d’études primaires. Tout laisse à penser à la véracité de la chose, car ce n’était manifestement pas un analphabète et qu’il s’exprimait toujours dans un excellent français. Quant à son comportement habituel et sa manière de faire, personnellement je trouvais parfois qu’il émanait de sa massive personne, une certaine personnalité voire une réelle majesté.
Il résidait en bas la marine près de l‘ancienne centrale électrique, à deux pas de la mer au lieu-dit les petits quais, dans un vaste local appartenant à son neveu - M. Abdel Rahamane REZZAZ +. En effet celui-ci possédait une barque de pêche à la sardine et rangeait dans ce garage les divers armements de son bateau, en particulier les filets et cageots vides laissés sous la bonne garde d’Ali. Ainsi grâce à la générosité de son neveu, notre homme avait trouvé là, non seulement un gîte gratuit mais aussi le couvert en prime, puisque, chaque matin dés l’arrivé à quai de la longue barque, un plein cageot de sardines lui était attribué de plein droit. Ali s’empressait alors de prélever sa ration de nourriture quotidienne et vendait le reste du poisson pour satisfaire ses besoins divers, en particulier l’achat de quelques litres de vin rouge tirés des tonneaux de chez Mme Miniquebrique*+, qui tenait depuis toujours une cantine sise rue de Verdun.
Ali pieds de plomb s’il faisait souvent l’objet, de quolibets et de plaisanteries par les gens de notre cité, devait surtout subir avec beaucoup de patience toutes les bêtises des gamins du quartier. Alors il lui arrivait parfois de s’emporter et de proférer de terribles menaces, pour tenter de décourager, les débordements des garnements, qui traînaient trop prés de ses pénates. Un beau jour un plaisantin local voulant semble-t-il faire l’intéressant, avait griffonné en grosses lettres et à la peinture rouge sur la porte de l’antre d’Ali, une indication insolite qui signait les lieux et reflétait son fidèle locataire. Au-delà du temps, ces quelques mots disgracieux peints en rouge, devaient rester gravés dans ma mémoire d‘une façon indélébile, peut-être bien parce qu’ils résument à eux seuls, la personnalité et la philosophie de ce brave homme :
"Ali pieds de plomb.
Dompteur des bouteilles de vin rosé.
Hôtel des petits quais.
Pas de loyer.
Bureau du congé payé."
Messaoud quant à lui, était très différent de son coreligionnaire. Brun de peau et cheveux crépus bien fournis couleur corbeau, il accusait une taille moyenne et jouissait d’une corpulence ordinaire. Il apparaissait toujours proprement vêtu de vêtements bleu marine et cheminait de par les rues du village parfaitement chaussé d’espadrilles. Je ne pense pas, qu’il ait fait seulement quelques jours d’école dans sa prime jeunesse, mais bien qu’analphabète son comportement et son attitude de tous les jours, faisaient de lui un être parfaitement sociable et bien intégré dans la vie de la cité. Après la guerre 40 /45 moyennant quelques oboles, il rendait régulièrement de menus services, en côtoyant de près les quelques estivants qui venaient à La Calle durant l’été. Un temps il avait même exercé le métier de marin-pêcheur et ce n’était pas comme on pourrait le penser, un parfait marginal isolé à l’instar d’Ali - alias pieds de plomb. Cependant, il avait tout comme ce dernier un petit penchant pour la dive bouteille, bien que je ne l’ai jamais vu rouler dans quelque ruisseau que ce soit.
Comme tous les gens de la cité Calloise, Ali et Messaoud se connaissaient depuis toujours et s’ils entretenaient entre eux d’excellents rapports, que je pourrais qualifier sinon d’amicaux ou du moins de comptoir, ils subissaient parfois l’un et l’autre les plaisanteries du village et espiègleries diverses de leur entourage. Je précise tout de même en toute objectivité, que ces facéties, se cantonnaient toujours dans les strictes limites du raisonnable et ne dépassaient jamais certaines frontières. Parce que dans le fond, la population Calloise, avait dirons-nous pour les deux compères, une tendresse certaine voire si je ne m’abuse, une réelle estime.
Cinq anecdotes bien croustillantes que j’ai tiré de mes souvenirs, sont venues aujourd’hui chatouiller mon esprit et je ne peux m’empêcher, de les conter à la ronde pour vous entraîner une fois de plus, sur le chemin parfois savoureux de ma nostalgie :
- 3 histoires de vinasse.
- 1 histoire d’eau salée purificatrice.
- 1 histoire extraordinaire.
Écoutons ensemble très religieusement et tour à tour, ces belles et touchantes symphonies d’antan, jouées admirablement par deux légendaires rois et non moins personnalités Calloises.
C’était par un beau matin de l’été du côté de la rue des corailleurs.
Bien installé sur mon balcon de l’ancienne douane où j’habitais, je regardais avec bonheur et sans jamais me lasser, le merveilleux panorama qui depuis toujours s’étalait sous mes yeux : un port tranquille vide de ses bateaux - la puissante presqu’île avec ses fortifications et son petit phare blanc coiffé de rouge - le bleu profond de la mer et son horizon lointain - les petits quais paisibles et ses pêcheurs remaillant leurs filets - les herculéens rochers du lion et la redoutable passe qui marquait l’entrée du port… Je ne négligeais jamais à l’occasion, de jeter de temps à autre un œil curieux et inquisiteur, sur les mouvements des personnes qui circulaient dans ma rue, mais aussi de tendre une oreille discrète et quelques peu intéressée, aux différents bruits et rumeurs du quartier qui parvenaient jusqu‘à moi.
En quelque sorte, en plus du splendide panorama je jouissais alors de l’immense privilège, de pouvoir parfaitement goûter de mon perchoir élevé, à un fabuleux spectacle son et lumière, toujours animé avec talent par des acteurs improvisés, qui sans même le savoir se produisaient spontanément dans ma rue.
Ce matin là, mon attention fut attirée par l’écho d’un conciliabule tout proche, qui venait de quelque part dans un coin de trottoir. Je me penchais alors pour assouvir ma curiosité et tentais un moment de deviner l’origine de cette conversation à bâton rompu. Je découvrais alors avec un sourire non dissimulé, Ali pieds de plomb avec son coreligionnaire et néanmoins compère Messaoud, en pleine discussion sur un sujet sûrement bien à eux et qui aujourd’hui encore dépasse mon entendement.
Les deux acolytes campaient ce jour-là tout prés de la devanture de l’épicerie du port : un modeste commerce tenue à l’époque par la famille SALVIA et qui s‘ouvrait sur la rue des Corailleurs. Ali pieds de plomb puissant et massif s’était appuyé nonchalamment, le dos au mur et les bras croisés sur son puissant thorax. Quant à Messaoud, il lui faisait vigoureusement face, en regardant fixement son compère dans le blanc des yeux. J’ai cru comprendre que ce dernier avait engagé un espèce de plaidoyer sur je ne sais quelle philosophie particulière, pour tenter de convaincre à tout prix son interlocuteur du moment. Pour donner plus de poids à sa grandiloquence, il devait en prime accompagner ses propos par toute une série de mimiques, de grands gestes et mouvements variés de ses mains. Je remarquais alors sans aucune surprise, que le timbre de leurs voix était dirons-nous quelque peu vaseux voire vineux, ce qui constituait, il faut le dire l’état habituel des deux individus à cette heure chaude de l’été.
Pendant ce temps là, couffins à la main des clients rentraient et sortaient de l’épicerie, sans même prêter une attention particulière aux deux plaideurs, qui disons-le n’en finissaient plus de s’affronter à la loyale, dans une joute oratoire qui sans conteste se voulait pacifique. C’est alors qu’il devait se produire un incident inattendu qui changea la monotonie du scénario : une Calloise qui venait de quitter l’épicerie, emprunta allègrement le trottoir qui passait tout juste devant Ali et Messaoud. En parfaite ménagère, elle était chargée d’un couffin garni de victuailles diverses, d’où émergeait fièrement et à la vue de tous, les goulots de quelques bouteilles de vin rouge vermeil, coiffés de leurs bouchons de liège. Arrivée à la hauteur des deux compères, soudain, la discussion tourna court et le silence se fit.
Dans le même temps leurs regards convergèrent à l’endroit du panier et de son contenu. Ils devaient longtemps et dans le plus profond des silences, suivre des yeux la Calloise qui s’éloignait et lorsque à regret pour les deux amis, l’équipage disparu au détour d’un coin de la rue, Ali et Messaoud restèrent un moment abasourdis et sans voix, pour se regarder fixement d‘un air entendu. C’est alors qu’Ali pieds de plomb, qui venait de se redresser sur ses membres vacillants, pour affecter tout naturellement une attitude qui se voulait majestueuse, saisit affectueusement Messaoud par les épaules pour lui dire d’une voix éminemment doctorale : «Tu vois mon frère ! Mieux vaut le boire que le sentir.» Il évoquait bien-sûr le contenu des bouteilles de la furtive ménagère ! Je me souviens que cette sage sentence ne fut à aucun moment contestée par Messaoud… Pour clore cette histoire et apaiser leur profonde déception des choses de la vie, je les ai vu s’éloigner clopin-clopant en direction de la cantine de Miniquebrique*, où le jus de la treille pouvais toujours se boire au tonneau, sans qu’il soit au préalable utile de le sentir.
Ali pieds de plomb était incontestablement un brave homme, paisible et tranquille comme nous l’avons déjà dit.
Malgré son côté bohême et sa façon bien à lui de vivre en marge de la société, tout cela ne lui empêchait pas d’aimer son prochain et en particulier les membres de sa famille. Un beau jour, il décida d’inviter à déjeuner son jeune neveu Abdelkrim Rezzaz + alias Forteresse, un marginal simple d’esprit fumeur de Kif et alcoolique notoire, digne successeur de son oncle dans sa façon d’exister. Voulant parfaitement honorer son neveu, c’est de grand matin que le brave Ali partit dans direction de chez Miniquebrique, tenant dans sa main un jerricane de 10 litres, avec la ferme intention de faire le plein de vin rouge.
A l’heure du repas et suivant sa vieille habitude, son neveu Forteresse devait arriver quelque peu éméché. Le menu du jour était constitué de sardines sur le gril, accompagnées de pain bis et arrosées de vin rouge à discrétion. Sur ce dernier point comme on peut s’en douter, Ali et Forteresse ne se sont pas du tout privés durant le repas, de se gargariser abondamment le gosier. Cependant Ali qui était de sa personne d’une très robuste constitution, jouissait aussi d’une solide et réelle réputation de taste-vin émérite. C’est pourquoi notre homme tenait bien la boisson, ce qui en soi n’était pas pour l’heure le cas de son neveu, qui rappelons-le avait déjà pris un solide acompte, en ingurgitant à l’heure de l’apéritif quelques bonnes pintes de rouge, avant de se rendre chez l’oncle Ali sis hôtel des petits quais.
A un moment donné du repas Ali pieds de plomb quitta la table, car, on devait alors l’appeler de l’extérieur où, il resta un moment pour répondre aux sollicitations d’un passant. A peine était-il de retour dans son antre, qu’un spectacle épouvantable devait le clouer sur place : son neveu ivre mort qui venait péniblement de se lever de son siége, devait alors se diriger vers le jerricane d’un pas bien mal assuré, pour entreprendre d’uriner très consciencieusement et à loisir via le large goulot, dans le divin nectar contenu dans le tabernacle du récipient.
Devant un tel sacrilège qui venait de se produire directement sous ses propres yeux, Ali pieds de plomb invectiva violemment son neveu, en lui demandant de s’expliquer sur les raisons de ce geste impie et pourquoi il n’avait pas été dehors pisser au grand air, soit contre un mur ou mieux encore directement dans la mer proche ? ! Mais le pauvre Forteresse qui déjà n’était pas gâté par la nature, subissait les assauts des vapeurs de l’alcool ingurgité, par conséquent il restait là éberlué comme un pantin de foire démantelé, sans trop comprendre l’indignation bien compréhensible d‘Ali.
En ce triste jour de blasphème et d‘infamie, accusé de haute trahison et du crime de lèse-majesté la Vinasse, sans autre forme de procès Abdelkrim fut mis à la porte et interdit de séjour dans les lieux, qu’il quitta prestement d’une démarche ébrieuse, toujours accompagné par la fureur et les imprécations de son oncle.
Revenons un moment sur Messaoud pour dire que de confession Musulmane, il était tenu par conséquent comme tous ses coreligionnaires, de respecter les préceptes sacrés du Coran, en particulier l’un de ses principaux piliers : le respect annuel de la période de jeûne du Ramadan.
Il est vrai que notre homme bien que croyant, suivait plus ou moins à la lettre les commandements transmis par Mahomet. Cependant, à l’instar de la plus part des autres Musulmans, il lui arrivait souvent de déroger discrètement à certaines règles, qu’il trouvait à son idée bien injustes voire même inacceptables. Alors c’est dans le secret que Messaoud consommait parfois du cochon qu’il soit sauvage ou non, plus par nécessité vitale que par impiété. Mais sa dépendance habituelle au jus défendu de la treille, était pour lui le plus grand des soucis de sa modeste existence. Car en effet comment pouvait-il cacher, son goût immodéré pour toutes les boissons alcoolisées ? D’autant plus lorsque l’on connaît les effets secondaires causés par leur consommation !
Comme le faisait sans aucun complexe Ali pieds de plomb, de son côté le brave Messaoud lui emboîtait fidèlement le pas, en se grisant de plus belle à la cantine des dames Constantine * et Miniquebrique *. Le résultat est qu’il rentrait souvent chez-lui en titubant dangereusement, après une traversée mouvementée du village, sous les quolibets de la foule et les sévères admonestations de ses semblables. Mais cela dit, c’est surtout en période de Ramadan, que le problème devenait beaucoup plus ardu pour notre héros, dans la mesure où il était tenu aux yeux de tous et par conséquent d’Allah, de respecter strictement le jeûne du Ramadan, en particulier, de s’abstenir totalement d’alcool sous quelque forme que ce soit.
Par une fin d’après midi très chaude de l’été, alors que la période de carême battait son plein, Messaoud fidèle à son habitude de tous les jours, devait se retrouver sur les quais à la rentrée des chalutiers, dont il connaissait depuis toujours les membres d’équipage, qui souvent le gratifiaient d’un peu de poisson pour assurer son repas du soir. Ce jour-là il avait fait très chaud et Messaoud s’il ne souffrait pas trop du jeûne, ressentait bien péniblement les effets du sevrage alcoolique. Au moment de l’accostage d’un chalutier, un marin pêcheur héla Messaoud pour lui tendre comme de coutume, sa ration quotidienne de poissons frais. Au même moment, un autre membre de l’équipage qui voulait un peu rigoler, tira prestement de son couffin une bouteille de vin à peine entamée, en demandant à Messaoud de la boire en public, s’il voulait emporter le poisson qu‘on lui offrait en ce soir de Ramadan. Il faut dire qu’à cette heure, les quais étaient noirs d’un monde de tous âges et de toutes confessions. Pour Messaoud cette divine bouteille qui miroitait dans la splendeur du soleil couchant, avait un éclat vermeille d’une beauté infinie. Alors faisant fi de la foule qui s’était mise à le huer, il ne put un seul instant résister au nectar des Dieux. Se saisissant alors vivement de la bouteille, il la porta à ses lèvres pour la vider d’un trait et sur-le-champ, en disant tout haut à qui voulait l’entendre son amour d’Allah et du Coran, mais aussi et surtout sa vénération pour tous les vins du monde.
En ce jour de blasphème, Messaoud ne s’est même pas fait lynché par la foule, ni bousculé par ses coreligionnaires, peut-être bien ? Parce que s’était un très brave et honnête homme, mais aussi et surtout, parce qu’il avait eu le courage de faire en public et de dire tout haut, ce que bien des musulmans de l’époque pensaient tout bas.
Poussé par la curiosité, je m’en vais maintenant descendre en bas la marine, autrement dit, du côté des petits quais, en plein cœur du domaine d‘Ali pieds de plomb, car ,dans le beau jardin de mes souvenirs, je me souviens avoir entendu en ce matin de printemps, des cris pleins de fureur et des ricanements bien sarcastiques, dont je voulais comme tout le monde connaître l’origine.
Mais que s’était-il passé de si terrible, en ces lieux pourtant toujours paisibles ? Ce matin là, Ali pieds de plomb vaquait tranquillement à quelques occupations, lorsque quelques gamins qui semble-t-il devaient s’ennuyer, décidèrent d’un commun accord de lui jouer un bon tour à leur façon. Dans cette petite bande il y avait entre autre un adolescent bien connu au nom de Tella alias l’américain et Hocine Rezzaz + un petit-neveu d’Ali.
Je ne me souviens plus, de la plaisanterie qu’ils avaient concoctée à l’endroit d’Ali, mais, ce que j’ai pu savoir par la suite, c’est qu’une fois leur exploit accompli, les gamins ont recherché leur salut dans une fuite précipitée, car, il faut dire que ce jour-là et contrairement à son habitude, notre héros légendaire avait manifestement dû se lever du mauvais pied. Furieux au possible et écumant de rage, il réussi la performance de se saisir du jeune Tella alias l’américain, qu’il souleva sans aucune peine du sol comme un fétu de paille, pour le précipiter sans pitié dans les eaux du port. Pendant que le gamin pataugeait en pleurnichant, sans oser remonter sur les quais par crainte de nouvelles représailles, Ali mains sur les hanches et pour une fois volontiers goguenard, s’était rapproché du bord des quais, pour poursuivre ses invectives à l’endroit de l’adolescent. A ce moment, il devait se passer quelques chose de terrible, pour un personnage qui avait de réputation une profonde répulsion pour l’eau et sous quelque forme et usage que ce soit : son petit-neveu Hocine Rezzaz surgit soudain dans le dos d’Ali, pour le gratifier d’une vigoureuse poussée qui projeta notre homme à la mer.
Au total cet incident a eu le grand mérite de démontrer à tous les présents, que Pieds de plomb nous avait caché qu’il était un excellent nageur, mais aussi, que notre héros dans sa chute, avait bu bien à contre-cœur et malgré lui, quelques bonnes tasses bien salées, lui qui n’aimait également pas l’eau de mer et qui de surcroît en ce jour de malheur, devait le débarrasser d’une bonne partie de sa crasse protectrice et décaper notablement son éternel complet noir tout défraîchi.
Depuis lors, Ali pieds de plomb devait définitivement bannir l’eau de sa pauvre existence, que ce soit aussi bien - pour se désaltérer - pour sa toilette - pour sa lessive… Et encore moins - pour la pratique de la natation.
Revenons vers nos deux héros, pour évoquer une anecdote qui m’a été révélée par Mabrouk Ouchène (+), alias le pharmacien de M. Jules Luciani lors d’un voyage à La Calle en 1987.
Alors que devant son officine sise Cours Barris, je me livrais à la joie de la conversation avec Mabrouk le pharmacien résidant, je ne sais plus comment et pourquoi, notre jovial conciliabule dévia vers deux sommités de La Calle de France d’autrefois : Ali pieds de plomb et Messaoud.
Je devais alors apprendre par Mabrouk, qu’il s’était jadis passé au cours d’une Saint-Cyprien Calloise, une amusante plaisanterie à l’endroit des visiteurs - nos voisins les Bônois, pour ne pas les nommer ! Comme l’on s’en souvient la fête du saint-patron de notre cité, se déroulait avec faste et bonheur tous les ans en septembre et en cette occasion durant trois jours, le Cours Barris et les terres-pleins de l’église étaient encombrés : de baraques foraines - de manèges, de marchands de nougat - d’oublies - de glaces - de pizza - de cacahuètes et loupines… Nos voisins les Bônois abandonnaient alors sans aucun regret leur coquette capitale et les clochers de Saint-Augustin, pour accourir en masse profiter de la fête et jouir pleinement de la douceur de notre beau village.
Je ne sais plus aujourd’hui, lesquels, de ceux qui ont eu l’idée géniale, de monter un parfait canular à l’intention des Bônois, pour rigoler un peu plus abondamment en ces jours de fête ? Toujours est-il que très rapidement, un bruit insolite se répandit comme une traînée de poudre : durant les festivités, mais, pour un soir seulement, la municipalité Calloise avait décidé, d’exposer exceptionnellement à la vue des touristes de passage, deux rarissimes spécimens d’hommes sauvages, capturés récemment pour la circonstance, dans les profondes et inhospitalières forêts Calloises.
C’est dans le plus grand secret et à l’abri des regards indiscrets, qu’une cage soigneusement recouverte par une bâche fut installée prés de l’église, où, semble-t-il, étaient enfermés les deux dangereux hommes sauvages, en attendant l’heure de les montrer au public qui déjà se pressait sur les lieux, marquant ainsi leur impatience de voir en direct, ces créatures fantastiques d’un autre temps.
La nuit était tombée depuis un moment déjà et le Cours Barris scintillait de toutes ses lumières et exhalait une multitude de parfums où dominait brochettes et merguez… Une rumeur confuse faite de rires et de cris, de chants et de musiques variées, d’annonces d’un numéro gagnant venant des baraques foraines… Les touristes Bônois qui par curiosité et en toute innocence, s’étaient rassemblés en nombre près de la cage aux hommes sauvages, réclamaient à la quasi-unanimité avec autorité et à grands cris, le retrait de la bâche qui cachait les mystères de la cage. Il faut dire que pour en rajouter au suspens les responsables municipaux, se faisaient un malin plaisir de faire traîner les choses, pour émoustiller semble-t-il un peu plus la curiosité de l’assistance et rendre manifestement le canular encore plus authentique.
Après un long moment et lorsque la bâche fut enfin retirée, un grand cri de surprise aux accents Bônois devait inaugurer le décor contenu dans la cage : deux hommes hirsutes en guenilles à l’air farouche, menaçant, grimaçant et grognant de plus belle… Jetèrent le trouble parmi ceux venant de la capitale : jamais dans la grande ville de Bône, on avait vu pareil type d’hommes préhistoriques ! Pendant que du côté des Bônois, chacun disait la sienne en parfait connaisseur, de l’autre côté de la cage une bande de Callaïouns hilares, tentaient d’étouffer les fous rires qui ne les quittaient plus, devant l’incroyable crédulité de ces gens venus de la grande ville.
Dans la sombre et sinistre cage, les deux hommes sauvages jouaient leurs rôles avec une remarquable perfection, en se jetant sur les barreaux pour tenter de saisir au passage quelque spectateur imprudent. Alors pour calmer les ardeurs sanguinaires des deux fauves, un grand et volumineux panier d’osier rempli de grosses tomates bien mûres fut apporté et moyennant finance on invita sans façon la foule, à bombarder les deux sauvages avec ces projectiles improvisés. Mais loin de calmer leur fureur, les deux hommes bavant de rage et dégoulinant de jus de tomate, devaient continuer inlassablement de bondir et de mener une furieuse sarabande dans leur cage.
Je ne sais plus combien de temps dura la plaisanterie, puisqu’on devait assister à un incident qui mit fin à la supercherie : soudain à la surprise des spectateurs et dans un sinistre grincement, une petite porte qui se trouvait à l’arrière de la cage, s’ouvrit toute grande comme par enchantement. Après un moment d’hésitation, les deux hommes sauvages se précipitèrent au dehors pour s’enfuir vivement dans la nuit, laissant là les touristes médusés qui manifestement n’avaient encore rien compris, de la farce concoctée malicieusement à leur endroit par les cousins Callois.
Qui étaient-ils ? ces deux hommes sauvages vedettes d’un soir d’été et stars d’une célèbre fête de Saint-Cyprien d’autrefois ? Je vous le donne en mille ! Mais je pense que tout bon Callois, qui se souvient peut-être de cette histoire, à parfaitement compris qu’il s’agissait d’Ali pieds de plomb et Messaoud, qui ce soir-là avaient joué à la perfection et en toute connaissance de cause, le rôle pour lequel ils avaient été secrètement engagés, moyennant comme il se doit un solide cachet tiré de la vente des tomates, ce qui devait leur permettre comme de bien entendu, d’écluser plusieurs jours durant sans laisser d’ardoise et en payant cash, les énormes barriques de vin rouge de la cantine chez Mme Miniquebrique.
Ali pieds de plomb et Messaoud ! Dounani et Tchitchote ! Jean babasse, Djigoulette alias, pas de confiance et Forteresse !… Et combien d’autres rois et personnalités, qui ont illuminé les cieux de notre enfance Calloise. Soyez ici affectueusement remerciés, d’avoir honoré par votre présence l’histoire du Bastion de France et laissé en chacun de nous, cette nostalgie infinie des jours heureux d’autrefois.
Dans la vie de tous les jours et souvent dure de notre cité, vous avez toujours joué vos rôles avec beaucoup de sincérité, sans aucune fioriture, ni tricherie. Vous êtes restés ce que la destinée et la vie avaient choisi pour vous, sans jamais tempêter contre votre malheureuse existence, ni en aucun cas vous plaindre au bon Dieu lui-même.
Mais voyez-vous, n’allez pas me dire de vous oublier et de vous laisser enfin reposer en paix, puisque, depuis longtemps vous dormez sous la terre ! Vous dormez peut-être et pour l’éternité, mais sachez que pour nous, vous n’êtes pas morts ! puisque, depuis toujours et aujourd’hui encore on parle de vous.
Docteur Jean-Claude PUGLISI,
de La Calle de France -
Paroisse de Saint Cyprien de Carthage
( Giens en presqu’île - janvier 2005 )
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Algérie catholique N°12, 1937
Bibliothèque Gallica
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La gracieuse légende de N.-D. de Liesse
En l'an 1134, trois chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem, venus en Terre Sainte du pays Laonnais, avaient été pris par les Sarrasins sous les murs de Bersabée.
Conduits au Caire et enfermés sur l'ordre du soudan El Afdhal dans un noir cachot, ils subirent l'épreuve d'une dure captivité, dont la fin leur fut promise en échange de leur apostasie. Comme ils demeuraient insensibles aux menaces, le soudan leur envoya sa fille, la belle Ismérie, avec la mission de les séduire. Pour se garder de ses charmes, les chevaliers invoquaient Marie. La princesse voulut savoir qui était la reine mystérieuse dont ils parlaient en chantant ses louanges, et, leur apportant elle-même un morceau de bois brut avec des ciseaux de sculpteur, elle les pria de faire une image de leur protectrice, s'engageant, si elle la voyait, à lui donner son cœur et sa foi. Ils promirent de la satisfaire. Aucun d'eux ne savait sculpter, mais pleins de confiance ils implorèrent le secours de la Vierge.
Comme ils s'étaient endormis en priant, «vers le milieu de la nuit, dit la légende pieuse, la glorieuse Vierge Marie introduisit auprès d'eux, par l'intermédiaire des anges, son image rayonnante de piété et sculptée par miracle.»
Les chevaliers, à leur réveil, tombèrent en extase devant le céleste chef-d'œuvre, et lorsque, au matin, Ismérie revint à la prison, elle les trouva dans le cachot éblouissant de lumière, agenouillés et ravis. Emerveillée, hors d'elle-même, la princesse s'écria :
« Je crois, je suis chrétienne ! »
Et, dit un vieux chroniqueur, prosternés avec elle au pied de la miraculeuse image,
Les chevaliers, alors, dépouillés de tristesse.
L'honorèrent du beau nom de reine de Liesse
A raison de la joie épandue en leurs cœurs.
Ismérie emporta la statue. Mais une voix parlait à son âme :
« Tu délivreras les trois chevaliers que j'aime ; par toi mon nom deviendra célèbre, et la terre des Francs sera enrichie d'un trésor sans prix.»
Elle retourne à la prison, se couvre de l'autorité du Soudan, fait sortir les prisonniers, les conduit au bord du Nil, où tous les quatre se jettent dans une barque « amenée par les anges » et descendent vers Alexandrie.
La fatigue les presse : ils s'arrêtent pour se reposer quelques heures et s'endorment sur le rivage. A leur réveil, ils voient autour d'eux un pays nouveau ; les anges les ont transportés endormis bien loin de la terre d'Egypte. Ismérie s'étonne ; les chevaliers surpris interrogent un berger : ils sont tout proches du manoir de Marchais, où leur propre mère enferme, depuis leur départ, sa douleur et sa solitude.
Aussitôt ils se mettent en chemin, Ismérie tenant entre ses bras la chère statue. Mais, comme ils traversaient un jardin, celle-ci devint si pesante que la princesse dut la poser à terre.
« La Vierge veut rester ici, dirent ses compagnons : nous y bâtirons pour elle une église.»
Dès qu'ils eurent ainsi prononcé leur vœu, la statue se laissa porter sans peine jusqu'au château, « où, dit la chronique, les voyageurs furent accueillis de leurs proches et amis avec des indices de joie et de bienveillance particulière, au grand contentement de leurs sujets et vassaux. »
Une chapelle s'éleva bientôt au lieu marqué par la Vierge. Ce fut le premier sanctuaire de Notre-Dame de Liesse, remplacé au XVIe siècle par l'église encore debout, où la pieuse tradition se conserve inaltérée depuis huit cents ans. Des miracles répétés rendirent promptement célèbre la statue miraculeuse. Les pèlerinages s'y succédèrent, toujours plus fréquents et plus nombreux.
Les rois de France en donnèrent l'exemple ; Louis XIII et Anne d'Autriche, après de longues années d'une union stérile, vinrent y demander à Dieu, par l'intercession de celle à qui venait d'être consacré «le plus beau royaume du monde après celui du ciel », l'enfant qui devait être Louis XIV.
Cte Albert DE MUN.
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UN SCANDALE D'ARGENT A LA MAIRIE DE BONE
Bonjour N° 152, 2 décembre 1934 journal satyrique bônois.
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Les expertises municipales
et la gare d'Autobus
Encore 600.000 francs ?
Tout ce qui suit, est signalé à l'attention de M. le préfet de Constantine
On sait qu'une enquête de commodo et incommodo a été ouverte sur la construction d'une gare d'autobus, à Bône, en un emplacement qui a été choisi par M. Pantaloni, Maire de la ville.
Que personne ne s'y trompe. Il ne s'agissait point de discuter s'il y avait urgence et nécessité de la création de cette gare ; sur ces deux points tout le monde est d'accord. L'enquête portait seulement sur l'emplacement choisi que d'aucuns jugent parfaitement détestable.
Comme c'est mon droit de citoyen, je suis allé porter mon "dire " à la Mairie et je l'ai inscrit moi-même.
Dans cet article qui sera long et je m'en excuse, je placerai, ici, ma protestation personnelle en manière de préface au scandale qui vient d'être rendu public par la dernière séance du Conseil Municipal.
PROTESTATION
J'ai écrit ceci :
"Quand on examine le projet de création d'une gare d'autobus tel qu'il a été défini dans le projet municipal en date du 4 Juillet 1984, on ne peut que penser qu'il a dû falloir de bien irrésistibles arguments pour adopter l'emplacement soumis à l'enquête "..
(Lorsque M. le Maire a lu cela, il a du faire une drôle de tête).
"Il n'échappe à personne, en effet, que l'emplacement très éloigné du centre de la ville est très incommode pour les voyageurs qui aiment, généralement, à embarquer ou débarquer à proximité des grands hôtels, et pour les commerçants qui auront beaucoup de chemin àfaire et de temps à dépenser pour livrer leurs marchandises".
L'emplacement choisi, disons-le pour ceux qui ne le savent pas, est occupé actuellement, par les anciens Etablissements Perrin et Dubois, Descours et Cabaud successeurs, sur la route de Guelma ou, comme l'on voudra, rue Prosper Dubourg très prolongée).
"D'autre part, les bâtiments proposés n'ont pas été prévus, lors de leur construction, pour recevoir la surélévation, indispensable pour l'agrandissement des locaux actuellement insuffisants pour loger la consigne des bagages, le magasin aux marchandises et les bureaux dévolus à chaque société. "
"Une construction neuve, sur un emplacement choisi donnerait du travail aux chômeurs et serait mieux appropriée aux exigences du public".
"D'autre part encore, une construction neuve permettrait, tout de même, àla ville de bénéficier des conditions financières accordées par le Gouverneur ou les grandes sociétés financières, conditions très avantageuses ".
"Enfin, le point de vue des entrepreneurs de transport automobiles, qui auront à supporter, du fait de la création de la gare d'autobus en cet endroit, des frais généraux très alourdis et des usagers qui, auront à souffrir une sensible élévation de tarif, est aussi à considérer de très près".
C'est pourquoi je m'élève et je proteste contre la création de la gare d'autobus sur l'emplacement et dans les conditions actuellement prévues ".
Ajoutons que lorsque le Maire lut cette protestation en séance plénière du Conseil Municipal, pas un pantaloniste n'éleva la voix et que M.Panlaloni, lui-même, demeura muet comme une carpe.
Complétons nos renseignements en disant que les entrepreneurs de transports de Bône et de sa région, tous sans exception, ont joint leur protestation à la mienne.
LE SCANDALE
Après cette protestation d'ordre moral, passons aux chiffres.
Nous savions bien ce qu'il allait advenir. Il n'y a pas que des moutons parqués dans cette ville. A la dernière séance du Conseil Municipal tous les journaux en ont parlé M. Charles Missud, se faisant l'interprète de ceux qui voient clair, a ému l'opinion par les critiques remarquables de justesse et de netteté qu'il a adressées publiquement au projet du Maire.
Nous nous servirons des remarques de M. Charles Missud et nous y ajouterons nos renseignements personnels, pour édifier le public bônois de ce qui se trame à l'Hôtel de Ville. M. Pantaloni, Maire de Bône une fois de plus, l'occasion de manier l'argent des contribuables, a opéré à sa manière que nous avons dénoncée tant de fois sans qu'il ait osé, jamais élever la voix contre nos accusations.
L'EXPERTISE MUNICIPALE SUJETTE A CAUTION
La superficie couverte par les Etablissements Descours et Cabaud est de 2.620 mètres carrés et M.Pantaloni déclare que l'évaluation du terrain, bâtiment compris, s'élève à la somme de 1.800.000 francs.
Nous allons établir que ce chiffre global est fortement exagéré.
Si on se réfère aux travaux d'entreprise de ces bâtiments, élevés en 1927 et occupés en 1928, le chiffre en est exactement de 800.000 francs. M.Marcel Dayre en a été le constructeur et il a reconnu, en séance publique, que ce chiffre est exact.
Nous voulons admettre que les aménagements intérieurs ceux qu'on aurait pu éviter avec une construction neuve peuvent s'élever à 200.000 francs. Mais ce qui est inadmissible, c'est que le terrain soit compté au prix inattendu de 350 francs le mètre carré. Nous avons le droit de dire, en termes très mesurés, que les experts municipaux se sont lourdement trompés et que leur erreur va coûter cher à la ville.
LA DIFFERENCE DES PRIX
La Séquanaise intervient dans cette affaire. M. Charles Missud, d'ailleurs, avec un courage auquel il est impossible de ne pas rendre hommage, a fait remarquer, en séance publique, qu'il insistait sur ce nom.
En 1927, ces terrains ont été achetés à La Séquanaise. A cette époque, les transactions de ce genre el en cet endroit, se traitaient à des prix que nous estimerons à 100 francs le mètre, allons jusqu'à 150 francs.
Nous pourrions citer des marchés qui se sont traités sur cette base ? Contentons-nous de la précision qui a été donnée, publiquement, par M. Charles Missud qui a déclaré avoir acheté, lui-même,à cette époque, du terrain à 100 francs le mètre.
Si pour faire plaisir aux discutailleurs, de bonne ou de mauvaise foi, nous admettons qu'on ait pu payer ce terrain 150 francs le mètre, nous obtenons environ 400.000 francs, exactement 393.000 francs. :
OU VA CETTE DIFFERENCE ?
Certes, le journaliste qui écrit ces lignes n'a rien du commerçant. Il a, cependant, quelques notions de la comptabilité commerciale. Les Etablissements Descours et Cabaud sont une maison de commerce sérieuse et dont la réputation n'a aucune tâche. Ceux qui la dirigent, s'ils sont des hommes d'affaires n'en observent pas moins les devoirs du code commercial. Ils ont dû prévoir, tout naturellement, dans leur Grand-Livre, au chapitre amortissement qui a dû jouer chaque année, une somme dont le minimum est de 50.000 francs.
De 1928, date de l'occupation, à 1934, nous avons six années, soit un amortissement de 300.000 francs tout à fait normal.
Il en est des maisons de commerce comme des voitures automobiles, la revente est dépendante de l'amortissement. En d'autres termes, si nous déduisons, de la façon la plus logique et la plus effective, l'amortissement de 300.000 francs, nous avons le droit de dire que l'acquisition devrait se réduire, exactement à 1.093.000 francs.
Cependant, afin de donner plus de force à notre discussion, reconnaissons un chiffre dont personne n'a parlé, pas même M. Charles Missud. La viabilité coûtera environ 100 mille francs. Nous acceptons. Donc, entre 1.193.000 francs acceptables et les 1.800.000 francs demandés par le Maire et votés par sa majorité, nous trouvons une différence de 600.000 francs, en chiffres ronds.
Cette somme de 600.000 francs est, décidément, pour M. Pantaloni, un chiffre fatidique., une sorte de critérium. On en a parlé maintes fois déjà, n'est-ce pas ?
Et nous demandons, comme c'est notre droit de citoyen et de contribuable, notre devoir de journaliste, dans quelles poches vont disparaître ces 600.000 francs après qu'ils seront sortis du porte-monnaie des Bônois ?
C'EST UNE BONNE AFFAIRE !.
Il y a là un écart excessif qui provient de ce que les services municipaux ont enflé exagérément le prix du mètre carré. Ils veulent que la ville paie 917.000 francs un terrain que nous estimons très largement,- à 393.000 francs. Et une autre question se pose qui ne nous effraie pas du tout : les experts de M. Pantaloni sont-ils des incapables ou avaient-ils reçu des ordres ?
Contentons-nous pour le moment de faire ressortir que l'affaire est bonne, elle est, même, excellente pour tout le monde sauf pour la Ville de Bône.
Et c'est pour cette raison principale que nous protestons.
En effet, pendant 30 ans, la ville va régler des annuités de 1.57.986 francs l'an un taux de 6,86 pour cent qui est de rigueur mathématique et si les Bônois veulent prendre un morceau de papier et un crayon, ils constateront qu'ils vont payer, en 30 ans, la bagatelle de QUATRE MILLIONS SEPT CENT TRENTE NEUF MILLE CINQ CENT QUATRE-VINGT francs (4.739.580 francs) ce qui aurait pu leur couler 1 million 200.000 francs environ.. C'est excessif !.
LES BENEFICIAIRES
Quels sont les bénéficiaires de celle extravagance ? Ils sont d'ordre divers.
D'abord, les vendeurs. Les Etablissements Descours et Cabaud sont une société sérieuse qui entend faire une bonne affaire; c'est son droit. Elle trouve une occasion superbe de se débarrasser, au prix fort, d'un immeuble qui n'était pas du tout adapté à son commerce. Et si nos renseignements sont exacts et nous avons toutes raisons de supposer qu'ils le sont cette société, contrairement à ce que l'on a laissé entendre, loin de liquider sa succursale à Bône, se prépare, il va construire, avec le produit qu'elle va tirer de sa vente, un magnifique immeuble à 6 étages non loin de là. Nous le répétons, c'est son droit.
- Les voisins : La Séquanaise, autre société sérieuse et puissamment riche, va pouvoir valoriser ses terrains. C'est son droit mais c'est une aubaine inattendue.
Le Bônois moyen dira qu'il préférerait que ces bénéfices fussent réalisés en dehors de ses débours, c'est son droit. C'est, en l'occurrence, le seul droit qui nous intéresse.
Enfin, il y a un troisième bénéficiaire. Oui ! C'est le courtier ! Quel courtier ? Bah ! En cherchant bien, on finira par le trouver.
QUELQUES ARGUMENTS
QUE NOUS ALLONS REDUIRE A DES BONIMENTS
On a pu dire un ami du Maire dont la casuistique est assez distinguée " qu'en droit " l'évaluation d'un terrain, ne peut être basée sur le prix original de la vente mais sur le prix actuel. Accordé ! Mais encore faudrait-il qu'il y ait unanimité, ou au moins majorité, sur le prix actuel. Nous sommes loin de compte.
En fait, et dans le cas qui nous occupe, cet argument n'est que littérature ou plaidoirie. En effet, l'évaluation d'un terrain quel qu'il soit, et où qu'il soit, ne peut s'estimer d'une façon sincère qu'en raison de la loi éternelle de l'offre et de la demande. Et ce n'est un secret pour personne dans notre ville que pour les terrains dont il s'agit les demandes sont nulles, parfaitement nulles ou à peu près.
Et, pour revenir à l'expertise municipale, nous mettons au défi qui que ce soit de soutenir avec preuve, ou apparence de véracité, que les terrains en question obtiendraient, à l'heure présente, une tractation si minime qu'elle soit au prix de 350 francs le mètre carré. Nous attendons, sans humeur, qu'un imprudent relève ce défi.
On viendra nous raconter, autre littérature et autre plaidoirie, qu'une transaction s'est faite, il n'y a pas très longtemps, entre La Séquanaise et la Commune de Bône, au prix de 350 francs le mètre.
Cette affirmation est une imprudence. Nous pourrions dire, tout d'abord, que du seul fait qu'elle a eu lieu avec la Commune, elle est frappée d'infirmité ou de suspicion. Nous nous contenterons de faire remarquer que ce chiffre de 350 francs, ainsi répété, donne plus de force à la question posée plus haut : les experts de M. Pantaloni ont-ils reçu des ordres, leur a-t-on donné une base sur laquelle ils se sont hypnotisés !
D'autant plus que cette transaction, que nous connaissons parfaitement, et le Maire de la Ville la connaît encore mieux que nous, s'il était sincère, il pourrait donner à ses administrés quelques renseignements complémentaires, cette transaction, disons-nous, n'a rien de commun avec une vente, il s'agissait d'un échange de terrains, ce fut une transaction dite de compensation. Nous .prions les thuriféraires de la Municipalité de vouloir bien ne pas insister.
LES CONCLUSIONS QUI S'IMPOSENT
Nous n'en ferons pas. Elles auraient, au dire de nos adversaires, une forte odeur partisane, nous n'avons cure de telle opinion. Mais le public désira.
Les Bônois, qui ne sont pas aussi sots que leur Maire le souhaite, se posent des questions et nous en posent. En voici quelques-unes :
Dans cette affaire, le Maire a-t-il pensé aux préférence : légitimes des voyageurs pour rembarquement et le débarquement ? Non !
A-t-il pensé que les commerçants bônois perdraient beaucoup de temps le temps c'est de l'argent pour l'exportation et l'importation de leurs marchandises ? Non !
A-t-il pensé aux dépenses supplémentaires exigées par l'aménagement des locaux choisis par lui et qui sont incapables en leur état actuel de rendre les services demandés ? Non !
A-t-il songé aux chômeurs, à tous nos ouvriers, à nos pères de famille sans travail allons ! les socialistes et les communistes, vous avez la parole ! qui auraient pu trouver des travaux importants dans l'édification d'un bâtiment neuf Non !, Sait-il que l'édification d'un bâtiment neuf lui permettait, selon les usages et les précédents, de demander pour nos finances communales des dégrèvements importants au Gouvernement Général et aux grandes Sociétés financières ? Oui, il le sait fort bien ! A-t-il songé à donnerà ses administrés ce bénéfice ? Non !
A-t-il pensé que les entrepreneurs d'autobus, du fait de la création de cette gare en cet endroit, seront dans l'obligation d'élever leurs tarifs et que ces tarifs augmentés seront supportés parles usagers ? Non !
Enfin, le Maire a-t-il discuté avec âpreté, comme il aurait dû le faire, les intérêts de la Commune ? Certainement non !
Est-il possible que l'on puisse faire bénéficier des sociétés quelles qu'elles soient, de pareils avantages sans en obtenir une contre-partie ? Il faut demander cela aux habitués de ce genre de courtage.
Est-il vrai que, dans les Sociétés d'Assurances c'est un exemple entre cent la première annuité versée par le client soit la rémunération du courtier ? L'annuité, pour la gare des autobus, sera de 157.986 francs. C'est gentil !
Oui, mais y a-t-il un courtier ? Quel est-il ? Ne nous cassons pas la tête. Il y a des axiomes en politique municipale et en matière de finances comme en mathématiques. La preuve se fait sans démonstration.
Le Maire, fort troublé à la suite des incidents de la dernière séance du Conseil Municipal, a murmuré à un collègue "Mes services m'auraient-ils trompé ? "
Candeur naïve ! Il passa une main sur un front soucieux, puis la mit dans sa poche. Habitude !
Une contre-expertise a été demandée. Elle aura lieu.
Une protestation sera adressée à M. le Préfet de Constantine, tuteur légal et officiel de M. le Maire. Elle sera prise en considération.
Le vote du Conseil Municipal sera annulé, nous l'espérons dans l'intérêt de la ville, et lors d'un second scrutin, nous comptons formellement ne plus retrouver les mêmes complaisances.
Pierre MARODON
N.D.L.R. Au dernier moment, nous apprenons que le Maire s'oppose à la contre-expertise. Parbleu !
Mais elle peut être ordonnée par d'autres que par lui.
On verra.
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Les catholiques et la paix
Effort Algérien N°52, du 28 avril 1928
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Chez les catholiques les plus authentiques et parfois les plus notables, on doit trop souvent déplorer l'absence du sens catholique dans leur façon d'envisager le problème de la paix. Le mot même de paix semble susciter leur appréhension.
Non, qu'ils désirent ou ne haïssent pas la guerre, mais une conception erronée du patriotisme leur fait craindre que l’on n'affaiblisse le pays en lui faisant de la paix un éloge auquel il est sensible et qui diminue, croient-ils, sa force de résistance. Ainsi s'explique qu’exception faite de quelques nobles efforts, l'action pour l'organisation de la paix et le mot de paix lui-même soient l'apanage, trop peu disputé, des non-catholiques. Et cependant le mot et la chose appartiennent depuis toujours au patrimoine de l'Eglise.
Il est à craindre que, sous couleur de ne pas tomber dans un pacifisme suspect, certains ne soient tombés dans l'excès inverse d'un nationalisme où il n'y a plus de place pour l'esprit de fraternité chrétienne. Ainsi la foule a-t-elle parfois le scandale de voir des catholiques abandonner à leurs adversaires ou même combattre ouvertement des idées qu'ils devaient être les premiers à défendre.
Qu'il s'agisse de la Société des Nations, du désarmement, du rapprochement entre les peuples, l'attitude qu'on voit trop souvent adopter est aux antipodes de ce qu'on devrait attendre. Elle se couvre de motifs honorables inquiétudes d'un patriotisme vigilant, hostilité pour les infiltrations protestantes ou maçonniques qu'on dénonce à Genève. Mais à examiner de près les critiques que nombre de catholiques adressent à la Société des Nations ou aux hommes d'Etat qui travaillent à la pacification de l'Europe, on s'aperçoit vite que ce qui leur est reproché c'est moins le détail de leur activité.
- qu'il est en effet tout à fait légitime de discuter
- que le principe même d'une organisation internationale au service de la justice, que l'esprit même du rapprochement entre les peuples. Or, ce principe et cet esprit sont de chez nous: les catholiques ne peuvent les attaquer sans se renier eux-mêmes.
Peu de confusions sont moins justifiées, mais peu de confusions aussi sont plus néfastes à la religion que celle qui, parce qu'elle prêche le patriotisme, voudrait l'inféoder à un nationalisme qu'en réalité elle condamne.
Georges BIDAULT
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SE TROMPER D'ADRESSE E-MAIL...
Envoyé par Eliane
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Un couple de parisiens décide de partir en week-end à la plage et de descendre au même hôtel qu'il y a 20 ans, lors de leur lune de miel.
Mais, au dernier moment, à cause d'un problème au travail, la femme ne peut pas prendre son jeudi.
Il est donc décidé que le mari prendrait l'avion le jeudi, et sa femme le lendemain.
L'homme arrive comme prévu et après avoir loué la chambre d'hôtel, il se rend compte que dans la chambre, il y a un ordinateur avec connexion Internet.
Il décide alors d'envoyer un courrier à sa femme.
Mais il se trompe en écrivant l'adresse.
C'est ainsi qu'à Perpignan, une veuve qui vient de rentrer des funérailles de son mari mort d'une crise cardiaque, reçoit l'e-mail.
La veuve consulte sa boîte aux lettres électronique pour voir s'il n'y a pas de messages de la famille ou des amis.
C'est ainsi qu'à la lecture du premier d'entre eux, elle s'évanouit.
Son fils entre dans la chambre et trouve sa mère allongée sur le sol, sans connaissance, au pied de l'ordinateur.
Sur l'écran, on peut lire le message suivant :
À mon épouse bien-aimée,
Je suis bien arrivé.
Tu seras certainement surprise de recevoir de mes nouvelles maintenant et de cette manière.
Ici, c’est le paradis, ils ont des ordinateurs et tu peux envoyer des messages à ceux que tu aimes.
Je viens d'arriver et j'ai vérifié que tout était prêt pour ton arrivée, demain vendredi.
J'ai hâte de te revoir.
J'espère que ton voyage se passera aussi bien que s'est passé le mien.
P.S. : Il n'est pas nécessaire que tu apportes beaucoup de vêtements : il fait une chaleur d'enfer ici
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OCCUPATION DE M’SILA
ACEP-ENSEMBLE N°285
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La première opération effectuée au printemps 1841 fut celle de M'SILA. Elles s'exécuta sans coup férir. Les troupes françaises furent reçues par les habitants en libérateurs, tant ils étaient excédés des nombreuses vexations et des lourdes charges que faisaient peser sur la ville la présence prolongée des partisans de Abd-el-Kader, dans la région.
Tous les chefs de tribus, de celles mêmes qui s'étaient déclarées pour l'émir, s'empressèrent de venir au devant du général Guesvillers, de faire leur soumission en demandant l'aman. Le but, faire quitter définitivement le pays à El-Hadj-Moustafa, était facilement atteint.
Au retour le général passa à Zemora, où nos armes ne s'étaient pas encore montrées. Les habitants s’empressèrent d'envoyer à sa rencontre leurs chefs, auxquels le général fit bon accueil et leur fit comprendre qu'il n'avait aucune intention d'hostilité à leurs égards.
Depuis quelque temps, les tribus kabyles au nord de Sétif donnaient des preuves de leurs mauvaises dispositions, injuriant, dévalisant les indigènes qui apportaient du bois de chauffage sur le marché de Sétif. Une petite colonne composée de 500 hommes du 61éme et de spahis fut dirigée dans cette région afin de châtier les perturbateurs, elle rentra le lendemain après avoir incendié trois villages à la suite d'une petite escarmouche.
Le Sahel
Dans la subdivision de Sétif administrée avec sagesse, les tribus recueillaient le fruit de la paix dont elles jouissaient. Un événement mérite cependant d'être rappelé : c'est l’engagement soutenu par le 61éme de Ligne, vers le milieu du mois de juin, dans une course faite par le général Sillègue, du côté de Sahel Guebeli, afin de hâter le paiement des contributions.
Lorsque les français parurent à Sétif dans les années 1838, Saïd-Ben-Abid, qui commandait le camp, avait fait des offres de soumission. Bien que ces offres ne parussent pas sincères et que l’on espérait ne pas en tirer de grands résultats, elles furent acceptées avec empressement, car il s'agissait avant tout de nous faire bien voir dans le pays et désagréger ainsi la résistance. Quoiqu'il en soit, Amar-ben-Abld conserva sa Position de Khalifa du Sahel, mais ne put empêcher ses administrés de commettre plusieurs actes d'hostilité à notre encontre. Les Ouled Chouk, qui à cause de leurs méfaits avaient été imposés à une amende, refusèrent de la payer. Le général Sillègue sortit donc de Sétif pour les y contraindre. Il s'avança jusqu'à Ma-ou-Aklan. Pendant cette expédition, Amar ne participas un instant à cette opération, malgré les ordres réitérés du Général et, après la rentrée des troupes, afficha franchement sa rébellion. Saïd-ben-Abid, le fils aîné de Lakdar-ben-ouaci, fut rappelé de chez les Ou-Rabah de la vallée de Bougie, où il se trouvait. Il vint à Sétif, et, de là, pendant des années, travailla activement afin de se former un parti dans le Sahel.
Dès qu'il pensa être assez fort, il attaqua Amar, le chassant du pays et prenant le commandement de la tribu.
En quittant le Sahel, le général Sillègue se dirigea sur les Amoucha, qui avaient également refusé de payer l’impôt et leur brûla plusieurs villages.
Ben-Azouz livré par les habitants de M'Sila
La prise de Ben-Azouz, ex Khalila d'Abd-el-Kader dans les Bibans, qui eut lieu à peu près à la même époque, fut un acte bien plus important et fit connaître les dispositions des arabes à notre égard. Ben-Azouz, en défaveur s'était retiré à M'Sila, fut arrêté par les habitants de cette ville, conduit à notre Khalifa Mokrani, qui le livra à l'autorité française.
La subdivision de Sétif présentait donc un état satisfaisant. Les tribus soumises se trouvaient pour la plupart dans des régions faciles d'accès ce qui pour le moment était notre principal objectif.
Notre action se déroulait de façon régulière, sous l’impulsion des deux principaux chefs qui secondaient le commandement, le Khalifa de la Medjana, El-Mokrani et le Caïd Ben-Ouaci, deux auxiliaires précieux. Le premier, intelligent et ambitieux, avait compris que son intérêt l'attachait à notre cause. Les événements de 1840, l'occupation de Bord-Bou-Arréridj par nos troupes, lui avaient rendu la prépondérance que sa soumission prématurée avait certainement ébranlée, sa coopération paraissait franche et efficace. Le second d'un courage et d'un enthousiasme admirables, originaire de Bône, appartenait à une famille de classe moyenne.
Le Caïdat des Eulmas et des Amer lui avait été attribué en récompense de ses brillants services comme soldat.
Intelligent, prompt et vif, doué d'un grand bon sens, il agissait souvent sans réfléchir. Il était d'un dévouement aveugle et avait accepté totalement notre domination. Ben-Ouaci était excellent dans son commandement, mais avait besoin d'être conseillé, homme d'action mais pas de conseil, rigoureux à I'égard de ses administrés sachant parfaitement se faire obéir.
Intrigues Fanatiques.
Telle était la situation dans la région, lorsque plusieurs fanatiques prenant le titre de chérif, furent envoyés par l'émir Abd-el-Kader afin de prêcher la guerre sainte, amplifiant ses succès. Ils se fixèrent dans les monts du Belezma au Sud, dans lesquels Abd-el-Kader avait fait répandre à profusion la proclamation suivante :
Louange au Dieu unique.
Son gouvernement seul est durable.
Ô musulmans ! Sortez donc de l'aveuglement où vous a plongé votre commerce avec les infidèles ! Reconnaissez donc leurs ruses perfides, jugez-en d'après les faits.
Lorsque les Français ont voulu vous engager à vous soumettre à eux, ils vous ont dit ; soumettez-vous, nous vous garantissons votre religion, vos biens, vos femmes et vos enfants. Nous vous laisserons gouvernés par vos chefs habituels. Nous ne troublerons en aucune façon vos coutumes et nous respecterons vos lois. Nous nous occuperons seulement de veiller à ce que vous soyez justement gouvernés et à ce que vous ne soyez pas victimes des exactions qui pesaient sur vous, lorsque vous étiez soumis à votre ancien sultan Abd-el Kader.
Vous avez cru à ces paroles mensongères et vous vous êtes soumis aux chrétiens.
Aussitôt que l'impie s'est cru fort et que pour quelques instants j'ai disparu d'au milieu de vous, il s'est empressé de manquer à ses promesses. Il a appliqué à vos mosquées des usages profanes.
Il a pris vos meilleures terres pour les donner aux siens. Il a payé de ses trésors la vertu de vos femmes, il a enrôlé vos enfants dans ses abominables cohortes, il affranchit les esclaves que Dieu vous permet de posséder il s'est arrogé le droit de vous rendre justice ; il a persécuté vos plus nobles familles ; il a changé vos chefs par d'infâmes musulmans qu'il a acheté. Vos nobles et les marabouts qui avaient été assez insensés pour le servir avec fidélité ont eu une prison éternelle dans le pays des chrétiens. Vous êtes maintenant commandés par des roumis, jugés par des roumis, administres par des roumis. Et pour vous rendre plus visibles ses perfides intentions, voyez-le qui vient compter vos guerriers, vos femmes, vos enfants ainsi qu'un maître compte les moutons qu'il veut vendre au marché !
Malgré la mission que Dieu m'a confiée de combattre l'infidèle jusqu'à la dernière goutte de mon sang, je lui ai laissé quelque repos. Je me suis éloigné du théâtre de la guerre, bien certain que le chrétien se perdrait par ses propres œuvres. Le jour du réveil est arrivé.
Levez-vous à ma voix, Ô musulmans !
Dieu a remis entre mes mains mon épée flamboyante, nous allons avec le sang de I'infidèle fertiliser les plaines de notre Pays.
Moulay-Mohamed, le plus important des agents d'Abd-el-Kader, s'était établi chez les Beni-Iala. Rejoint par Abs-en-Selam, il annonçait que le temps était venu de chasser les Français du territoire musulman et il se donnait aux populations comme chargé d'une mission divine avec des pouvoirs surnaturels.
Ses principaux Khalifa se nommaient : Si-Saâd, surnommé El-Tebbani car originaire des ouled-Teben du Bou-Thaleb et, Sidi-Salah, natif de l'oasis de Sidi-Okba, surnommé Bou-Derbala car il faisait ses prédications dans les tribus avec un petit tambourin, appelé en arabe derbala. Si-Saâd avait fait ses études dans une des mosquées de Constantine, où il était parfaitement connu et était parvenu à s'imposer aux populations qui l'entouraient, à leur faire croire qu'il avait des visions et que la mission divine dont il était chargé se dévoilerait à eux par la manifestation de pouvoirs surnaturels. Tels étaient les personnages qui intriguaient contre nous, c'est par de pareils mensonges que ces énergumènes entraînèrent toutes les populations du Hodna, du Bou-Thaleb jusqu'aux environs de M'Sila.
Dans la partie Kabyle, arriva un autre prétendu Chérif, du nom de Sidi-Moussa, qui s'installa dans la région de d'El-Aghouat, fonda une zaouia à Tagma chez les Beni-Iala. Sa réputation de sainteté lui attira une foule de visiteurs et, en moins d'une année, il s'était acquis une énorme influence sur toute cette partie de la Kabylie. Encouragé par l'exemple de Si-Saâd qui insurgeait le Bou-Thaleb et, d'un autre marabout, dont nous parlerons qui bouleversait le Babor, Si-Moussa à son tour prêcha la guerre sainte contre les Français. Ses prédictions, appuyés de divers miracles obligés par ces sortes de circonstances, soulevèrent rapidement tout le pays environnant et à la tête d'un important contingent recruté dans toute la Kabylie, se mit en route vers Sétif. A peine arrivé chez les Sebtia, la neige malgré les promesses qu'il avait faite aux siens que l'été se prolongerait jusqu'à ce qu'ils fussent entré dans Sétif, commença à tomber en abondance. Le froid calma toutes les ardeurs et les Kabyles rentrèrent chez eux. C'est à cette époque que la colonne du général Levasseur qui était partie calmer les partisans de Si-Saâd, eut tant à souffrir dans le Bou-Thaleb. Cet épisode mérite d'être rapporté en détail.
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BIJOUX KABYLES
Par A. Labbize
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Conte de Noël
Par M. Marc Donato
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Chante-moi une chanson…
Comme le grand Martin Luther King, récemment, j’ai fait un rêve. Le rêve de l’homme qui dort du sommeil du juste, qui aurait pu être banal et même ne pas laisser de trace si les protagonistes n’avaient pas été aussi célèbres. C’est eux qui ont suscité le deuxième rêve, celui de l’ordre du fantasme, cette « représentation imaginaire traduisant des désirs plus ou moins conscients ». Oh, rien de sexuel, privilège du grand âge qui commence à être le mien. Le triste constat sur le monde actuel suscitait l’envie d’un monde apaisé ; c’était là mon fantasme. Je suis sûr que celui-là, il est avec partagé par la plupart d’entre vous. Voilà pour mon rêve, mon désir. Restait le premier rêve, le film qui a meublé mon sommeil. Je me trouvais près d’un grand sapin illuminé, lorsque arrivèrent vers moi des chanteurs qui ont jalonné ma vie et qui, pour certains, continuent de flatter mes oreilles. Ils se sont installés en face de moi et se sont mis à fredonner quelques vers qu’ils avaient commis et à les articuler pour en faire une chanson bien particulière, la chanson de la Paix.
C’est Barbara qui a lancé l’affaire : « Que personne ne s’offense, Mais les contes de notre enfance, "Il était une fois" commence, À Göttingen… ». Et les suivants ont fait le triste constat… Sardou, Michel, s’était avancé avec une mine plus boudeuse que jamais : « Où sont passés les chemins de l’espoir ? Dans quelle nuit au fond de quel brouillard ? » À ce moment, Boris Vian est arrivé pour en rajouter : « Depuis que je suis né, J’ai vu mourir mon père, J'ai vu partir mes frères, Et pleurer mes enfants. Ma mère a tant souffert, Qu'elle est dedans sa tombe, Et se moque des bombes, Et se moque des vers… » Que pouvait-on lui reprocher ? L’ami Georges Brassens buvait du petit lait, « Les dieux ont toujours soif, n'en ont jamais assez, Et c'est la mort, la mort toujours recommencée … », dénonçant ceux qui envoient les autres au casse-pipe : « Les Saint-Jean bouche d'or qui prêchent le martyre, Le plus souvent, d'ailleurs, s'attardent ici-bas ». Miossec, pas un vieux celui-là, en rajouta : « Comment te dire, tu ne t'imagines pas, Ce qu'on pratique comme horreurs, Pour gagner une forêt, un lac, un bois, Veux-tu que je te fredonne le bruit des canons qui tonnent, Veux-tu que je te chantonne tout cet amour qu'on dégomme... » Triste réalité que confirmait Diane Dufresne, venue de son froid Canada par je ne sais quelle magie : « On tue sans réserve, Par amour pour sa patrie… ». C’est encore l’oncle Georges, si placide d’habitude qui lança un cri : « De grâce, morbleu ! Laissez vivre les autres ! La vie est à peu près leur seul luxe ici-bas ».
Très au fait de l’actualité, Sardou s’adressa à celui qui pourrait peut-être calmer les ardeurs guerrières de certains : « Toi Vladimir Ilitch, si tu es le prophète, Viens nous parler encore en plein cœur de Moscou, Et répands la nouvelle à travers la planète, Amis du genre humain, ils sont devenus fous… ». Dans les derniers arrivés, il ne me fut pas difficile d’identifier l’imposant Demis Roussos, toujours très calme, proposant, de sa voix si particulière, d’utiliser les mots contre les armes : « On écrit sur les murs la force de nos rêves, Nos espoirs en forme de graffitis, On écrit sur les murs pour que l’amour se lève, Des mots seulement gravés, Pour ne pas oublier, pour tout changer… » Blouson de cuir et coiffure en pétard, Renaud s’insurgea : « J'veux qu'mes chansons soient des caresses, Ou bien des poings dans la gueule… » Voilà qui ne laissait aucun doute sur la volonté de changer le monde, d’une façon comme d’une autre. C’est alors que le visage d’Enrico Macias apparut dans la lumière pour lui répondre : « La sagesse et la richesse, N'ont qu'une adresse, le paradis. Enfants de tous pays, Tendez vos mains meurtries, Semez l’amour, Et puis donnez la vie… » - Tu as bien raison, rajouta Barbara « Les enfants ce sont les mêmes, À Paris ou à Göttingen, Ô faites que jamais ne revienne, Le temps du sang et de la haine, Car il y a des gens que j’aime, À Göttingen, à Göttingen. »
Certes, reprit le Constantinois : « La vérité c'est d'aimer sans frontières, Et de donner chaque jour un peu plus… » Raymond Lévêque, un autre Canadien, m’avait fait l’honneur de venir animer mon rêve et, guitare en main, il chantait avec tout son cœur : « Quand les hommes vivront d’amour, Ce sera la paix sur la Terre, Les soldats seront troubadours… ». Et voilà que mon fantasme de paix prenait forme avec Adamo, le gentil Adamo : « Sur une épine de barbelés, Le papillon guette la rose. » Comment faire mieux en si peu de mots pour dire l’horreur de la guerre et le désir de paix ? La Paix ! Fallait-il encore y penser ? - Oui, me dit Moustaki, sans se presser comme à son habitude : « Par la colombe et l'olivier, Par la détresse du prisonnier, Par l'enfant qui n'y est pour rien, Peut-être viendra-t-elle demain. Avec les mots de tous les jours, Avec la peur, avec la faim, Avec les gestes de l'amour, Peut-être viendra-t-elle demain, la Paix… » Amour, le mot était lâché, repris par Diane : « L’amour c’est la gloire, La puissance et l’amitié, Aimons sans contrainte, Aimons-nous comme il se doit, Resserrons l’étreinte, Qui nous étouffera de joie… » Le grand Jacques dont la tête dépassait de tous les autres acquiesça : « Quand on n'a que l’amour, Pour parler aux canons, Et rien qu'une chanson, Pour convaincre un tambour, Alors sans avoir rien, Que la force d’aimer, Nous aurons dans nos mains, Amis le monde entier ». La petite Mimi, Mireille, celle d’Avignon, peuchère, elle était là. Quel plaisir de l’entendre chanter : « Que la paix soit sur le monde, Pour les cent mille ans qui viennent, Donnez-nous mille colombes, À tous les soleils levants, Donnez-nous mille colombes, Et des millions d'hirondelles, Faites un jour que tous les Hommes, Redeviennent des enfants… » Il était là mon fantasme, tout entier, pas la Mimi, mais bien la colombe de la Paix.
On pouvait rêver !!! C’était Noël…
Je croyais les avoir tous entendus quand j’ai vu arriver un grand barbu, pas très épais, reconnaissable à ses fines lunettes. C’était John, John Lennon en personne, applaudi par toute la troupe présente.
- All is possible, leur dit-il. Imagine. Imagine qu'il n'y a aucun paradis, Aucun enfer en-dessous de nous, Au-dessus de nous, seulement le ciel, Imagine qu'il n'y ait pas de pays, Rien à tuer ou pour lequel mourir, Pas de religion non plus, Imagine tous les gens, Vivant leur vie en paix..., Tu peux dire que je suis un rêveur, Mais je ne suis pas le seul, J'espère qu'un jour tu nous rejoindras, Et que le monde vivra uni.
Mon rêve se termina comme il avait commencé, sans que je sache comment. Mais l’inconscient de mon fantasme de paix avait fait le reste. Et c’est Adamo qui mit le point final à cette virtuelle, mais combien belle chanson de la Paix :
- Inch Allah… Inch Allah…. Inch Allah… Inch Allah…
Je crois au Père Noël, alors, le lendemain, j’ai glissé mes babouches devant la cheminée. Sait-on jamais ?
Décembre 2024 - Marc DONATO
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Lamtar un village agricole
Pieds-Noirs d'Hier et d'Aujourd'hui – N°192 - Janvier 2011
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Le décret du 19 septembre 1848, accorde un crédit de 50 millions de francs pour être spécialement appliqué à l'établissement de colonies agricoles dans les provinces d'Algérie et aux travaux d'utilité publique destinés à en assurer la prospérité ».
C'est dans ce cadre que vont naître nos villages d'Algérie et que le sous-préfet de Sidi-Bel-Abbès est amené à envisager la création d'un centre de colonisation qui serait implanté entre Sidi-Bel-Abbès et Tlemcen.
La commission des centres de colonisation de Sidi-Bel-Abbès se réunit le 29 avril 1874 sur I'invitation de M. de Lagarde son président pour étudier le projet de création du centre au lieu dit LAMTAR (en arabe : El M'tar, la pluie, I'averse)
Le centre sera installé à 20 km de Sidi-Bel-Abbès et pourra éventuellement recevoir du secours dans un délai très rapproché. Il se trouvera à peu de distance de Boukanéfis, Sidi Khaled (futur Palissy) et Sidi Ali Ben Youb.
Le village sera construit sur un terrain sec, au milieu d'un plateau parfaitement aéré à une altitude de 576 mètres. Les colons déjà installés sur place depuis plusieurs années ont que rarement été frappés par les fièvres et autres maladies communes. Cela s'explique par I'absence de marais. Les Arabes reconnaissent que le climat est salubre.
La seule voie existante entre Sidi-Bel-Abbès et Tlemcen est praticable en toutes saisons. Le territoire est traversé par de nombreux chemins arabes en partie carrossables qui permettront aux colons I'accès et I'exploitation de leurs terres.
Il n'existe aucune source jaillissante dans le périmètre du nouveau centre. L'eau se trouve en grande quantité à une profondeur moyenne de 10 mètres. Il sera nécessaire de creuser un puits au milieu du village et dans le ravin (oued Lamtar) pour l'arrosage des jardins avec un abreuvoir à bestiaux ainsi qu'un lavoir.
Le 3 décembre 1875, un arrêté du gouvernement général expropriait les Doui-Aïssa contre la somme de 31.000 francs et créait le centre de Lamtar. Le service des Ponts et Chaussées commença les travaux immédiatement après I'expropriation. La noria et les édifices publics civils furent construits en priorité.
Le groupe scolaire achevé, on entreprit la construction de l'église. Deux piliers en briques montaient parallèlement jusqu'au toit et soutenaient un clocheton d'environ deux mètres de hauteur, surmonté d'une croix et supportant une petite cloche de 22kg.
La paroisse
L'église, terminée en 1879, ne fut érigée en paroisse que le 21 mai 1880, sous le vocable Assomption et SS. Pierre et Paul. Le culte catholique y fut exercé du mois de mars jusqu'en janvier 1881 par I'abbé Bonnefolls, missionnaire diocésain, comme en font foi les actes de catholicité. Toutefois le culte ne fut officiellement inauguré qu'en juillet 1881 par la prise de possession du poste par I'abbé Guillermin. Les ressources de la fabrique étant presque nulles, c'est avec la modeste subvention de 200 francs de la commune et quelques aumônes que l'abbé Guillermin parvint à orner son église. Quelques années plus tard, installé dans un presbytère fraîchement terminé et mal exposé, il contracta une maladie qui le força à rentrer en France où il décéda le 3 avril 1885. L'abbé Delabre lui succéda et s'employa en plus de son ministère à rectifier beaucoup de travaux qui avaient été faits à la hâte, aussi bien à l'église qu'au presbytère. L'abbé Delabre laissa Lamtar au mois de mars 1890 et fut remplacé par l'abbé Chochillon.
Règlements de comptes à Lamtar.
En 1898 eut lieu le dernier agrandissement du village et les travaux d'irrigation des jardins par un barrage en ciment situé à deux kilomètres sur I'oued Lamtar. M. Meyer était alors adjoint et on I'accusa d'avoir, sur les conseils du curé, sacrifié les intérêts de plusieurs habitants. Les Ponts et Chaussées exécutèrent toutes les constructions et veillèrent à l'observation des règlements jusqu'à la création du syndicat des eaux en 1901. Toutefois, malgré le bon fonctionnement des services pour les irrigations, une certaine partie de la population se crut toujours lésée et continua d'accuser I'abbé Chochillon de ne point la soutenir et au contraire d'exploiter la situation au profit de quelques amis politiques qu'il voulait faire triompher.
L'animosité alla tellement grandissant que dans la nuit du 13 août 1902, des malfaiteurs s'introduisirent au presbytère et frappèrent violemment l’abbé Chochillon dans son lit. Le coup lui occasionna au visage une grave blessure et lui fit perdre entièrement connaissance.
Une fois revenu à lui, il appela au secours, mais les malfaiteurs avaient disparu, emportant une somme d'environ 3000 francs. La justice fut immédiatement saisie de I'affaire, mais toutes les recherches restèrent infructueuses. L'enquête de justice ne fut pas pour apaiser les esprits. Les personnes soupçonnées de tentative de meurtre promirent de se débarrasser du curé. Elles mirent du temps à exécuter leur projet et faillirent réussir en 1906. Depuis la première agression jusqu'au départ du curé en 1907, de nombreuses plaintes furent adressées à l'évêché et des enquêtes faites par I'autorité diocésaine. Voyant que I'abbé Chochillon avait toujours gain de cause et conservait son Poste, les mécontents se firent justice eux-mêmes. Le vendredi 27 mai 1906, des malfaiteurs, après avoir brisé une lame de persienne et un carreau de la fenêtre du salon pénétrèrent dans le corridor de la chambre à coucher. Réveillé par le bruit, le curé se leva et déchargea un coup de fusil qui fit à la porte un trou de cm et alla se loger dans le mur en face sans atteindre personne.
Les agresseurs surpris par la réaction gagnèrent la porte d'entrée, mais voyant que personne ne réagissait au bruit à l'extérieur, revinrent à la charge. Après un quart d'heure de lutte, bien persuadé de I'impuissance de ses efforts et du danger où il se trouvait, d'une mort certaine, le curé prit le parti de se dérober par une porte communiquant avec la cour du presbytère ; il réussit à se cacher dans le jardin et de là assista à un véritable pillage de son Presbytère et à la fuite de ses agresseurs.
Cette tentative d'assassinat impressionna fortement I'abbé Chochillon, déjà gravement malade. Son caractère s'aigrit davantage et son affection se détourna totalement de ses paroissiens qui avaient tenté de l'éloigner par toutes sortes de moyens. Aussi, sur sa demande, Mgr Cantel lui permit de prendre sa retraite en France au mois d'octobre 1907 où il mourut quelque temps plus tard.
Le 1 er janvier 1908, l'abbé Laugier fut nommé à Lamtar et trouva une population profondément troublée par ce qui était arrivé à son prédécesseur. Les offices n'étaient plus fréquentés et la religion tenue pour bien peu de chose.
L'inventaire du 23 juin 1908 fut effectué par Ernest Gout, receveur de I'enregistrement de Sidi-Bel-Abbès, en présence du curé de la paroisse.
Lamtar avait bien son église mais elle était dans un tel état qu'on dût I'abattre et la refaire des fondations à la toiture. L'abbé Kiffer mourut avant de voir réalisé le projet ; son successeur, I'abbé Blanquet, curé de Nemours, eut la consolation de mener à bien I'entreprise, avec le concours de la municiPalité, la générosité des fidèles et une subvention du Gouvernement Général.
L'œuvre achevée, quelle joie pour Monseigneur de la bénir, de dire merci à tous, de féliciter l'architecte, M. Wolff, bien inspiré d'avoir gravé sur la gracieuse façade de l'église : "Domus Dei", sans oublier les dévoués ouvriers. Il ne manqua pas de rendre hommage à l'abbé Hondet, curé de Détrie, qui avait eu le mérite d'organiser la fête, et à ses Enfants de Marie d'y avoir apporté i'éclat de leurs chants et de leur piété. C'est ainsi que fut inauguré l'édifice, dédié à I'Assomption de Notre-Dame et aux apôtres Pierre et Paul et que son Excellence y célébra la messe, assisté des chanoines Mérens et Julia, le cher doyen de Sidi-Bel-Abbès.
Avril 1953, Visite pastorale de Mgr Lacaste.
Au centre du village, une immense place fort bien aménagée, entourée de jeunes arbustes, mettait en valeur un superbe Hôtel de ville tout neuf, au style Provençal convenant bien - soleil africain et dont les arcades se révélèrent fraîches et accueillantes. Tout autour, les maisons et les villas se tenaient serrées les unes contre les autres, tout près des caves. La place où I'on danse, sans doute, et les caves où I'on travaille certainement ! En face, délabrée et minuscule, la Maison de Dieu protestait de sa vétusté et implorait pitié. Ce fut pourtant là que se déroula le matin, la cérémonie. Avec beaucoup de bonne volonté. les Enfants de Marie chantèrent plusieurs cantiques de leur répertoire. Le curé, I'abbé Girod se désola du peu de progrès spirituels de cette paroisse et affirma qu'à Lamtar, les vrais catholiques côtoyaient les «catholiques hérétiques », ceux qui se contentent de funérailles religieuses après leur mort...
« Les années se suivent et ne se ressemblent pas... » affirmait le curé redevenu optimiste, lors de la journée pastorale d'avril 1956. En 1953, la paroisse avait une église qui ressemblait plutôt à une ruine et qu'on aurait cru désaffectée s'il n'y avait pas eu une soutane sur les lieux.
Depuis tout avait changé : une gracieuse église avait remplacé I'ancienne, un clocher élégant se dressait et les passants s'arrêtaient pour I'admirer. La nef avec sa route romane plaisait à tous. L'ancien autel de bois avait été remplacé par un autel de marbre... Une statue de Notre-Dame de I'Assomption, patronne de la paroisse, était venue couronner l'autel et se faire bénir par Monseigneur. Ajoutons une belle salle d'œuvres ouverte à tous. Placée entre l'église et le presbytère, elle n'effarouchait personne, et servait à rapprocher de l'église des chrétiens...
L'heureuse évolution de la paroisse, signalée en 1956, ne fit que s'accentuer. "En 1959, la nombreuse assistance à la messe du dimanche, comparée à la dizaine de personnes qui étaient Présentes à mon arrivée en 1940, en est la preuve" commenta l'abbé Girod. Il ajouta cette particularité de Lamtar : "A la messe en semaine, il y a toujours trois hommes, mais pas une dame". Avant la cérémonie de confirmation, Mgr Lacaste décerna à Mme Mol, qui se dévouait depuis quarante ans au service du curé, la médaille du mérite diocésain : c'était même la première bénéficiaire de cette destination. À la sortie, la nouvelle cloche dont le curé avait oublié de parler (elle avait la taille d'un majestueux bourdon et porta le beau nom d'Espérance) répara d'elle-même cet oubli : elle signala sa présence et fit valoir sa capacité en sonnant à cœur joie...
Un soir de décembre 1875, pour fêter la création du village, a lieu la première véritable fête du village. Il y a parmi ces gens, vainqueurs de la maladie et de I'angoisse des colons qui ont fait souche. Leurs noms sont encore familiers à nos oreilles : Les Rebol, Achard, Audouard, Lucas, Viard, Gignet, Arzelier, Reis, Garcia, Roche, Mallet, Vantenat, Lacour, Arivès, Cousin, Faure, Capeau.
Cinq années passent.
Les feuillets restent vierges jusqu'au mois d'août. La première inscription est un décès, une fillette d'un an Héléna Fernandez. Le 27 septembre, la première naissance officielle : Miguel Soriano.
Le 6 novembre, Lamtar enregistre son premier mariage qui unit José Oltra et Anna Maria Uribé.
En 1890 Eugène Reis est nommé adjoint spécial, il n'a pas le titre de Maire puisque Lamtar n'est pas encore constitué en commune de plein exercice.
A la tête du village, Eugène Reis est remplacé par son fils Charles qui conservera ses responsabilités jusqu'en 1906
Enfin, le 17 décembre 1905, un arrêté du Gouverneur général érige le centre en commune de plein exercice. La subordination à Boukanèfis disparaît le 25 février 1906, les premières élections municipales portent M. Joseph Rame à la mairie.
Son adjoint n'est autre que Charles Reis. En 1924, Gaston Reis fait son entrée à la mairie de Lamtar. Il y demeurera jusqu'en 1947.
La durée de ses fonctions - 23ans - témoigne de la confiance que ses concitoyens lui apportaient, confiance largement méritée si I'on en juge les très nombreuses réalisations qu'il a menées, entre autres : réfection de l'église et du presbytère, construction de quatre ponts, chemins vicinaux et ruraux, construction vers 1940 du village arabe Toba autour du marabout de Sidi Abdallah. Il a également construit, à ses frais des logements pour ses ouvriers.
En 1947, c'est son jeune frère Eugène Reis que les élections portent à la mairie. Son actif n'est pas moins important que celui de Gaston
Citons la modernisation des écoles, la construction d'une nouvelle église et d'une salle d'œuvres, la construction vers 1956 d'une cité des castors destinés aux musulmans près du village Toba.
Et surtout l'édification du magnifique bâtiment de la mairie qui abrite le secrétariat, le bureau du maire, une splendide salle des fêtes, un bureau des Postes et une salle de soins gratuits.
Dans la première partie de son histoire, Lamtar a vécu, certes, une période laborieuse, pénible et ingrate. Mais les habitants étaient solidaires, dans les joies comme dans les épreuves.
Le principal centre de réunion et de distraction était le «Café Hôtel des Voyageurs ». C'était également une remise car on se déplaçait presque uniquement en voiture à cheval.
Cet établissement, que tous appelaient «la cantine » avait été crée et était tenue par son truculent propriétaire Félix Pelatan.
On y fêtait les grands événements et les apéritifs communs n'étaient pas rare.
On y dansait aussi, emportés par I'accordéon d'Augustin dont personne ne connaissait le nom de famille.
À ce moment, il était courant de donner aux amis des surnoms toujours bien choisis. C'est ainsi qu'on trouvait : Pigeon rôti ; Salonique ; Barbica ; Cabréro ; Manche d'Estaque ; Cabréra ou bien on ne les appelait que par leurs prénoms, alors les noms de famille disparaissaient des mémoires.
Il existait également une épicerie exploitée de tous temps par M. Nathan Bénichou et sa famille ainsi que l'épicerie-bar construite par M. Amédée Marien.
Au village, une forge charronnage était tenue par Louis Saulnier. A l'époque, on y réparait les charrues, les charrettes et tombereaux.
Ensuite, Albert et Georges leurs fils ont repris I'affaire.
Albert était plus spécialisé sur le fer et de tout ce qui en découle, Georges lui c'était le bois (meubles, rayons de roues de charrette etc.). Mais, on réparait tout chez « Saulnier Frères» :
Les vitres, la cloche de l'église, les fumigènes (pour empêcher la vigne de geler), les tracteurs, et on fabriquait même les cercueils.
On lira avec passion bien d'autres anecdotes sur Lamtar grâce au blog de Christian Saulnier : csaulnier.skyrock.com ???
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À la découverte de l’Eurafrique perdue,
de Jean Jolly
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Un livre qui fait le lien
entre les décolonisations précipitées des années 60
et l’insécurité actuelle en Europe
Notre compatriote et ami Jean Jolly qui fut grand reporter à L’Aurore, puis éditorialiste de politique étrangère et d’économie internationale au Nouveau Journal, correspondant diplomatique à l’agence Reuters, chroniqueur à L’Indépendant, vient de publier un nouveau livre qui rappelle des événements vécus par les plus anciens d’entre nous.
Il souligne la responsabilité des autorités françaises dans une décolonisation précipitée qui a conduit au chaos dans la plupart des pays africains, puis aux problèmes actuels en Europe : immigration massive, montée de l’islamisme radical, trafics en tout genre, terrorisme…
Nous publions ci-dessous quelques extraits de cet ouvrage très documenté et passionnant qui révèle aux jeunes générations un passé oublié et devrait rafraîchir les mémoires défaillantes.
Destruction de l’escadre française à Mers el-Kébir (p. 30)
Traumatisés par la défaite, comme les Métropolitains, les Français d'Outre-mer sortent incrédules de leur torpeur quand leurs anciens amis et alliés britanniques lancent contre eux plusieurs attaques meurtrières. Le premier choc militaire et psychologique se produit le 3 juillet 1940, quinze jours après l'Armistice, quand une escadre britannique ouvre le feu sur l'escadre française, en cours de désarmement, réfugiée dans la base navale de Mers El-Kébir, près d'Oran. Winston Churchill a donné l'ordre d'attaque malgré l'avis défavorable de son cabinet et de son état-major. Il y a 1 297 morts et 351 blessés parmi les équipages français.
De Gaulle, embarrassé, commente ce drame à la radio. Après avoir "appris avec douleur et avec colère que des navires de la flotte française avaient été coulés par nos alliés", il justifie l'attaque anglaise en ces termes :
- Je dis sans ambages qu'il vaut mieux qu'ils aient été détruits. J'aime mieux savoir même le Dunkerque, notre beau, notre cher, notre puissant Dunkerque échoué devant Mers El-Kébir que de le voir, un jour, monté par des Allemands, bombarder les ports anglais ou bien Alger, Casablanca, Dakar.
Pour mémoire : le cimetière où reposent les corps des marins français, après avoir été abandonné aux profanateurs en 1962, a été discrètement rénové, mais en ôtant les croix des tombes pour ménager les susceptibilités les dirigeants de l’actuelle République algérienne.
Ce drame naval comme les autres attaques anglaises et gaullistes contre les territoires de l'Empire provoquera de fortes inimitiés outre-mer à l'égard des Français de Londres.
Les Anglais récidivent cinq jours plus tard. Le 8 juillet, une escadrille embarquée sur le porte-avions Hermès attaque Dakar sans succès.
Le gouvernement de Vichy qui n'a plus d'armée à l'exception d'une marine en cours de désarmement à Toulon et à Brest, ne lance aucun raid de représailles contre ses agresseurs, mais réorganise l'administration coloniale. Le gouverneur général Boisson, en poste à Brazzaville, devient le 20 juillet gouverneur général de l'Afrique occidentale française. Le général Weygand, nommé le 6 septembre délégué général du gouvernement en Afrique française et commandant en chef des forces françaises en Afrique, prend ses fonctions à Alger et mène aussitôt deux actions conjointes : officiellement, il négocie avec la Commission italienne d'Armistice en vue d'obtenir l'accroissement de l'effectif militaire de l'Armée d'Afrique de 100 000 à 135 000 hommes ; clandestinement, il camoufle des matériels, des personnels spécialisés ou non (dont 35 000 supplétifs) et multiplie les entraves à la surveillance des commissions de contrôle.
Dès son arrivée en Algérie, le gouverneur général Jacques Soustelle prend une série de mesures qui vont transformer très profondément le pays. Son plan révolutionnaire (mars 1955) vise à regrouper les populations des zones les plus reculées pour leur éviter de se trouver entre deux feux et faciliter leur intégration, notamment par la scolarisation des filles qui deviendra obligatoire dans les villes en 1957 et dans le bled en février 1958. Longtemps différée en raison de l'hostilité des chefs religieux, cette scolarisation atteindra 15% en 1960. Durant la même période, l'effectif d'enfants musulmans scolarisés sera multiplié par près de trois et celui du secondaire majoré d'un tiers. Dans cette entreprise de modernisation des esprits et d'ouverture sur le monde extérieur, l'armée, en particulier d'anciens officiers d'affaires indigènes et des militaires du contingent, auront un rôle éducatif et social exceptionnel. Bien que tardives, ces mesures offrent de belles perspectives économiques, sociales et même politiques. Partagées et encouragées par l'armée et par la majorité des populations européennes et musulmanes, elles doivent contribuer à la modernisation du pays et des esprits et donnent satisfaction en particulier aux femmes musulmanes (…).
Malheureusement, les massacres abominables perpétrés le 20 août 1955 à Philippeville et à la mine de pyrite d'El Halia sur ordre de Zighoud Youcef, le chef de la wilaya II, hostile à toute solution négociée interrompent les discussions politiques menées par le gouverneur général Jacques Soustelle avec les principales forces du pays incluant des nationalistes. Les atrocités sont de même nature que celles commises par le Hamas dans le sud d'Israël le 7 octobre 2023 : viols, femmes enceintes éventrées, hommes émasculés, amputés, torturés, brûlés vifs... Parmi les morts, il y a 171 Européens et plusieurs centaines de musulmans dont des notables et des ouvriers de la mine, coupables de ne pas partager les opinions du FLN.
À propos des morts et des blessés, Jacques Soustelle écrira :
- Alignés sur les lits, dans des appartements dévastés, les morts, égorgés et mutilés (dont une fillette de quatre jours) offraient le spectacle de leurs plaies affreuses. Le sang avait giclé partout, maculant ces humbles intérieurs, les photos pendues aux murs, les meubles provinciaux, toutes les pauvres richesses de ces colons sans fortune. À l'hôpital de Constantine des femmes, des garçonnets, des fillettes de quelques années gémissaient dans leur fièvre et leurs cauchemars, des doigts sectionnés, la gorge à moitié tranchée…
De telles atrocités se renouvelèrent durant les sept années de conflit. Toutefois, comme aujourd'hui, il y eut des personnalités, en France et à l'étranger, pour justifier cette barbarie au nom du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et de considérer ces assassins comme des interlocuteurs valables.
De Gaulle et les populations d’Afrique subsahariennes (p. 59)
Critiquant la loi cadre votée par le Parlement le 19 juin 1956 qui doit conduire à la création d’une Fédération ou une Confédération franco-africaine, De Gaulle déclare :
De Gaulle, alors dans l'opposition, fait en 1956 ce commentaire peu amène sur la loi-cadre :
- Les Noirs sont de braves bougres. Ils ne sont pas animés par la même passion, par la même haine que les Arabes. Il n'y a pratiquement pas de Noirs en dehors de l'Afrique noire, alors que le mouvement panarabe va bien au-delà du Maghreb. Mais vous comprenez bien que lorsque l'Afrique du Nord sera perdue, le même intérêt n'existera plus.
Il tient des propos encore plus désobligeants à l'égard des Africains francophones :
- On a prétendu faire des nègres de bons Français. C'est beau l'égalité, mais ce n'est pas à notre portée. Vouloir que toutes les populations d'Outre-mer jouissent des mêmes droits sociaux que les métropolitains, d'un niveau de vie égal, ça voudrait dire que le nôtre serait abaissé de moitié. Qui y est prêt ?
Devenu président de la République, il multipliera les voyages officiels et les bains de foule en Afrique.
Abandon criminel du Plan de Constantine (p. 65)
Le Plan de Constantine, proposé le 3 octobre 1958 par De Gaulle, alors président du Conseil, confirme le plan Soustelle et des mesures déjà engagées par le ministre résidant Robert Lacoste. Le Plan comprend deux volets : l'un encourageant la construction de logements, l'autre visant à inciter les entreprises métropolitaines à investir en Algérie. Le Plan prévoit de réaliser en cinq ans, au profit des musulmans les plus pauvres, la construction de 200 000 logements pour héberger un million de personnes, la distribution de 250 000 hectares de terres, le recrutement de cadres dans l'administration, l'armée et l'enseignement, la scolarisation de 500 000 enfants, l'indexation des traitements et salaires versés en Algérie sur ceux pratiqués en Métropole, la création de 400 000 emplois nouveaux grâce à un effort d'industrialisation. C'est un projet de 400 milliards d’anciens francs par an dont la moitié de capitaux privés...
Seuls des oulémas (docteurs de la loi coranique) et des cadis (juges musulmans) émettent des réserves sur les réformes engagées. La plupart d'entre eux acceptent l'effort de scolarisation, mais le mariage civil est mis en application de façon inégale. Malgré la mauvaise volonté de ces éléments traditionnels ou rétrogrades, la population veut croire au plan de Constantine qui doit faire de l'Algérie un pays industriel grâce à ses énormes richesses minières encore sous-exploitées : gaz et pétrole du Sahara, fer de l'Ouenza, phosphates du Kouif, charbon de Colomb-Béchar…
Beaucoup de Français d'Algérie se surprennent à rêver. Ainsi, grâce aux grands travaux entrepris (détournement du cours de la Seybouse pour permettre la création de nouveaux quais) et aux investissements envisagés (complexe sidérurgique construit alimenté par les mines de fer de l'Ouenza, projets métallurgiques, pétrochimie utilisant les phosphates du Kouif, nouvelle centrale thermique, entreprises industrielles et commerciales prévues et approvisionnées par le gaz et le pétrole du Sahara), le port de Bône (aujourd'hui Annaba) aurait dû devenir en quelques années le premier port d'Afrique du Nord, devant Alger, Oran, Tunis et Casablanca. Seul le complexe sidérurgique fut construit. Il fut repris après l'indépendance par le groupe Mittal puis a cessé toute activité en septembre 2023 avant de reprendre timidement une activité au début de l'année 2024 après un accord avec la Sonatrach, la société nationale d'hydrocarbures.
Le plan de Constantine représente à la fois un espoir de paix et de développement pour les jeunes générations des deux côtés de la Méditerranée. Le rêve va devenir cauchemar car De Gaulle en a décidé autrement. Le jour même de la présentation officielle de ce plan, le colonel Lacheroy qui fut un des artisans du 13 Mai, se met à douter. Dans l'hélicoptère qui survole la foule avant d'atterrir à Constantine, le colonel montre à De Gaulle la foule :
- Regardez, mon général, ils vous acclament.
À la stupéfaction du colonel, De Gaulle qui va présenter le Plan industriel visant à lier pour plusieurs années l'Algérie à la France, lui répond avec une certaine condescendance :
- Enfin, Lacheroy ! Dans dix ans, ils seront tous contre nous.
La misérable affaire Si Salah (p. 67)
Si Salah (de son vrai nom Mohamed Zamoum) devient responsable par intérim de la wilaya IV. Ancien militant du MTLD et l'un des premiers maquisards de Kabylie, il est secondé par Si Lakhdar et Si Mohammed. Lors d'une réunion du conseil de la wilaya, tenue du 14 janvier au 14 février 1960, il formule plusieurs griefs à l'égard des dirigeants de l'extérieur et déclare :
- Le peuple a trop souffert et va nous abandonner.
Aussi prend-il contact directement avec les autorités militaires françaises. L'Élysée est informé, mais privilégie une négociation directe avec le GPRA établi à Tunis. Au même moment De Gaulle se prononce en faveur de l'autodétermination, ce qui suscite des craintes chez les Français d'Algérie et une partie de l'armée. La confiance des entrepreneurs s'effondre. Les capitaux commencent à fuir l'Algérie. De 24 janvier au 1er février 1960, les étudiants d'Alger appuyés par des Unités territoriales dressent des barricades. La gendarmerie intervient : il y a des victimes de part et d'autre. Le commandement de l'armée tergiverse mais convainc les émeutiers de se rendre.
Malgré ces incidents, Si Salah et ses adjoints Si Mohamed et Si Lakhdar qui ont maintenu leurs relations avec les officiers français, décollent le 9 juin 1960 pour Rambouillet à bord d'un avion militaire. Le lendemain, ils sont conduits à l'Élysée auprès de De Gaulle. Ils reconnaissent qu'ils ne pourront pas entraîner d'un seul coup derrière eux toute l'ALN d'Algérie, mais proposent un cessez-feu partiel aussi large que possible. À cette fin, ils prendront contact avec la wilaya III (Kabylie) et demandent qu'on les aide à se rendre à Tunis pour mettre le GPRA face à ses responsabilités.
Le moment est favorable : l'armée est sur le point d'obtenir la reddition d'une grande partie de l'ALN, mais De Gaulle n'en veut pas. Il entend poursuivre les négociations avec le GPRA, première entorse publique à ses engagements. Aussi, des purges commencent-elles dans une partie de la wilaya, surtout dans l'Ouarsenis, à l'initiative du commandant Si Hassan (Dr Youcef Khatib), lié aux dirigeants de l'extérieur (…).
Malheureusement, l'Élysée poursuit ses contacts avec le GPRA. Si Mohammed sent que l'affaire est mal engagée avec de Gaulle. Si Hassan dissout le 14 juillet le comité de la wilaya et prend la direction d'un Comité militaire de coopération et d'exécution. Le 22, il fait exécuter Si Lakhdar. En outre, le 6 novembre 1960, De Gaulle évoque dans un nouveau discours "l'Algérie algérienne", ce qui marque le sabordage officiel du Plan de Constantine à la satisfaction du patronat métropolitain qui s'oppose notamment à la construction d'un complexe sidérurgique à Bône, (aujourd'hui Annaba) et privilégie le site de Dunkerque pour un tel projet.
La suppression malheureuse des SAS et des SAU (p. 62)
Les SAS (Sections administratives spécialisées) et les SAU (sections administratives urbaines) jouent un rôle essentiel en établissant un contact avec la population rurale en vue de lui permettre d'accéder à la modernité en développant l'enseignement, l'assistance médicale, le développement économique. Des hommes de toutes origines sociales et politiques, tel le futur Mgr Gaillot, participent à cette aventure. On ne soulignera jamais assez le rôle social exceptionnel de la quasi-totalité des personnels de ces sections qui, au péril de leur vie et avec des moyens souvent dérisoires, mènent une action bénéfique pour les populations les plus démunies, jusqu'à ce que le gouvernement français, à la demande de De Gaulle, ordonne leur abandon le 17 février 1962.
En trois ans (1957-1960), le rythme des mises en chantier de logements est multiplié par trois. Le nombre de compteurs électriques installés, de tonnes de ciment consommées, les volumes d'emballage grimpent de plus de 10% par an. Le financement provient pour l'essentiel du Fonds de dotation de l'habitat. Les emplois créés permettent de payer des loyers qui alimentent à leur tour les ressources du Fonds. Malheureusement, certaines industries légères comme le textile n'entrent pas dans ce cycle vertueux, le patronat de ce secteur s'opposant aux délocalisations en Algérie alors qu'il profite largement des commandes de l'armée et du marché africain. En outre, le pétrole et le gaz commencent à être exploités grâce à un vaste programme de voies rapides quadrillant le désert. L'objectif d'amener l'Algérie à un niveau de vie européen en deux ou trois décennies n'apparaît plus irréaliste.
Pour les territoires ultramarins, la loi-cadre, proposée par Gaston Defferre et votée par l'Assemblée nationale le 19 juin 1956 à une très forte majorité (470 voix contre 105), se présente comme une simple loi de décentralisation administrative et politique. Elle institue le suffrage universel, établit des conseils de gouvernement, composés de cinq membres élus par l’assemblée locale et de quatre fonctionnaires nommés par le gouverneur général. Ils sont "dotés d’une large compétence qui embrassera toutes les questions d’intérêt local". Les pouvoirs des assemblées territoriales sont élargis. L’administration sera réformée pour faciliter l’intégration et la promotion des autochtones. L'Afrique francophone doit, en principe, évoluer vers une Fédération ou une Confédération. Les Sénégalais Léopold Senghor et Mamadou Dia demandent la création d'un conseil de gouvernement fédéral, à Dakar et à Brazzaville, mais des désaccords éclatent. Une réforme de cette ampleur eût pourtant jeté les bases de gouvernements fédéraux d'AOF (Afrique occidentale française) et d'AEF (Afrique équatoriale française).
Le drame de la rue d’Isly (p. 72)
Le 26 mars 1962, une unité de l'armée mitraille sans sommations une manifestation pacifique de la population d'Alger rue d'Isly qui vise à briser le blocus du quartier européen de Bab el-Oued : 66 morts. Ce massacre en a occulté beaucoup d'autres. Ainsi, à Bône, dans l'Est de l'Algérie, des militaires français ont assassiné délibérément des enfants européens de treize à dix-sept ans. À la mi-décembre 1960, des légionnaires ouvrent le feu sur un cortège de jeunes manifestants chantant La Marseillaise, drapeaux tricolores déployés. Bilan : deux jeunes gens, Gilbert Gamba, quinze ans, et André Kandel, quatorze ans, tués et 37 autres blessés.
Le 19 janvier 1962, dans cette même ville, Noël Méï, treize ans, et un de ses camarades de classe, âgés de quatorze ans, collent des affiches de l’OAS sur un mur. Un sous-lieutenant du contingent, substitut du procureur militaire attaché au général commandant la zone-Est constantinois, descend de la 2 CV mise à sa disposition par l’armée et tire à bout portant avec son pistolet sur les deux adolescents, tuant le plus jeune et blessant son camarade. Puis le sous-lieutenant remonte dans son véhicule, passe sur le corps du jeune homme et s'enfuit. Arrêté par la police et interrogé, il reconnaît les faits, mais il est transféré aussitôt à Djibouti, à la demande du ministère des Armées. Ce crime, comme beaucoup d'autres, a été amnistié, ce qui n'a pas permis à la famille de la victime d'obtenir justice et réparation. La foule venue se recueillir sur le lieu de l'assassinat est mitraillée par un commando du FLN (deux morts supplémentaires). L’après-midi ont également lieu les obsèques d'Andrée Zammit, dix-sept ans, tuée la veille par l’explosion d’un obus piégé qui a fait 4 morts et 24 blessés. Les autorités françaises laissent sans défense leurs ressortissants. En effet, le cessez-le-feu unilatéral décidé par le gouvernement français en mai 1961 est suivie du rapatriement ou de la dissolution de plusieurs unités combattantes, puis d'un cessez-le-feu négocié le 19 mars 1962 avec le GPRA, mais les enlèvements se multiplient et les attentats reprennent de part et d'autre.
Chasse aux partisans de l'Algérie française (p. 74)
De Gaulle et ses proches collaborateurs interdisent tout rapatriement en Métropole. Inspirées et approuvées par l'Élysée, les consignes de Louis Joxe, maintes fois reprises et répétées au cours des semaines suivantes par les différentes administrations y compris par le ministère des Armées, sont l'occasion de massacres pour lesquels les responsables et les coupables français et algériens n'ont jamais été inquiétés. Une circulaire à connotation raciste débouche sur une vague de crimes imprescriptibles, mais impunis, contre les Français musulmans.
"Ministre État Louis Joxe demande à Haut-Commissaire rappeler que toutes initiatives individuelles tendant à installation métropole Français Musulmans sont strictement interdites. En aviser urgence tous chefs S.A.S. et commandants d’unités. Signé : Louis Joxe"
Il répète ces instructions dans une directive aux chefs de corps :
- Vous voudrez bien faire rechercher, tant dans l’armée que dans l’administration, les promoteurs et les complices de ces entreprises de rapatriement des supplétifs, et faire prendre les sanctions appropriées. Les supplétifs débarqués en métropole, en dehors du plan général, seront renvoyés en Algérie, où ils devront rejoindre, avant qu’il ne soit statué sur leur destination définitive, le personnel déjà regroupé suivant les directives des 7 et 11 avril. Je n’ignore pas que ce renvoi peut être interprété par les propagandistes de la sédition, comme un refus d’assurer l’avenir de ceux qui nous sont demeurés fidèles. Il conviendra donc d’éviter de donner la moindre publicité à cette mesure.
L'Algérie française agonise. C'est la volonté de l'Élysée, du gouvernement français, du patronat, de la plupart des partis politiques de gauche comme de droite. Tous nient ou feignent d'ignorer les violences et la répression qui frappent leurs compatriotes d'Algérie. En outre, les autorités françaises refusent l'aide de leurs alliés pour évacuer leurs compatriotes.
Autre décision scandaleuse : le Comité des Affaires algériennes du 23 mai 1962, présidé par De Gaulle, décide de bloquer les crédits d’aide aux musulmans rapatriés. Selon le Comité, "les musulmans n’étant pas adaptés à la vie européenne, une aide individuelle est inopportune".
Néanmoins, près d'un million et demi d'Européens et de Musulmans réussissent à prendre le chemin de l'exil en quelques semaines. Il ne reste en Algérie en septembre 1962, que 100 000 Français d'origine européenne (dont plus de 50% de Métropolitains) et, en mars 1965, 92 000 Français (dont 37 000 coopérants). Bruno Etienne estime que seulement 800 Français ont demandé leur naturalisation au bout de trois ans (dont 260 prêtres et religieuses et 300 épouses). Il n'y eut que 21 600 supplétifs musulmans rapatriés en Métropole, soit 66 000 personnes en incluant leurs familles par des officiers ayant eu le courage de désobéir aux ordres de leur hiérarchie. (…)
Niant ces réalités pour tenter de justifier sa politique chaotique, De Gaulle présenta ce désastre en victoire et, en dépit des humiliations algériennes passées sous silence (agressions contre les représentants officiels de la France, massacres des populations, rejet des Accords d'Évian, spoliations de toutes natures…) et des réserves de plusieurs membres de son entourage, s'engagea dans une coopération intense et coûteuse dans tous les domaines avec l'Algérie, facilitant notamment une immigration massive par les accords de 1968. L'extrême-gauche et des proches du pouvoir profitèrent de cette manne financière. Quant à la population française, refusant de mesurer les conséquences de cette capitulation, elle préféra lâchement ignorer puis oublier le drame algérien…
Autre décision scandaleuse : le Comité des Affaires algériennes du 23 mai 1962, présidé par De Gaulle, décide de bloquer les crédits d’aide aux musulmans rapatriés. Selon le Comité, "les musulmans n’étant pas adaptés à la vie européenne, une aide individuelle est inopportune".
Néanmoins, près d'un million et demi d'Européens et de Musulmans réussissent à prendre le chemin de l'exil en quelques semaines. Il ne reste en Algérie en septembre 1962, que 100 000 Français d'origine européenne (dont plus de 50% de Métropolitains) et, en mars 1965, 92 000 Français (dont 37 000 coopérants). Bruno Etienne estime que seulement 800 Français ont demandé leur naturalisation au bout de trois ans (dont 260 prêtres et religieuses et 300 épouses). Il n'y eut que 21 600 supplétifs musulmans rapatriés en Métropole, soit 66 000 personnes en incluant leurs familles par des officiers ayant eu le courage de désobéir aux ordres de leur hiérarchie.
Massacres après le cessez-le-feu et l’indépendance
Après le cessez-le-feu du 19 mars 1962, à peu près autant d'Européens sont tués en quatre mois (2 700) qu'en sept ans de guerre (3 100). Pour le Grand Oran, le nombre d'Européens tués entre le 26 juin et le 10 juillet s'élève à plus de 700 morts (tués et disparus considérés comme morts), mais la plupart des troupes françaises commandées par le général Joseph Katz restent dans leurs casernements sur ordre direct de l'Élysée. Néanmoins des militaires français et des membres de l'ALN ont pu sauver quelques civils européens et musulmans en bravant la colère de la populace et les consignes de non-intervention de leurs chefs.
Outre les forces supplétives (désarmées par leurs officiers sur ordre de leurs ministres de tutelle et de leurs supérieurs hiérarchiques et abandonnées à leurs bourreaux parce qu'elles sont composées de musulmans jugés non assimilables en France), des dizaines de milliers de civils sont torturés puis massacrés par le FLN.
Privés sans leur consentement de la citoyenneté et de la nationalité française par les Accords d’Évian, désarmés et isolés dans leurs villages, les anciens combattants et supplétifs musulmans sans protection de l’armée française qui a reçu l’ordre de ne pas intervenir, se sont trouvés à la merci de l’ALN (Armée de Libération Nationale) venue de Tunisie et du Maroc. Les sévices, les assassinats, les enlèvements commencent, souvent du fait de combattants de la 25e heure.
- En masse, lors des deux principales vagues de répression à l'été et à l'automne 1962, quelquefois par unité entière, par village entier, par famille entière, les femmes et les enfants n’étant pas épargnés, les massacres perpétrés sont d’une barbarie et d’une ampleur sans précédent, écrit Michèle Laumet.
Les supplices précédant la mort sont d’une cruauté inouïe et peuvent durer des heures, voire des jours : corps ébouillantés, dépecés, enterrés ou brûlés vifs, énucléations, émasculations, membres découpés en lanières et salés, anciens combattants contraints d’avaler leurs médailles avant d’être brûlés vifs dans le drapeau français...
- Certains harkis furent crucifiés sur des portes, les yeux crevés, le nez et les oreilles coupés, la langue arrachée, systématiquement émasculés... D’autres furent dépecés vivants à la tenaille, leur chair palpitante jetée aux chiens... Quant aux familles, voici ce qui les attendait : des vieillards et des infirmes étaient égorgés, des femmes violées puis éventrées, des nourrissons, des jeunes enfants avaient la tête écrasée contre les murs sous les yeux de leur mère..., ajoute Michèle Laumet.
Les tueurs du Hamas, qui se sont déchainés le 7 octobre 2023 contre les Israéliens, n'ont rien inventé.
Dans un compte-rendu destiné à sa hiérarchie, le sous-préfet Robert, en poste à Akbou (Kabylie), dresse la chronique macabre des exactions (supplices, assassinats, enlèvements, viols collectifs, enfermement dans des camps) subies par les harkis et leurs familles dans sa circonscription après le cessez-le-feu du 19 mars 1962 et jusqu’à la fin décembre 1962. Parmi les victimes, "la proportion de civils de l’ordre d’un tiers est constituée d’élus de tous rangs, de chefs de villages, d’anciens combattants..."
Dans un rapport officiel de mai 1962, le contrôleur général aux Armées, Christian de Saint-Salvy écrit :
- Les crimes de guerre commis en Algérie depuis le 19 mars 1962 sont sans précédent depuis la dernière guerre mondiale, dépassant tout ce qui avait pu être constaté en Asie ou en Afrique noir.
À ces tueries s'ajoutent les règlements de comptes qui se sont poursuivis en Algérie et en Europe bien au-delà de juillet 1962 : expulsion du pouvoir des négociateurs d'Évian et de Ferhat Abbas, assassinats par le FLN de chefs nationalistes de la première heure en Suisse, en Allemagne, en Espagne, en France, incarcération de Ben Bella en 1965... Enfin, la lutte menée par le FLN en Métropole, notamment pour réduire le Mouvement national algérien (MNA), le parti de Messali Hadj, se solde par plusieurs milliers de tués : 3 957 musulmans, 150 civils métropolitains, 16 militaires, 53 policiers.
Émeutes de mai et convention franco-algérienne de décembre 1968 (p. 93)
En France, les émeutes de mai 1968 mettent un terme aux ambitions internationales de De Gaulle qui avait mal évalué les nouveaux rapports de force mondiaux.
Limogé par De Gaulle pour ne pas avoir employé la manière forte contre les étudiants, Christian Fouchet, alors ministre de l'Intérieur (du 6 avril 1967-31 mai 1968), fit cette confidence un an plus tard.
– J’en ai voulu au général de m’avoir limogé au lendemain de mai 1968. C’était une faute politique. De Gaulle m’a reproché de ne pas avoir maintenu l’ordre en mai 68.
– Vous n’avez pas osé tirer, m’avait-il dit.
– J’aurais osé s’il l’avait fallu, lui avais-je répondu. Souvenez–vous de l’Algérie et de la rue d’Isly. Là, j’ai osé et je ne le regrette pas, parce qu’il fallait montrer que l’armée n’était pas complice de la population algéroise.
Lors du massacre de la rue d'Isly le 26 mars 1962, Christian Fouchet était Haut-commissaire en Algérie avec les pleins pouvoirs.
La volonté de De Gaulle d'employer la force contre les étudiants en mai 68 est confirmée par une confidence d'Edouard Balladur. Rappelant le refus de Pompidou, alors Premier ministre, de faire couler le sang, De Gaulle se serait écrié :
- Figurez-vous, Pompidou, que j’ai passé ma vie à tirer contre des Français.
Quelques mois après ces événements, De Gaulle signe une Convention qui offre un statut particulier aux ressortissants algériens, facilitant leur entrée, leur circulation, leur séjour et leur emploi en France. Les Algériens peuvent s’établir librement pour exercer une activité de commerçant ou une profession indépendante. Le délai pour obtenir un titre de séjour de dix ans est raccourci et le regroupement familial est facilité…
Commencé par une dévaluation du franc, le mandat présidentiel s'achève par une autre dévaluation et la fonte des réserves en or de la Banque de France.
En abandonnant les Africains à leur sort (et aux multinationales), les acteurs de la décolonisation sont en partie responsables de la pauvreté, des conflits, de la montée de l'islam fondamentaliste et des intégrismes religieux, de l'immigration massive…
La tâche ingrate des successeurs de De Gaulle (p. 103)
Conséquences économiques : Pompidou doit relever un défi, quand Boumediène prend le 24 février 1971 une participation de 51% dans les sociétés pétrolières françaises en Algérie et nationalise la totalité des gisements de gaz naturel ainsi que les gazoducs et oléoducs. Cette décision, redoutée depuis l'indépendance, joue un rôle déterminant dans le choix courageux du "tout-nucléaire" que Pompidou réussit à imposer avant sa mort malgré les critiques de plusieurs ténors de l'opposition et, même, de de plusieurs de ses alliés politiques (…)
Valéry Giscard d'Estaing (1974-1981) va mettre en application ce vaste et imposant programme nucléaire. Il multipliera d'autant plus les efforts en ce sens que, sous sa présidence, les Occidentaux subissent le premier choc pétrolier. La nationalisation des richesses du Sahara découlant de l'indépendance de l'Algérie a fait perdre à la France la souveraineté énergétique qu'elle allait acquérir grâce à ses pionniers du pétrole et du gaz.
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Ces extraits ne donnent qu’un aperçu de ce livre, riche d’informations et d’analyses sur les conséquences de la décolonisation et du déclin français.
La première édition, à tirage limité, est déjà épuisée. Il existe une seconde édition actualisée (livre broché et e-books sur Amazon) qui donne une multitude de détails sur les occasions manquées et les trahisons qui ont conduit des populations africaines désespérées à une immigration massive et à chercher refuge dans l’islamisme radical et le terrorisme.
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Alger-étudiant N° 36, 24 janvier 1925
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MES TABLETTES
Vous avez tous lu, comme moi, qu'un concours de la Paix avait été institué et qu'un lauréat avait été proclamé. Qu’en avez-vous pensé ? Avez-vous cru que nous avions cessé de connaître les horreurs de la guerre et que nos petits enfants devraient se contenter du récit que nous leur en ferions d'après nos pères ?
Pas le moins du monde, n'est-ce pas ?
Moi non plus. Toutes ces conférences, ces meetings, ces discours, ces écrits, me paraissent chose profondément, inutiles et je crois fermement que cela ne fera pas avancer la question d'un pas.
Car de même que nul n'a jamais songé, je crois, que les traités et morale passés, présents et futurs soient de nature à nous permettre de nous passer un jour de gendarmes, de tribunaux répressifs et de prisons, je ne suis pas d'avis que les prédications pacifistes les plus enflammées puissent empêcher les hommes de s'entrégorger en batailles rangées.
Les uns préconisent le désarmement. C'est là je crois chose impossible à réaliser. Car personne ne veut bien entendu commencer. Les Nations se renvoient la balle de l'une à l'autre : « Lorsque vous aurez jeté vos armes et que vous m'aurez ainsi prouvé que vous ne nourrissez à mon égard aucune intention agressive, j'ôterai à mon tour mon armure ». Ne comprenez-vous pas cela ? Supposez que vous vous trouviez en compagnie d'un bandit et que las de lutter tous deux vous décidiez de mettre bas les armes, vous vous garderez bien de commencer car vous aurez peur qu'aussitôt désarmé, il ne vous saute dessus. Vous attendrez donc qu'il jette à vos pieds ses engins meurtriers pour en faire autant. Et il tiendra de son côté exactement le même raisonnement. C'est ce qui se passe entre les différentes Nations qui ont une tendance naturelle à se regarder les unes les autres d'un oeil soupçonneux. Et puis parviendrait-on à désarmer.
Aurait-on tué la guerre ? Non, car il fut un temps où les armes n'existaient pas et les hommes se battaient quand même.
D'autres s'appuyant sur l'adage latin : «Si vis paeem, parabellum », estiment que le moyen le meilleur d'empêcher son voisin de vous chercher noise et par conséquent de vivre en paix est de se rendre redoutable et par suite respectable. L'expérience a montré ce que vaut cet expédient.
D'autres enfin ont foi en l'Internationale et sont persuadés que le jour où les frontières entre Nations auront disparu, la Paix Universelle régnera sur la terre. Je ne partage pas leur confiance. Car il est probable que le jour où l'Internationale serait réalisée les progrès de la Science nous permettraient d'entreprendre des relations avec les autres planètes et c'est alors non plus entre Nations, mais entre la Terre, la Lune, Mars, Jupiter et autres globes tournoyant dans l'espace que la guerre sévirait. Il faudrait après l'Internationale réaliser l'Interplanétaire, puis sans doute aussi l'Internebulaire et l'Univers étant infini il n'y aurait vraiment aucune raison pour qu'on s'en tienne là.
Ainsi au milieu des Ruines-, éparses sur la terre, vestiges des temps anciens et présents, la Statue du Dieu Mars se dresse toujours intacte et menaçante et ni le temps ni les efforts des hommes arqués contre son piédestal n'ont pu l'ébranler.
Mais enfin, me direz-vous, vous êtes désespérant : vous croyez donc à la Guerre Eternelle. Je suis persuadé en effet que je ne remporterai jamais un prix dans un concours de la paix. Et cependant je crois qu'il y aurait peut-être un moyen d'éviter la guerre. Je vous le confie.
Progresser n'est souvent en somme que reculer. Je ne vais pas, rassurez-vous, tirer de ce théorème toute une suite de corollaires pessimistes. Mais j'en concilierai simplement que le passé peut servir d'exemple à l'Avenir. La pratique de là Guerre Moderne est une preuve de ce que j'avance. Autrefois les guerres se faisaient de peuplades à peuplades et tous les membres de la peuplade, même les femmes, nous confie l'histoire, y prenaient part. Puis vint un temps où la Guerre se fit de prince à prince. Chaque seigneur avait une armée qu'il payait : les soldats étaient en quelque sorte des fonctionnaires de la guerre. On était militaire comme on est aujourd'hui commis des P. T. T. ou Conseiller d'Etat. Les peuples eux voyaient leurs territoires saccagés, pillés ; on en tuait la moitié au passage, mais en somme ils ne souffraient pas autrement de la lutte : ils ne combattaient pas. Ne vous semble-l-il pas que la Nation armée d'aujourd'hui n'est qu'une résurrection de la peuplade alignée toute entière derrière son chef, prête à combattre ?
Pourquoi alors ne chercherions-nous pas chez nos ancêtres, ce que nous n'entrevoyons pas chez nos descendants. Parmi les rares faits dont mes éludes classiques m'ont laissé le souvenir, il en est un qui m'a toujours frappé et que vous connaissez tous :
Deux peuples antiques ayant un sujet de querelle estimèrent qu'il était absurde de s'exterminer jusqu'au dernier et singer ainsi les deux Lions dont un Afgorar devait quelques siècles, plus tard nous raconter l'histoire. Ils déléguèrent chacun trois des leurs et les trois Horaces et les trois Curiaces....
Ça y est, allez-vous vous écrier, je vois ce que vous voulez dire.
En cas de conflit chaque peuple déléguerait un petit nombre de champions triés sur le volet. El c'est à eux que la lutte se circonscrirait. Mais mon pauvre Monsieur c'est idiot cela ! Car tout d'abord remarquez bien que vous ne supprimez pas la guerre.
Tout au plus, pouvez-vous espérer réduire le champ où sévira le fléau. Et puis même pas, tenez! Le peuple dont les champions auront été battus ne voudra pas accepter sa défaite. Il se précipitera sur l'autre et ce sera la guerre comme avant. Vous n'avez qu'à voir ce qui se passe pour les matches de football. Les partisans de l'équipe vaincue sautent les barrières et viennent flanquer une tripotée à l'équipe victorieuse. Les amis de cette dernière se précipitent à leur tour et c'est un pugilat général. Que sera-ce quand il s'agira de questions Nationales !
— Mais non ! Mais non ! Laissez-moi terminer de grâce. Dans mon système ceux qui joueraient le rôle des trois Horace et des trois Curiace seraient ceux qui auraient déclaré la Guerre ! Pensez-vous qu'il y en a beaucoup qui la déclareraient ?
Eloi Thibault.
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JEAN BOUCHAUD
PEINTRE VOYAGEUR ET HUMANISTE
Pieds -Noirs d'Hier et d'Aujourd'hui N°194 -Mars 2011
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Jean Bouchaud est un peintre français né à Saint-Herblain près de Nantes en 1891 et mort à Nantes en 1911.
Il est issu d'une famille d'artistes : un de ses grands-pères fut peintre, ami de Corot et d'Harpignies, ainsi que trois de ses frères (Pierre, Étienne Bouchaud et Michel).
Marié à Marielle de Ferré de Péroux, il a eu sept enfants.
C'est un peintre voyageur, à la fois artiste, aventurier et, reporter J. Bouchaud parcourut l'Afrique du Nord, l'Afrique noire et l'Asie.
Ancien de l'académie Julian (dont il devint professeur). Après s'être initié à l'aquarelle en Italie (1909-1912), Jean Bouchaud réalise des croquis au front pendant la Première Guerre mondiale. En 1919, il est démobilisé en Tunisie dont il découvre la lumière. Jeune artiste plein de talent mais sans maître, il est remarqué lors du concours de Rome de 1920 par Maurice Denis et Marcel Baschet, malgré son échec. Jean Bouchaud séjourne ensuite au Maroc où sur une recommandation de M. Baschet, il est présenté au maréchal Lyautey.
Titulaire d'une des deux bourses accordées en 1921 pour devenir pensionnaire de la villa Abd-El-Tif d'Alger (l'autre étant " attribuée à Maurice Bouviolle), il y fait la connaissance de Jean Launois. Il expose au Palais d'été d'Alger "Les Présents au nouveau-né" et "l'Écrivain public". Le sculpteur Paul Landowski s'en porte acquéreur. Par la suite, il participe à l'exposition « le Maroc vu par les peintres contemporains » (Paris). Titulaire d'une bourse du gouvernement de Hanoï. Bouchaud se rend en Indochine (Cambodge, Laos et Viêt Nam d'aujourd'hui) en 1924-25 (Phnom Penh, Angkor, Saïgon, Hué) : il rejoint le Laos à cheval (Vientiane, Luang Prabang descend le Mékong et Hanoi) et s'aventure jusqu'en Chine, où il entre en contact avec les populations lolo à Yunan Fou.
J. Bouchaud obtient la médaille d'or au Salon des artistes français (1928) pour "Laveuses cochinchinoises" (Dalat, en pays Moï). En 1929-1931, Lyautey lui confie la direction artistique (peinture) de la future exposition coloniale de Paris-Vincennes. Il exécute notamment une composition murale de 1300 mètres carrés. En 1932-1933, Jean Bouchaud bivouaque en solitaire au Sénégal, en Guinée, en Côte d'Ivoire et au Dahomey (Bénin). Il se rend en reportage chez les Foulbé et dans les tribus Somba. Il est nommé chevalier de la Légion d'honneur et chevalier de l'étoile noire du Bénin en 1934.
Comme de nombreux artistes, il est sollicité pour la décoration du paquebot Normandie : il décore la salle à manger de luxe (quatre panneaux) (1935) puis le pavillon de la Bretagne à l'exposition internationale de Paris de 1937 (Armor Argoat) et compose pour le grand hall du palais de la France d'outremer à l'exposition internationale World's Fair de New York (1939).
En 1939, J. Bouchaud rejoint les armées comme correspondant de guerre, envoyé spécial de l'Illustration, auprès des troupes coloniales dans la région de Fréjus. En 1942, Il réalise un carton de tapisserie sur le thème « La Bretagne » destinée à la préfecture de Quimper, variante d'Armor-Argoat composée en 1937. Sédentarisé par les évènements, il réalise la "Cour d'Amour au Laos", qui lui valut d'obtenir la médaille d'honneur du salon des Artistes français. Il est nommé peintre de la Marine en 1942.
Peintre aux armées, il participe aux campagnes d'Alsace et d'Allemagne (1944-1945). Après la Seconde Guerre mondiale, Bouchaud réalise la décoration de plusieurs paquebots de la Compagnie générale transatlantique (CGT). Il est nommé par ses pairs membre de l'institut de France, académie des Beaux-Arts (section peinture) en 1951, au fauteuil, de Georges Desvallières. C’est Jean Carzou qui lui succèdera en 1979.
En 1953, il dessine pour la Manufacture nationale des Gobelins un carton de tapisserie « Fête laotienne», inspiré de la "Cour d'Amour au Laos". Il est nommé officier de la Légion d'honneur.
De 1957 à 1964, Jean Bouchaud décore un lycée à Fort-de-France et participe à la décoration murale du lycée Claude Monet de Paris.
Jean Bouchaud s'éteint à Nantes en 1911. En 1978, une rétrospective partielle de son œuvre a lieu au Grand Palais à l'occasion du salon des artistes français. Le musée du Faouët lui a consacré une importante rétrospective d'août à octobre 2005 "Afrique, Asie, Bretagne" qui remporte un vif succès (plus de 10000 visiteurs, cf. site du musée). Le commandement de La marine à Nantes lui a consacré une exposition l'été 2001.
J-M LOPEZ
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Louis Bonaparte jugé par la presse anglaise.
Démocratie pacifique N° 317, 11 novembre 1848
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On lit dans le Morning Herald du 20 novembre :
L'Angleterre prend un vif intérêt à l'élection du président de la République française. Cela se conçoit, si l'on considère que Londres, aujourd'hui à douze heures de distance de Paris,, ne sera peut-être bientôt plus qu'à huit ou neuf heures de cette capitale. Nous suivons d'assez près les choses pour pouvoir être assurés que Louis-Napoléon n'aura pas même la majorité absolue, ou qu'il aura une majorité! Si faible que son élection sera privée du prestige et, de l'autorité qu'elle aurait dû avoir.
Tant mieux, nous aurions considéré l'élection de cet homme comme l'un des plus grands malheurs qui puissent affliger la France.
Nous savons cependant que les légitimistes, qui ont une grande influence dans tous les départements de l'Ouest, et dans la plupart des départements du sud, voteront pour Louis-Napoléon comme transition ; mais les légitimistes oublient que le citoyen Louis-Napoléon se regarde comme le plus légitime entre tous les légitimistes, et, depuis la mort du duc de Reichstadt comme le rejeton pur-sang de la race napoléonienne, l'ambitieuse Hortense avait habitué ses enfants à se considérer, surtout depuis la mort du duc de Reichstadt, comme les héritiers et successeurs de leur oncle.
Aussi, depuis la mort du duc de Reichstadt, en 1834, le prince Louis-Napoléon n'a pas manqué de se mêler à toutes les conjurations, à toutes les tentatives des factions. Elu président de la République, il ne songera qu'au décret du Sénat conservateur du 4 mai 1804, qui a déclaré qu'il est du plus grand intérêt du peuple français de confier le gouvernement de la République à Napoléon Bonaparte, empereur des Français. Ainsi, il se constituera l'un des propagateurs des idées de son oncle, et il tâchera de relever le vieil édifice en ruines, peut-être par les anciens moyens de la conquête et de la spoliation mis en œuvre il y a quarante ans. Que les légitimistes y réfléchissent bien ! Ce n'est pas ainsi qu'ils rétabliront Henri V ; ils n'auront contribué qu'à fonder une dictature ou un empire.
Quant à M. Thiers, il a toujours été bonapartiste de cœur; son Histoire du Consulat et de l'Empire n'est pas seulement l'apologie, elle est la déification du Consulat et de l'Empire. Il est admirateur engoué d'un despotisme brillant qui, en donnant ce qu'on appelle de la gloire à la France, infligerait la honte et l'ignominie au reste de l'Europe. M. Thiers, ami du pouvoir avant tout, ne travaille à renverser le général Cavaignac que parce qu'il n'a rien a en attendre.
Il n'y a pas d'intelligente écrite entre le citoyen Louis-Napoléon et le citoyen Thiers; mais le idem velie et le idem nolle existent entre eux, et si le fils d'Hortense est élu président, on verra bientôt Louis-Adolphe Thiers travailler dj concert avec le prétendant de ' Strasbourg et de Boulogne a la propagation des idées napoléoniennes qui ont prévalu de 1804 à 1814. Sous un tel président, assisté par un tel ministre, ma paix et la sécurité de l'Europe pourraient-elle «subsister longtemps? »
- On lit dans le Morning-Advertiser : « La candidature de Louis-Napoléon n'est appuyée eu France que par les masses ignorantes et les ennemies de la République. Telle est l'ignorance d'un grand nombre de ces paysans que beaucoup croient que le neveu n'est autre que l'oncle lui-même, qui reparaît mystérieusement pour remplir d'argent les poches des pauvres ; d'autres croient que Louis Napoléon dispose de trésors inépuisables.
« L'élection de Louis-Napoléon fournira un argument bien fort contre le suffrage universel. Les amis d'Henri V et du comte de Paris voteront naturellement pour Louis Napoléon, rêvant la Restauration d'une monarchie. L'élection du prince serait le prélude de scènes bien plus terribles que celles dont Paris a été récemment le théâtre peut-être aussi horribles que celles de 1792. Ce ne serait qu'en nageant dans des flots de sang français que le duc de Bordeaux et le comte de Paris pourraient finir par arriver au trône. Dans l'intérêt de l'ordre et de l'humanité nous espérons que le chiffre des partisans du prince Louis-Napoléon sera bien au-dessous de la majorité absolue. »
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HISTOIRE D'HIER
TIDDIS CITE ANTIQUE DE NUMIDIE
ACEP-ENSEMBLE N°285
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INSTITUT DE FRANCE
MEMOIRES DE L'ACADEMIE DES INSCRIPTIONS
ET BELLES LETTRES
André BERTHIER - CORRESPONDANT DE L'INSTITUT
Entre l'activité au temps de l'Empire chrétien et la nouvelle activité des potiers tardifs, c'est un long hiatus qu'il faut placer.
De l'idée d'un long sommeil où Tiddis aurait été plongée pour se réveiller à la faveur d'événements susceptibles de favoriser une renaissance.
Les derniers potiers apparaissent comme des artisans qui ont oublié les techniques savantes de leur art ; sans doute savaient-ils encore obtenir de bonnes cuissons, mais ils ont perdu le secret de la belle couleur rouge orangé et, pour le décor, la naïveté se substitue à la régularité des motifs classiques.
On a d'autres témoins d'un commerce actif. Ce sont de nombreux poids et des balances. La prospérité qu'a pu connaître Tiddis se révèle aussi dans les monnaies dont on a retrouvé plus de dix mille exemplaires. Cette riche collection embrasse toutes les époques.
Les monnaies de l'ancienne Afrique, antérieures à notre ère, peuvent se répartir en trois catégories : monnaies de l'Etat de Carthage, monnaies de villes, monnaies dites numides. On ne saurait s'étonner de trouver des monnaies de Carthage dont la présence s'explique par le voisinage de cette ville puissante. Le numéraire d'autres villes d'Afrique est également représenté : Utique, Hippone, Rusicade, Lol et naturellement Cirta. Le commerce méditerranéen a fait confluer sur Tiddis aussi bien des monnaies d'Egypte que des monnaies espagnoles venues de Bétique ; les monnaies dites numides au type du droit à l'effigie de Zeus et du revers portant un cheval galopant ont été recueillies en nombre considérable, soit par centaines d'exemplaires.
On les trouve constamment mêlées à des monnaies impériales, si bien que l'on est fondé à croire qu'elles ont été frappées pendant longtemps et qu'elles ont toujours eu cours à l'époque romaine. Le lot des monnaies romaines comprend une série du 1er siècle où dominent les monnaies d'Auguste. Les sesterces du second siècle sont relativement rares. Ceux du IIIème siècle sont déjà plus abondants.
Quant aux monnaies du IVème siècle, allant de Constantine à la fin de I'Empire d'Occident, elles se découvrent par milliers.
Le monnayage typique arabe est rare : quelques dirhams almohades et un dinar hafside. En revanche on a recueilli plus de 130 pastilles de verre appelées dénéraux. Tiddis disparaît de la scène historique au cours du XIIIème siècle. il n'y avait d'abord pour le prouver que le dinar d'or émis au nom d'Abou Zakaria (1228-1249), mais grâce aux piécettes de verre qui se rattachent à la période ayyoubite (1174-1254), il est à peu près certain que la vie du bourg s'est maintenue pendant la première moitié du XIIIème siècle.
Le grand nombre des monnaies n'est pas le seul intérêt du médailler de Tiddis. Des monnaies rares dont ne connaissait jusqu'ici que des exemplaires de conservation imparfaite, ont été trouvées et leur bon état dans le lot de Tiddis a permis de donner à ces monnaies une identification qui manquait.
Nous avons été confrontés à trois problèmes : le problème de I'abondance des monnaies dites numides, le problème de I'abondance des monnaies d'Auguste, le problème de la surabondance des monnaies du IVème siècle,
Pour le premier problème, nous sommes arrivés à la conclusion suivante : en attribuant les monnaies dites numides aux Puniques de Constantine, on comprend l'importance de leur circulation qui reflète une forte activité commerciale s'étendant sur tout le littoral méditerranéen jusqu'au Maroc et atteignant même l'Europe.
Toutefois cette masse de numéraire n'aurait pas été suffisante pour perdurer à l'époque romaine s'il n'y avait pas eu continuité de frappe sous cette même domination. Cette faculté d'émettre un monnayage local ne peut s'expliquer que dans le cadre de l'autonomie accordée à Cirta, devenue colonie romaine, autonomie attestée par l'organisation si particulière de la Confédération des IIII Colonies.
L'influence romaine se fait sentir brusquement et avec force sous Auguste. C'est là une donnée fondamentale de I'histoire de Tiddis révélée à la fois par la statistique des monnaies et la statistique des lampes. Dans le catalogue des lampes qui comprend actuellement 763 numéros, les lampes à volutes sans anse constituent un lot de 96 unités. Ce chiffre prend toute son importance si on le compare aux 54 lampes à bec rond et incision horizontale du IIème siècle et aux 18 lampes à bec rond et incision en forme de cœur du IIIème siècle. Dans la statistique des monnaies, on compte 74 pièces à I'effigie d'Auguste, alors que pour retrouver une semblable quantité, il faut additionner les 20 monnaies d'Hadrien, les 33 monnaies d'Antonin et les 16 monnaies de Marc Aurèle.
Ces deux séries de documents - monnaies et lampes - unissent leur témoignage pour laisser pressentir qu'il s'est passé un événement particulièrement important sous le règne d'Auguste et on songe à la fondation de Colonia Cirta.
Dans le Corpus Nummorum de J. Mazard, le monnayage de Cirta est partagé en deux grandes séries : les monnaies à légendes puniques et les autres - dites au titre de Sittius - à légendes latines. C'est dans ces deux séries que Tiddis a apporté, grâce à de bons exemplaires, une lumière qui faisait tout à fait défaut. Dans la série à légendes puniques, nous avons pu vérifier que, sous les deux noms de Bodmelkart et Hanno, il fallait reconnaître des suffètes.
D'autre part, dans la série à légendes latines, toujours grâce à de bons exemplaires Tidditains, nous avons pu prouver que dans l'effigie du droit, ce n'est pas un portrait de P. Sittius le condottiere qu'il fallait reconnaître, mais celui d'Auguste. Les exemplaires du Cabinet des Médailles de la Bibliothèque Nationale sur lesquels les examens avaient porté, sont en mauvais état. La gravure de la tête est rongée et les dessins des catalogues de L. Charrier et de J. Mazard durcissent les traits à plaisir pour tenter d'évoquer le visage du condottiere, l'ami de César. J. Mazard soutient que les deux séries du monnayage Cirta sont à placer à des époques différentes. En revanche, nous avons donné les raisons qui permettent d'établir que les deux frappes sont concomitantes et qu'elles commémorent ensemble la fondation de la Colonia Cirta.
La surabondance des monnaies du IVème siècle nous a fait avancer l'hypothèse que ces monnaies avaient encore cours en plein Moyen Âge musulman. Il faut rappeler ici qu'il n'a été retrouvé à Tiddis que de rares pièces musulmanes ; celles-ci sont uniquement en argent et ne peuvent être considérées comme la monnaie courante remplaçant les pièces romaines antérieures. Nous avons étudié les dénéraux à la suite des monnaies. Toutes les hypothèses ont été émises sur l'utilisation de ces pastilles de verre qui gardent encore leur secret.
Le grand nombre des monnaies de Tiddis dénote une forte fréquentation. Et parmi les gens qui étaient nombreux à venir au castellum, ne peut-on pas penser aussi aux pèlerins ? C'est que les sanctuaires se signalent par leur quantité et par leur importance.
Sur ces sanctuaires qui constituent un ensemble impressionnant, on peut faire trois remarques principales, concernant la grande surface qu'ils occupent dans le périmètre urbain, la singularité du plan de certains édifices et, pour la majorité d'entre eux, une obédience religieuse punique, tandis que les cultes associés aux grottes sont fondamentalement berbères.
Les sanctuaires envahissent le plateau depuis son rebord méridional jusqu'à la cime. Ils s'étagent sur le flanc nord de la colline depuis les grottes voisines de la porte de Memmius jusqu'au sommet, sans solution de continuité pourrait-on dire. Ils s'étagent également sur le flanc sud-est depuis la grotte de Vesta jusqu'au complexe des Cereres. Ils constituent le principal ensemble monumental de la petite cité et convertissent la colline en sainte montagne.
Les sanctuaires les plus importants montrent dans le relevé de leur plan une originalité telle que nous n'avons pas pu établir des rapprochements avec des monuments culturels de la vieille Afrique, Les sanctuaires de Vesta, des Cereres, l'édifice à abside du plateau, l'ensemble comportant une double salle et les constructions culturelles du sommet sont sans équivalence.
La vie religieuse à Tiddis est inaugurée par les dolmens. On trouve ensuite ou en même temps le culte des grottes. Dès i'époque mégalithique le plateau de Tiddis a été un haut lieu consacré.
Des rites funéraires plus complexes ont été observés au pied de la montagne dans la nécropole Libyque et dans le groupe de bazinas bordant la rampe d'accès à la porte Nord.
Aux grottes était attachée la croyance aux génies et ces génies portaient des noms. Nous avons cru pouvoir retrouver Bacax auquel se sont ajoutés Midon et le possible Giddaba.
Sur les vases modelés et peints des bazinas, on constate la présence d'astres et particulièrement du soleil. Or le culte du soleil par les anciens Africains est révélé par Hérodote. L’aspect solaire et lunaire du culte de Baal Hammon correspondait donc aux vieilles croyances africaines et les Berbères Tidditains se trouvaient disposés à accepter les divinités de Carthage.
Mais le conservatisme était aussi un des traits de leur caractère
Constantine, où fut retrouvé un "tophet" remontant au IIIème siècle avant notre ère, avait été un foyer d'irradiation de la religion des grandes divinités de Carthage : Baal Hammon et Tanit. A Sigus, aussi bien des stèles avec écriture paléopunique que les pièces les plus anciennes du mobilier de la nécropole, attestent une punicisation ancienne et rapide. A Tiddis, on sent une opposition. Pas d'écriture punique ancienne, mais une douzaine d'inscriptions néopuniques sont une nouvelle preuve du conservatisme berbère. Les populations qui pratiquaient les rites d'ensevelissement collectif dans des monuments circulaires avec dépôts de poteries modelées peintes, semblent avoir résisté à l'adoption de rites funéraires impliquant la calcination des corps.
Le passage des bazinas aux incinérations n'a pas accompagné le premier apport de céramique importée. On dut accueillir les marchands avant d'écouter la voix des missionnaires et cette résistance semble s'être prolongée pendant un siècle et demi. Ce n'est qu'au milieu du 1er siècle avant notre ère que la conversion se produisit. Une nécropole néopunique a surtout livré des lampes à volutes dites augustéennes.
La religion punique n'effaçait pas les croyances des Berbères, mais leur donnait une forme plus élaborée. Les Tidditains embrassèrent dans le culte de Baal et ils y restèrent attachés durant toute l'époque romaine - où Baal s'est appelé Saturnus - et ils semblèrent marquer une certaine opposition à la religion du Christ au temps de l'Empire chrétien.
Saturne fut intronisé sur le sommet même de la montagne dominant la zone rocheuse où une foule pouvait se rassembler.
On retrouve des vestiges du culte de Saturne au voisinage de l'aire rocheuse et au sud de celle-ci. Nous avons exprimé nos regrets d'avoir dû interrompre les fouilles dans ce secteur. En effet, la découverte de piliers devant soutenir les petites statues des Comites Saturni laissait croire à I'existence d'une importante construction abritant le groupe formé par Saturne, flanqué de ses acolytes qui étaient Sol et Luna, ou bien Castor et Pollux.
S'il y a un édifice important qui reste encore enseveli sous les terres à cet endroit, on a mis au jour dans le voisinage immédiat une construction comportant deux salles et nous avons pu imaginer que celles-ci servaient à l'accomplissement des rites d'initiation.
Ainsi le plateau est comme envahi par les témoins du culte de Baal-Saturne, mais sur sa bordure on a retrouvé des ensembles culturels considérables et complexes se rapportant à des cultes d'obédience punique. C'est d'abord le cas pour le sanctuaire des Cereres, où il faut reconnaître les Ceres de Syracuse, Demeter et Koré, les deux déesses thesmophores dont le culte fut adopté par Carthage dès le début du IVème siècle avant J.C.
La question se pose de savoir s'il faut relier à cette même influence punique le vaste bâtiment à abside mis au jour sur le même plateau, où s'il s'intercale entre le sanctuaire des Cereres et l'ensemble des installations culturelles consacrées à Saturne. Le bas relief figurant une divinité et qui aurait dû nous renseigner complètement sur la destination de l'édifice, ne porte malheureusement sur I'inscription que l’initiale A, du dieu. Le nom Aesculapius reste possible, mais il faut comprendre un Esculape associé à Caelestis et en qui il convient de voir le dieu punique Eshmoun.
Sur le rebord oriental du plateau, on retrouve des témoins de cultes inspirés par la religion de Carthage. On y découvre l'alliance d'Hercule et de Liber Pater qui est un fait religieux bien établi en Afrique. Et dans le syncrétisme africain, Hercule est l'héritier de Melkart et Liber-Bacchus celui de Shadrapa.
Tiddis fut atteinte par le courant mystique qui avait recouvert le monde romain du IIème au IVème siècle.
On y a découvert un mithraeum et un metroon placés côte à côte. Cybèle figurait près de Mithra dans une communion intime qui unissait le dieu iranien à la déesse phrygienne.
C'était une manière de se concilier les prêtres de la Magna Mater. Cybèle présentait, en effet, de profondes affinités avec Caelestïs.
Les Tidditains n'étaient pas ignorants de la religion romaine proprement dite, mais ils n'ont pas élevé de sanctuaires aux dieux du panthéon romain, alors qu'au chef-lieu Cirta, on avait honoré Jupiter, Minerve, Pallas, Vénus, Apollon et Mercure. Rien de tel à Tiddis où, tout à coup cependant, apparaît Vesta. Mais on n'a pas bâti spécialement un édifice pour cette déesse ; on s'est servi d'une grotte naturellement percée dans un haut rocher arrondi et nous avons pu vérifier que le culte de Vesta remplaçait à cet endroit le culte de kllus Mater assimilée à Ceres. Nous avons pu avancer l'hypothèse que l’introduction de Vesta à Tiddis avait été tardive et due à l'initiative du consulaire Publilius Ceionius Caecina Albinus qui, à la fin du IVème siècle, a fait un effort de restauration païenne sous le regard de l'empereur qui ne s'y opposait pas. La mesure consistant à installer des Vestales à Tiddis avait un double intérêt : donner un gage au vieux conservatisme berbère tout en affirmant la préséance de Rome. Ce conservatisme berbère qui s'est en quelque sorte opposé aux dieux du panthéon romain, va encore se manifester lace au développement du christianisme. En effet. Dans l'exercice de son culte, le christianisme semble n'avoir été suivi que tardivement par les Tidditains. Nous n'avons mis à jour qu'une simple petite basilique faisant face à la grotte mithriaque et ce n'est qu'à la fin du Vème siècle qu'on trouve mention d'un évêque Tidditain.
Quand nous avons parlé des potiers, nous avons insisté sur le spectacle du dernier état de la ville avant son complet abandon et c'est dans le "quartier des potiers" qu'il est le plus saisissant, Les fours sont implantés dans une zone ruinée ; certains sont construits au milieu d'anciennes voies, d'autres à l’intérieur des maisons d'habitation jusqu'à occuper un caldarium privé dont les dalles d'hypocauste ont été arrachées. Plus étrange encore est la conversion en ateliers de potier d'huileries abandonnées. N'a-t-on pas réutilisé les pierres de contrepoids des treuils comme simples matériaux de construction !
On imagine un terrible cataclysme ayant frappé durement les ruraux après avoir provoqué le massacre des oliveraies. Bien plus, ce désastre, dont les manifestations sont si visibles, semble avoir entraîné la désertion de Tiddis pour une période assez longue. Le haut remblai qui remplissait les maisons détruites et au-dessus duquel on a bâti des fours, indique bien un long temps d'abandon.
Quant à la reprise d'activité, elle est nettement liée à un habitat médiéval. Cet habitat médiéval a été reconnu sur le plateau où il se place sous la protection du rempart qui a lait l'objet de grosses réparations.
Dans cet habitat médiéval, on rencontre des poteries produites par les fours tardifs, mêlées à une céramique vernissée typiquement musulmane. Un essor économique est attesté par l’importante série de dénéraux, dont le lot récolté sur le castellum est de beaucoup plus important qu'un seul chantier ait jamais livré en Afrique du Nord. De l'étude exhaustive faite par P.A. Laïly, il ressort que la majorité de ces pastilles de verre doit être placée à la fin du Xème siècle et au XIème siècle.
Le Xème siècle est celui des Fatimides. Leur berceau se place dans une région voisine de Tiddis, la Petite Kabylie, dont les monts barrent l'horizon lorsqu'on est sur le bel observatoire qui couronne la colline tidditaine.
Lorsque l'armée des Kotama, au début du Xème siècle, est descendue du djebel pour assurer le destin de la nouvelle dynastie, elle dut nécessairement occuper les premières villes du piémont. Mila d'abord, puis Constantine, sans négliger les castella. Les chefs de cette armée ont été dans la nécessité de réorganiser économiquement et administrativement le pays qui devait leur servir de base logistique, avant que leur épopée ne les conduise successivement en Tunisie, puis en Egypte.
Tout au début d'un épisode qui allait par choc en retour provoquer l'arabisation de la région de Constantine, les populations se trouvaient encore dans la ligne de la tradition antérieure. Ce sont des Berbères latinisés qui seuls pouvaient participer à la renaissance économique.
La survivance de la langue latine au Moyen Âge n'est pas un fait isolé et le maintien d'îlots chrétiens en Afrique notamment aux Xème et XIème siècles, est une donnée acquise. Nous avons même pu faire mention de la relation d'un marchand qui affirme qu'au XVème siècle, on parlait encore un bon latin dans les Aurès et dans les Nemencha.
Ce qui nous a étonné, c'est de n'avoir jamais trouvé à Tiddis des témoins de l'usage de la langue arabe par les habitants de la petite cité. A côté de la vingtaine d'inscriptions libyques, de la douzaine d'inscriptions néopuniques, des centaines de textes latins, il n'y a pas une seule inscription en langue arabe portant le reflet d'un acte populaire. Les lettres arabes n'apparaissent que sur les monnaies et sur les dénéraux, c'est-à-dire sur des témoins officiels d'une administration de direction arabe. En bref, nous n'avons trouvé aucune preuve de la conversion des Tidditains à la religion musulmane.
C'est que Tiddis fait partie de la grande portion de l'Algérie qui a longtemps échappé à la première domination arabe.
Quand, au IXème siècle, les Aghlabides sont les maîtres incontestés de l'Ifriqiya, soit la Tunisie, le pays situé à l'ouest, tant l'Aurès que la petite Kabylie, est resté indépendant. "Ce gros massif (Aurès), écrit M. Vonderheyden, aujourd'hui presque entièrement berbère, avait toujours été un îlot indigène irréductible...
Théoriquement soumis aux Arlabides, les Aurasiens étaient en fait indépendants et terrorisaient leurs voisins.
Négligeant la bordure sud, désertique, les Arabes leur opposèrent sur le versant nord les forteresses de Baraïa et de Belezma. Il n'est pour ainsi dire pas question d'eux dans I'histoire Arlabide, du moins implicitement. Ils ignorent l'organisation politique et religieuse de l'Etat qairouanais. Les Aurasiens ne connaîtront les Qadis que de nos jours. C'est nous qui les leur avons apportés.
Et la Petite Kabylie elle aussi est restée dans le même temps indépendante : "Toute la Petite Kabylie échappait, dans la pratique, aux Arlabides. Le massif qui s'étend de Bougie à la Seybouse et des Hauts-Plateaux à la mer était le domaine de la puissante tribu des Kotama. Difficilement accessible, cette région n'avait pas été assaillie par les Arabes qui se gardèrent d'y pénétrer.
Cette analyse de la situation politique au IXème siècle montre bien qu'entre l'administration byzantine et l'administration fatimide il y a un hiatus, C'est dans cette longue période obscure qu'on est tenté de placer les graves événements qui ont dévasté le bourg de Tiddis, tandis que les victoires des Fatimides expliquent la renaissance du Xème siècle dans la région de Constantine.
Marçais a bien noté l'hostilité des Berbères qui réagissent contre l'oppression fiscale et les nouveautés religieuses qu'on veut leur imposer.
Depuis le début des invasions arabes du VIIème siècle, il faut compter 500 ans, avant qu'une mosquée soit bâtie sur le rocher cirtéen. Il faut attendre ensuite près de 400 ans pour voir la réalisation d'un vaste programme de construction d'édifices religieux musulmans à Constantine. Cela ne s'est produit que dans le cours du XVIIème siècle, sous l’influence turque, à l'époque où les beys fastueux du Beylik de l'Est étaient presque indépendants du gouvernement d'Alger.
En rappelant que les derniers documents attestant une activité à Tiddis se réduisaient à un dinar d'or, émis au nom d'Abou-Zakaria et à la douzaine de généraux de la période ayyoubite, ce qui nous rattache à la première moitié du XIIIème siècle, l'histoire de Tiddis se termine avant qu'une véritable arabisation ait pu toucher la région en y diffusant la langue et la religion de l'Islam.
On se trouve à Tiddis dans un milieu berbère très traditionaliste. Les vieilles croyances, qui remontent à l'époque des dolmens, se sont perpétuées dans le cadre de la religion punique qui leur apportait un développement sans toucher à leur fondement. Le culte du soleil et de la lune, l’idée d'une survie, restaient les principes fondamentaux.
A travers l'Empire romain, les vieilles croyances n'ont pas été abandonnées au profit du panthéon de Rome dont les grands dieux n'ont pas été célébrés.
Au temps de l'Empire chrétien, il y a eu d'abord une résistance à la religion du Christ. Nous avons cru pouvoir faire intervenir saint Augustin lui-même pour reprocher aux Tidditains leurs anciennes pratiques et notamment le culte des grottes. Quand une communauté chrétienne s'est formée, elle a été prise d'un zèle anti-païen qui s'est manifesté par la mutilation de tous les visages des dédicants figurés sur les stèles à Saturne.
Nous avons souligné qu'on n'a pas trouvé à Tiddis des manifestations de soumission à l'Islam.
Et les vieilles croyances n'ont pas disparu de nos jours, où on retrouve le sacrifice du mouton, le respect des marabouts, la fête des vautours et même dans les bois sacrés l'accomplissement de rites agraires.
On ne trouvera pas à Tiddis la somptuosité de Timgad ou de Djémila. Dans un cadre urbain plus restreint, il faut y rechercher la vie d'une modeste bourgade. Mais l'activité des artisans et la pluralité des collèges religieux ont donné à ce bourg son originalité et son intérêt qui sont considérables.
C'est à Tiddis que l'on peut le mieux étudier sur un même site la succession des civilisations depuis les temps mégalithiques jusqu'au Moyen Age. Cette leçon du passé, le simple visiteur saura l'entendre en étant saisi par le cadre pittoresque d'une montagne étonnante.
Quant au chercheur, sans oublier l’incomparable beauté du paysage, il aura la joie d'y découvrir le plus merveilleux laboratoire. C'est là qu'il trouvera les éléments susceptibles d'aider à la solution de problèmes fondamentaux qui importent au plus haut point à l'histoire de l'Algérie antique et médiévale.
Par la masse énorme de sa montagne, Tiddis a bravé le temps avec des matériaux éternels, ses rochers. Au milieu d'eux, se dressent encore les constructions, œuvres des hommes. Tiddis n'est pas écrasée par le poids des souvenirs.
Ses terrasses formant comme d'immenses degrés, proposent une ascension vers le ciel, comme si on pouvait y monter par une immense échelle. Aux hommes qui aspirent à un destin éternel, Tiddis offre un message d'espérance, Ses ruines, comme de grandes blessées pathétiques, rappellent sans doute que les civilisations sont mortelles. Mais, par-dessus l'angoisse des âges, leurs membres amputés sont comme autant de mains suppliantes pour une prière qui n'a jamais cessé de monter des sanctuaires Tidditains.
FIN
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La gymnastique à Oran
PNHA- N°194 - N°194-Mars 2011
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Ce sont les disciplines vulgarisées à Oran par le cirque "Benayon", notamment celle de la gymnastique qui, dès avant 1914, firent la renommée tant de I'Oranaise que de la Concorde.
Basées principalement sur la force, elles demandent une application et une assiduité inlassables.
Aussi, à mesure de I'extension des sports d'équipe exigeant des qualités beaucoup moins contraignantes, les jeunes furent de moins en moins attirés par les disciplines en question, par ailleurs peu propices à I'improvisation.
Grâce aux exploits individuels, entre les deux guerres mondiales, de Torrès Marcos, Edouard Bensaïd, Jacques Bensadoun, Jean Martinez (dit Martinico), Gilbert Pacifico, François Cocorullo, Oran conserva une place de premier plan qui lui permit de témoigner d'une supériorité assez nette dans le concert nord-africain.
Mais la ligue d'Afrique-du-Nord, tombée pratiquement en sommeil en 1940, ne reprit que par étapes une activité normale.
Souffrant alors d'une insuffisance en cadres et d'un manque de compétitions, voire d'encouragements sérieux, réduite aux deux clubs fondés dans la seconde partie du XIXème siècle, la pratique de la gymnastique ne dut sa survie qu'à la foi de quelques anciennes vedettes : Bensaïd, Camy, Costa. Et ce furent deux vétérans, dans le lointain championnat d'Afrique-du-Nord en catégorie pupilles, Martinico et Cocorullo qui lui donnèrent un certain brillant dans les compétitions interrégionales. Un autre Oranais, Maurice Benaïm, momentanément affilié à I'U.S. Métro à Paris, plusieurs fois sélectionné dans l'équipe de France, se tua à I'entraînement lors d'une sortie de barre fixe privant sa ville natale de son appoint.
Peu à peu, profitant des conseils de leurs anciens, de solides espoirs parurent en mesure de reconquérir pour la gymnastique oranaise, son lustre d'antan. Pareil optimisme n'était nullement exagéré car ces jeunes disposaient par surcroît de la salle Marcel Cerdan pouvant recevoir un public numériquement convenable, d'une part, et bénéficiant sur le plan technique, d'un moniteur diplômé en 1957 de l'LN.S., Benghozi, d'autre part..
Celui-ci et Cocorullo s'affirmaient encore cependant comme les deux meilleurs spécialistes du Comité d'Oranie.
Parallèlement à celle des Oranais, l'émulation gagna I'intérieur de la province et, à partir de 1949, un concours fédéral régional fut annuellement organisé avec un succès croissant. Les villes d'Aïn-Témouchent, Mostaganem, Relizane et Tlemcen tirèrent avantage de ces dispositions sur le plan gymnique.
Lorsqu'il eut à charge I'organisation du championnat d'Afrique-du-Nord de 1955, fixé à Aïn-Témouchent, le Comité d'Oranie comptait 6 clubs avec un total de 520 licenciés. La gymnastique oranienne était donc bien sur la voie en vue de recouvrer son prestige. La participation de 750 concurrents aux épreuves, la faveur d'une fraction de l'élément sportif féminin à cette discipline grâce au Club Omnisports féminin, entrèrent dans le cadre de cette résurrection latente.
Malencontreusement par suite de I'indépendance accordée aux 2 protectorats voisins le Comité d'Algérie se substitua à celui nord-africain.
De la sorte, en 1958, le championnat d'Algérie fut fixé à Oran, salle Marcel Cerdan, sans la participation de la délégation constantinoise, en raison des événements. Si, dans I'ensemble, I'Algérois Mohamed Lazhai se révéla le meilleur, ne manquèrent pas cependant d'éclat les victoires de Benghozi et de Cocorullo. Celui-ci, à 44 ans, enleva la première place, I'année précédente, aux championnats internationaux de Naples.
Car l'Oranaise, renouant avec la tradition et compte tenu des perturbations occasionnées pour le déroulement de compétitions nord-africaines, déplaça outre-Méditerranée, à plusieurs reprises, ses meilleurs éléments dès 1956, bien que la plupart d'entre eux lussent encore juniors.
Cette initiative lui valut de remarquables résultats notamment aux concours régionaux de Moulins (1956) et de Montchanin (1959). Sur le plan strictement national I'Oranaise prit en 1959 la quatrième place en catégorie excellence (16 athlètes).
Pour les optimistes, la période prestigieuse de I'Oranaise allait se renouveler. Mais les circonstances trop défavorables freinèrent fortement I'essor. Le club centenaire affirma cependant jusqu'au bout sa volonté de surmonter le destin. Sa foi en l'avenir ne se manifesta-t-elle pas le 29 avril 1962, après les accords d'Evian par la mise en compétition d'un challenge inter-sociétaires concernant adultes et pupilles distinctement dans 3 catégories: hommes, dame, débutants?
Durant plusieurs décennies, pour les Oranais, le club doyen fut avant tout un merveilleux échafaudage humain d'une vingtaine d'exécutants dont les succès les plus retentissants furent obtenus sous la direction de I'international Antoine Costa tandis qu'au sommet se hissait un autre international, Martinico.
P. O.
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Un brin de mémoire ?
Envoyé Par M. Robert Puig
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Je cherche ce qui inspire ou guide nos politiciens modernes qui aujourd'hui prêchent le wokisme, le communautarisme, le salafisme et la fin de la religion chrétienne qui guide nos pas et nos espoirs en ce XXIème siècle. Je ne trouve rien qui m'inspire sinon la honte de ce cet égoïsme qui guide les pas de ces élites (?) vers une fin de Vème Constitution et le chaos.
Souvenons-nous ! Peint en 1830, le tableau de Delacroix représentait une femme la poitrine dénudée et brandissant le drapeau tricolore comme ce besoin de liberté dans la marche de notre France. C'était la Marseillaise, l'espoir ! Un chant et une espérance qui semblent disparus de nos jours. L'assemblée nationale n'a plus les représentants du peuple qu'il faut. Juste des sectes aux idéologies funèbres comme l'extrême gauche mélenchoniste, les écologistes et même le parti socialiste qui s'agrippent au pouvoir sans tenir compte des aspirations du peuple. Les tiraillements qui secouent cette assemblée est le signe d'une maltraitance du peuple qui ne compte pas pour ceux qu'il a élus, souvent par défaut lors d'élections où sont unis et Mélenchon et Attal et le macronisme malade de ses ratages dans le pays, l'Europe, le Monde et LFI. Nous vivons cette Apocalypse.
Nous sommes loin de la révolution où alors la prochaine s'annonce terrible, avec un horizon plein de déshonneur et de honte. La France d'aujourd'hui ne correspond plus à cet élan de liberté et d'honneur des siècles anciens. La prétention des uns et des autres, le wokisme et le communautarisme des banlieues ont tué l'envie d'être un grand pays. Par ses présidents de la république successifs, surtout le dernier, il n'y a que du mépris, de l'arrogance pour désigner la population. Elle est la marionnette sous la coupe des médias gauchisants, de partis politiques dédaignant le peuple. Il semble que même ceux qui devraient être les meilleurs ne cherchent que l'affrontement, l'échec, pour ruiner un pays malade de sa mauvaise santé financière et de ses députés.
Je ne sais pas si demain un gouvernement existera et de ce fait, je ne sais pas si demain la France sera toujours la France ou sous l'empreinte d'un monde nouveau, d'un passage à tous les excès, les pires turpitudes et l'ouverture au monde d'Orient comme le souhaitent LFI et la tendance arrogante d'Emmanuel Macron qui depuis 2017 n'a joué que la fin de notre république.
C'est triste ce monde ! Il nous manque un Delacroix pour peindre la liberté d'un pays qui pour le moment tangue et se perd.
Robert Puig 2/12/2024
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MON PANTHÉON DE L'ALGÉRIE FRANÇAISE DE M. Roger BRASIER
Créateur du Musée de l'Algérie Française
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A SUIVRE
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GUÉGUERRES
De Jacques Grieu
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« Pour assurer la paix, on prépare la guerre »,
C’est là sage opinion, arguent les grands experts.
Pourtant, si l’ennemi applique ce principe,
La paix contre la paix, une guerre anticipe !
Car dans toutes les guerres, on sait bien qui commence :
« Ce n’est pas moi, c’est l’autre ! ». Et c’est une évidence.
On déclare souvent « qu’on est sur pied de guerre » ;
Lequel est ce pied-là ? Le gauche ou bien son frère ?
Certains hommes brillants sont dits « foudres de guerre » :
Ni barrique ou tonneau, pourtant, n’ont à y faire…
« La guerre intestine » est une autre invention,
Mais que ne vient troubler aucune digestion…
La guerre des boutons est chose fort sérieuse :
C’est l’Ecole de Guerre ! Et aussi dangereuse…
La guerre, c’est la guerre et quel que soit son nom ;
Guerre froide ou éclair, des nerfs, de religion…
Entrer en « guerre ouverte », est-il moins condamnable ?
Une guerre « fermée » serait plus acceptable ?
« Paix injuste vaut mieux qu’une guerre fort juste » ?
Car déclarer la paix, plus aisément s’ajuste.
La guerre, on peut la faire au moment que l’on veut
Mais pour la terminer, on le fait quand on peut.
Combattre pour la paix est donc « de bonne guerre » ?
La guerre pour la paix est celle qu’on préfère…
Celui qui veut la guerre est en guerre avec soi :
C’est une maladie qui vous tue bien des fois,
Comme une épidémie qui s’étend et foudroie.
Une injection de paix sauve certains, parfois.
Le vrai vaincu des guerres est celui qu’on enterre :
Car de guerre joyeuse, on sait qu’il n’y a guère…
Jacques Grieu
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La raison ou la tutelle ?
Envoyé Par M. Robert Puig
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Nous sommes au matin d'une décision cruciale. La fin du gouvernement de Michel Barnier et le chaos ou la continuité dans un état lamentable du parlement suite à la décision d'Emmanuel Macron de dissoudre ce parlement ?
Il est un fait. Marine Le Pen prend une position véritablement dangereuse en ce 4 décembre 2024. Mais ne faut-il pas comprendre son ressentiment contre des partis politiques qui ne voulaient pas des voix de plus de 11 millions d'électeurs ? Le parlement inconscient a éliminé toute possibilité du RN de s'exprimer. Ne parlons pas du LFI et des écolos socialistes dont Hollande a été le pire durant son mandat, mais parlons aussi de cette droite de Laurent Wauquiez et cette macronie de Gabriel Attal. TOUS unis contre 11 millions d'électeurs pour que le RN n'obtienne aucun poste dans le parlement. TOUS unis pour que le RN n'existe pas au niveau national à ce point que pour les élections législatives, Attal s'est uni - une habitude - à Mélenchon pour que le RN ne puisse avoir de députés assez nombreux pour prendre le pouvoir. Il faut comprendre que sur ces options anti républicaines et voulues par le groupe du centre de Bayrou à Attal et Wauquiez, il n'y a eu que le rejet systématique d'une partie du peuple.
Ne l'oublions pas, la raison se doit d'être rationnelle et ... raisonnable. Elle est propre à l'humain affirme, René Descartes mais est-elle sans pulsion ? Des orties que l'on ne peut avaler ! Ils sont combien à évoquer la raison, de Montaigne à Nietzsche ? Mais, Emmanuel Kant l'affirme, "Faut-il rester dans un état de tutelle ?" En fait, face à la raison, ne pas tenir compte des événements, des marques de respect de l'autre ou de rejet, de mépris et d'une propagande socialo-progressiste qui nous mène au dit chaos ? Que parlent Barnier et Retailleau dans un ultime sursaut anti censure est-ce "raisonnable", alors que le RN cherchait depuis longtemps à se faire admettre comme interlocuteur valable, sans jamais être entendu ?
C'est sans doute ce doute qui tenaille le RN. Va-t-il plier et se rendre sans voter la censure ce soir ou aller au bout de sa décision initiale parce que finalement de Macron, Attal et la vieille droite d'Olivier Marleix et Laurent Wauquiez, notre pays est en danger à force de cacher au peuple la vérité sur son histoire, la vérité sur cet étrange monde ou le "chef", le président, voyage alors que la France est à la peine ?
Je suis troublé de cette décision du RN mais d'un autre côté faut-il que toujours une partie du peuple soit éliminée de la gestion de la France par racisme progressiste, par mépris et haine de la moitié du pays.
Robert Puig. 4/12/2024
La raison ou la tutelle - ( Suite 1)
5 décembre 2024
Marine Le Pen a choisi. Elle a choisi le combat contre la haine de LFI et des socialistes, le mépris des troupes de Macron et de ce dernier carré des soumis au macronisme de Wauquiez. Elle a choisi, et c'est à son honneur, de redonner au pays une première place qu'il a perdu avec le présent président. Elle ne demande pas son départ - en est-il capable dans l'honneur ou son orgueil démesuré l'aveugle-t-il ? - mais VEUT le mettre face à ses responsabilités de semeur de troubles, de dé constructeur du pays.
Comprendra-t-il le message ou continuera-t-il à poursuivre, avec une sorte de voracité inquiétante, la destruction de la France avec un déficit astronomique, un rôle de plus en plus terne en Europe, le refus de l'Afrique de nous considérer comme un partenaire fiable, puis ce mauvais esprit de faux guerrier qui le pousse à se lancer dans une guerre que de moins en moins de pays veulent soutenir, l'Ukraine contre la Russie.
Oui ! Marine Le Pen a eu raison, sans tenir compte de qui venait la censure, de ne plus accompagner Michel Bernier. Il avait une bonne presse mais il s'est enferré avec Wauquiez dans un raisonnement de soumis aux éléments de "Renaissance". Il n'a vue que l'augmentation des charges aux entreprises, aux travailleurs et aux retraités et pas la façon de réduire l'endettement national. Comment freiner et amendé, diminué les coûts du fonctionnement de l'Etat ? Il a fait du "Macron" et non plus une politique de redressement de la Nation, au grand plaisir des valets du pouvoir dont Attal reste le majordome et Laurent Wauquiez le soutien.
Nous le savons tous et c'est ce que je reprends dans mon prochain livre à paraître chez Edilivre Paris, : "Danger !" - Essai sur un pays qui tangue -. Nous sommes loin de la France responsable et fière de son passé, de son rôle de colonisateur émérite, de son histoire.
TOUT va à vau-l'eau et il n'y a pas qu'un coupable. Ils sont plusieurs dans le camp du tandem Hollande Macron et du progressisme socialisant, à la fois cyniques dans leurs "exploits" avec cette soumission indigne à l'étranger, tout en prenant le peuple pour une vache à lait obéissant et résigné. Il faut faire attention ! Les Gilets Jaunes ont cru en l'Élysée. Ils ont été "marrons". Les agriculteurs ont cru en un Attal prenant pour bureau une botte de foin pour pérenniser la mise en scène de sa présence et faire des promesses. Ils se sont fait avoir et reviennent à la charge.
Depuis des années la population française a vécu en espérant le changement. Rien n'a été fait. Rien n'a changé. Pour Marine Le Pen, sans doute ai-je écrit que le choix face à ses partisans a du être difficile, mais c'est le bon choix. Onze millions d'électeurs et de plus en plus nombreux sympathisants, cela compte.
Robert Puig – 05/12/2024
La raison ou la tutelle? Suite 2
"IL" a parlé. Contre vents et tempêtes, il maintient son cap et continue ainsi à conduire le pays sur une route sans issue. Bien entendu, il a raison. Une majorité de votants l'ont élu par deux fois. Savaient-ils bien ce qu'ils faisaient ? La propagande anti FN et la multitude des gauches dont Mélenchon ont voté pour sa réélection... Sans doute que le RN et Marine Le Pen n'étaient pas encore préparés à une victoire. "IL " en a profité. Pourquoi faire ? Hors ses nombreux voyages pour rien, sinon parfois pour envenimer les relations existantes, il a agi sans gestion ni organisation et le pays se retrouve avec plus de 3200 milliards de dettes. Sur un fait, Il a raison. Elu par la volonté du peuple, il peut aller au bout de son mandat. C'est la loi et la Constitution; Pourtant, ne se rend-t-il pas compte de toutes ses erreurs ? Son mépris, son arrogance pour le peuple et par exemple pour les pays africains. Ses mots douteux qui font que nous perdons nos vieilles alliances africaines, mais sa soumission à l'Algérie FLN. Bien entendu, il a parfois fait des distributions, des aumônes au peuple français, mais se doutait-il qu'un jour, il faudra rembourser toute cette manne distribuée ? Regardons nos entreprises. Elles mettent des travailleurs au chômage. Elles licencient à tout va et à cause d'une écologie qui a fait fermer nos cites nucléaire pour se soumettre aux Allemands, nos usines tirent le rideau, ne pouvant plus supporter une hausse importante des charges diverses dont l'électricité, pour faire tourner les machines. Pourquoi n'a-t-il pas pris depuis ces 7 à 8 ans de mandat des mesures fermes pour empêcher l'UE de se vendre au Mercosur sud américain ? Il a laissé faire et maintenant, trop tard, "IL" annonce être contre alors que Ursula von der Layen va signer le contrat, et que nos agriculteurs que nous avons mis à la peine, paieront encore le prix de cette erreur française. Prenons le secteur automobile. Avec l'Europe les conditions de fin du thermique pour l'électrique ne vont avantager que la Chine; Trop de règlements et de délais imposés vont détruire une de nos grandes filières, l'automobile, avec à la clé des travailleurs licenciée... Encore ! Quant à la politique - j'y reviens - que voyons-nous ? Les accords 'transgenres" entre l'UMP / RPR et les macronistes avec la gauche PS et LFI nous offrent un spectacle lamentable. Celui d'une censure dont "IL" ne semble pas conscient, en croyant que demain un autre Premier Ministre fera mieux que Michel Barnier qui n'était que l'otage de Laurent Wauquiez et d'Emmanuel Macron avec Gabriel Attal. Que fera de mieux un nouveau Premier Ministre sinon pencher à gauche toute et perdre le pays dans un arrivage massif d'étrangers et une sécurité de la population abandonnée aux griffes du salafisme et des frères musulmans, avec d'autres Thomas pris au piège des couteaux communautaristes et une France appauvrie de ses aides multiples au tout venant. Oui, "IL" a parlé mais que retenir de son message incompris ? Demain, Notre Dame et son inauguration devant une foule admirative de l'œuvre de milliers d'ouvriers et un parterre d'étrangers ? Un instant de fierté pour la France, de bonheur pour les chrétiens et le monde entier face à cette résurrection. MAIS, près demain ? Qui pour le pays ?
Robert Puig
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Boualem Sansal
PAR MANUEL GOMEZ
14 décembre 2024
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La France ne bougera pas une oreille pour faire libérer Boualem Sansal
Si Boualem Sensal espère que la France, son président et son gouvernement, se mobiliseront pour tenter de le sauver du sort qui l’attend dans cette prison algérienne où sa vie est en danger, il se trompe lourdement.
La France, ses Présidents et ses gouvernements, ont toujours fait preuve de lâcheté quand il a fallu sauver des Français de la barbarie des nouveaux maîtres de l’Algérie et cela depuis qu’on leur a offert leur indépendance.
Quelques heures avant la signature des « Accords d’Evian » et en prévision des exactions qui pouvaient et qui allaient se produire, tout le monde en était conscient, avec l’arrivée des troupes de l’ALN et du FLN, le premier ministre, Michel Debré, ordonnait à tous les préfets d’Algérie : « Nos forces ne devront riposter que pour assurer leur propre défense ».
Donc la protection les civils français était officiellement exclus et les officiers ne pouvaient que s’excuser : « Nous sommes impuissants, nous n’y pouvons rien, nous avons reçu l’ordre de laisser faire. »
Et, en bons militaires « sans couilles » qu’ils étaient (puisque ceux qui « en avaient » , n’étaient plus présents pour les défendre) : ils ont laissé faire !
Le 4 mai 1962, cette déclaration de De Gaulle, lors du conseil des ministres : « L’intérêt de la France a cessé de se confondre avec celui des Pieds Noirs. » Donc ils peuvent « crever » !
À une question posée par le Haut-commissaire Christian Fouchet, sur la conduite à tenir au cas où les enlèvements d’européens et de musulmans se poursuivraient, le ministre Louis Joxe lui répond : « Il convient d’observer que l’Algérie ayant acquis sa souveraineté interne, la France se trouve de ce fait même déchargée de toute responsabilité en matière d’ordre public. L’armée française devra rester stationner en Algérie et de doit assurer aucune mission de maintien de l’ordre. »
Le ministre des Armées, Pierre Mesmer, refusait catégoriquement que l’armée communique à la Croix Rouge la liste des disparus afin d’entamer des recherches sur leur triste sort. Ils ont été lâchement abandonnés.
*Cher Boualem, vous m’aviez conseillé, il y a quelques années (au Salon du Livre de Toulon) de ne pas accepter de me rendre à un Salon du Livre à Alger « car ma liberté aurait été en danger ». C’est aujourd’hui la vôtre, de liberté, qui vous a été confisquée et nous sommes impuissants pour vous la rendre « parce que ceux qui nous gouvernent ont le même courage que leurs prédécesseurs de 1962 ».
Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Manuel Gomez pour Dreuz.info.
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AERATIONS
De Jacques Grieu
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Sans trop l’air d’y toucher, nous les vieux, pauvres hères,
Nous sommes obsédés, nous ne parlons que d’air.
Air trop chaud, air trop froid, on maudit l’air du temps.
On voudrait changer d’ère, on cherche nos printemps.
On le trouve pollué, l’air ambiant ; corrompu.
« L’air est conditionné », c’est un air entendu.
Le fond de l’air est frais ? Mais le dessus aussi !
Et tous ces courants d’air nous causent des soucis.
Et pourtant, l’air léger est quelquefois béni
Quand c’est la douce brise qui souffle et rafraîchit.
Il transporte avec lui des parfums, des odeurs
Qui nous parlent de champs et de prairies d’ailleurs...
En avion, prenant l’air, on cherche à changer d’air,
Mais c’est promesse en l’air quand on revient sur terre !
Si s‘envoyer en l’air s’avère mauvais choix,
Gare à l’atterrissage où l’aire aussi déçoit.
Si, à la fille de l’air, jouer serait erreur,
Prendre un air supérieur ne serait pas meilleur,
Lorsque le mal de l’air vous déclare la guerre.
Toujours les mots en l’air retombent sur la terre…
« Errare humanum ouest » , nous avait dit Dac (Pierre),
Cet éminent expert qui ne manquait pas d’air.
« Et tout air emprunté devra être rendu »
Avec les intérêts comme bien entendu !
« Bouillir l’air il faut faire, avant de respirer »
Elémentaire truc pour les rhumes éviter …
Par là, on voit que l’air ne fait pas la chanson,
Et qu’avoir l’air de rien est pour les faux jetons …
Un wagon d’RER, n’est pas aire de jeu,
Sur les voies, quand il erre, on crie sauve qui peut !
Jacob, pour un plat d’ers, acquit un droit d’aînesse :
Tête en l’air, Esaü, n’en vit pas la richesse.
Respirer l’air liquide est bien … humidifiant ;
Reste l’air comprimé qui n’est qu’un faux semblant.
Alors, mouillons nos haires et prions Dieu très fort
Pour avoir un peu d’erre, encor, avant la mort …
Jacques Grieu
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LE MARABOUT
Gallica : Revue de l'Orient 1854-1, pages 127-132
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SI-AHMED-BEN-YOUSSEF
ET SES DAAOUI.
Si-Ahmed-ben-Youssef est un des marabouts les plus célèbres et les plus populaires de l'Algérie : sans cesse par voies et par chemins, il a, parcouru toute l'Afrique septentrionale depuis l'Egypte jusqu'au Maroc, laissant partout, en souvenir de son passade, une dââoua qui résumait en quelques mots les qualités ou les défauts caractéristiques d'une ville, d'un village, d'une tribu, d'une fraction, d'un douar même. Ses d&ouis sont en général tournées avec esprit ; elles expriment souvent une pensée juste, et la plupart sont devenues proverbes.
Malheureusement, elles ne se trouvent écrites nulle part et nous devons nous borner à en reproduire seulement un petit nombre que vous avons recueillies, sous la tente, de la bouche même des Arabes.
Dââoua, pluriel dââoui. Ce mot n'a pas d'équivalent exact en français. Il a plusieurs acceptions suivant le sens de la phrase ; il peut signifier : invocation, épigramme, action de bénir, de maudire, de prophétiser, etc.
Si-Ahmed-ben-Youssef naquit dans la première moitié du 11ème siècle de l'hégire, aux environs de Mascara, dans la fraction des Ouled-Merah de la tribu des Hachem. Voici ce que rapporte la tradition arabe :
Son père, qui était originaire de Figuig dans le Moréreb, traversait la tribu des Hacheur avec sa mère, lorsque celle-ci fut prise des douleurs de l'enfantement ; la petite caravane s'arrêta sous l'ombre épaisse d'un lentisque, et là naquit El-Ouali (l’élu), qui devait s'appeler plus tard Si-Ahmed-ben-Youssef.
Sa mère, confiante en Dieu, l'abandonna au milieu d'une touffe de palmiers nains, puis elle reprit avec son époux la route de Figuig, sans conserver aucune inquiétude sur le sort de son fils.
Or, l'endroit où avait été abandonné le futur marabout n'était fréquenté que par un troupeau appartenant à un homme des Ouled-Merah, nommé Ben-Youssef.
Ce troupeau ayant mangé toutes les herbes des alentours se rabattit sur les palmiers nains au milieu desquels reposait l'élu. Dieu fit, par sa volonté, qu'une vache de couleur pie (begâa) aperçut l'enfant, s'approcha de lui et l'allaita. Ben-Youssef ne tarda pas à s'apercevoir que cette vache ne lui donnait plus de lait, et il soupçonna la fidélité de son berger. Il alla donc un jour se poster sur une petite hauteur qui dominait le pâturage, et. il était en observation depuis quelques instants lorsqu'il vit la vache pie se détacher du troupeau avec précaution en tournant la tête de temps en temps, puis s'accroupir contre une touffe de palmiers nains.
Ben-Youssef se leva alors, se dirigea vers la vache et la trouva allaitant El-Ouali, dont la figure resplendissait d'une clarté céleste : après l'abandon de sa mère, les anges étaient venus le vêtir d'or et de soie.
Ben-Youssef l'enleva dans un pan de son burnous et l'apporta sous sa tente. Dieu lui ayant jusqu'alors refusé un enfant, il adopta celui-ci, auquel il donna le nom d'Ahmed. Ahmed ajouta plus tard à son nom celui de son père adoptif, bien que lui-même descendît de la sainte famille de houssein-ben-ali, dont la généalogie remonte directement jusqu'au prophète.
Dès qu'il atteignit l'âge de puberté, l'esprit de Dieu descendis en lui ; il abandonna le pays où il avait été élevé, et en quittant la tribu des Hacheur, il jeta cette dââoua sur les tolbas qui y étaient en grand nombre et qui prétendaient à tort descendre du prophète : « La fausse monnaie est moins fausse qu'un thaleb des Hacheur. Chez les R'eris chaque touffe de palmier nain a son élu ; chaque palme a son élu.
Il a dit sur Tlemcen : Tlemcen, la ville aux beaux cavaliers. Son eau, son air et la façon dont ses femmes se drapent n'existent dans aucune autre ville.
Il a dit également sur Tlemcen pour indiquer la force de la ville et la vigilance de ses habitants : Tlemcen a sept remparts, sept enceintes et ses habitants ne dorment ni la nuit, ni le jour.
On rapporte qu'il arriva un jour à Mascara, monté sur une mule ; à la porte de la ville, il fut saisi par trois individus qui le conduisirent devant le cadi dont le tribunal se trouvait dans le quartier de Sidi-bou-Djellal : ces hommes revendiquaient la mule sur laquelle BenYoussef était monté. Celui-ci ne s'émut poins et, ayant surpris un signe d'intelligence entre le juge et les plaignants, il attendit paisiblement la décision du cadi, qui le déclara détenteur d'une mule appartenant à trois habitants de Mascara. Ce jugement prononcé, Ben-Youssef se tourna vers l'assistance : «Vous êtes tous témoins de ce jugement, » dit-il, puis invoquant le ciel : O mon Dieu, mettre des deux mondes, confondez la fausseté de ces hommes. » A peine cette invocation était-elle terminée, que la mule se changea en mulet : à ce miracle, tous les assistants se prosternèrent à ses pieds. BenYoussef étendant la main dans la direction de la ville dit « O Mascara, j'ai réuni les secrets de tous les enfants du péché, et je les ai jetés dans Mascara, à Sidi-BouDjellal.
Il a dit encore sur les habitants de cette ville :« Si tu trouves un homme gras, sale et fier, tu peux dire : C'est un enfant de Mascara. »
Et effectivement les gens de Mascara sont remarquables par leur corpulence et leur fierté.
Sa réputation comme marabout n'était pas encore bien établie lorsqu'il arriva à Ténez ; les tamis de la ville voulurent mettre à l'épreuve sa sagacité ; à cet effet, ils lui préparèrent la diffa traditionnelle; mais, au lieu de faire le couscoussou avec de la viande de mouton, ils le garnirent avec de la viande de chat. L'assistance était nombreuse lorsqu'on apporta le repas ; Ben-Youssef étendit la main au-dessus du plat et s'écria : Esseub ! (Exclamation employée par les Arabes pour chasser les chats.)
A cette exclamation les différentes parties du chat disséminées sur le couscoussou se réunirent, le chat reconstruit sauta du plat à terre, bondit par-dessus les têtes des invités atterrés, et sortit, probablement pour aller à la recherche de sa peau. Ce fait accompli, le marabout se leva et dit :
« Ténez ! bâtie sur des ordures ! son eau est du sang, son air du poison ! Par Dieu ! Ben-Youssef ne couchera pas ici.
Puis il monta sa mule et quitta Ténez.
En se rendant à Milianah, Si Ahmed ben Youssef séjourna quelque temps dans la tribu turbulente des Tachetas : il y fut assez mal reçu ; aussi en les quittant a-t-il dit de la population : Les Tachetas sont des gens à la figure renfrognée et au cœur irascible. »
Mieux reçu chez les Beni-Ferah, il leur laissa cette dââoua qui leur a porté bonheur, au dire des Arabes Beni-Ferah ! enfants de la joie ! vous aurez joie sur joie jusqu'au jour de la résurrection.
Pour peindre le lieu de jugement et la versatilité d'esprit des Beni-Menassem, grande tribu kabyle, dont les fractions étaient toujours en lutte, il a dit « Les Beni-Menassem sont enfants de l'erreur ; ils sont nombreux; leur raisonnement est nul, ils se réunissent pour délibérer et se séparent sans avoir rien décidé.
Il a dit sur les Sebih, pour indiquer leur peu de valeur : Les Sebih sont les amis du vent, ni leur cœur ni leur bras ne sont solides. La crinière de leur chevaux est rasée ; ils n'ont point de bon sens. Leurs vieillards ne savent pas conseiller , et leurs enfants ne savent pas discerner.
Expulsé de Mazouna, la bourgade savante, par les tolbas qui l'habitent et qui y ont établi une petite université, il jeta sur cette ville l'imprécation suivante : Mazouna ! ses habitants jeunes et vieux iront en pèlerinage : et le feu dévorera jusqu'à ses pierres, jusqu'à sa terre.
Quelque Partialité qua l'on trouve dans les dââouis de Si-Ahmed-ben-Youssef, on est obligé d'y reconnaître cependant un certain esprit de justice : il fait souvent une grande différence entre un pays et sa population, entre une ville et ses habitants.
Ainsi il a dit de Médéa :
Médéa la transportée ( Une légende arabe prétend que Médéa, qui était bâtie au Belaci-Kedimas, fut transportée par les anges sur l'emplacement qu'elle occupe aujourd'hui.) - si elle eût été femme, -- je n'eusse épousé qu'elle. — le mal y entre le matin et en sort le soir.
Mais pour caractériser ses habitants turbulents et querelleurs, il a dit : Si tu vois un homme assis sur un monticule, revêtu d'un kessia ( chemise courte en laine), ayant à la main un bâton et disant au mal
Je descends te joindre, si tu ne montes vers moi, — sois sûr que c'est un habitant de Médéa. »
Pendant un séjour qu'il fit à Mostaganem, quelques habitants se réunirent pour donner une diffa ( Hospitalité par extension, repas que l'on offre aux hôtes) au marabout. Comme on la sait, il n'y a point d'invitation personnelle pour les repas ; tous les parents, les amis, les amis des amis, les passants même, chacun est admis autour de l'énorme plat de couscoussou. Cependant l'affluence des parasites était telle, que Si-Ahmed ne put s'empocher de lancer sur les habitants de Mostaganem le dicton suivant , dicton qui leur est resté et qui leur a laissé une réputation de gloutonnerie « Les gens de Mostaganem relèvent leurs bottes pour courir plus vite au son des mâchoires qui mangent.
Il a dit sur Blida, cette jolie petite ville que j'ai entendu appeler par un de mes amis le bouquet d'oranger de l'Algérie :
Les gens t'ont nommée petite ville (Blida signifie en Arabe petite ville, c'est le diminutif de Belad, ville.), et moi je t'appelle petite rose.
Il a dit sur Miliana ;
« Miliana, la ville de l'injustice et de la mauvaise renommée ; l'eau et le bois (Oud : bois employé ici pour arbres : on sait que les environs de Milianah sont très-boisés) y sont en abondance ; ses habitants sont envieux. Ses femmes sont des ministres et ses hommes des esclaves.
Les habitants de la ville ne lui ont cependant pas gardé rancune de cette dââoua, car ils lui ont élevé une superbe koubba où reposent ses restes.
Si-Ahmed-ben-Youssef est mort à Milianah vers l'année 1099 de l'hégire.
N'oublions pas de dire, en terminant cette notice, que Si-Ahmed-Ben-Youssef est l'organisateur et le créateur de la secte des Medebouhhin (les égorgés). Aussitôt que nous aurons les renseignements nécessaires, nous essaierons d'étudier l'ordre des Égorgés.
FLORIAN-PHARAON,
Interprète militaire attaché à la subdivision de Médéa
membre de la Société orientale.
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ALPHONSE
Tirailleur Algérien N°511 du 4 novembre 1900
Source Gallica
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L'immortel Dumas nous a donné pour gratifier la marée montante, qui tous les jours pullule, grouille, fleurit et... pourrit... sur nos bitumes, un nom dont, le vocabulaire poissard ne peut revendiquer la propriété.
Quoi qu'il en soit, si le nom en question ne salit pas la lèvre qui le prononce, l'objet qu'il représente n'en est pas moins à ne pas toucher avec des pincettes. Je veux parler des infâmes gredins qui vivent aux crochets de nos vendeuses d'amour.
Qu'est-ce en somme qu'un Alphonse ?...
Simple histoire, une jeune fille quelconque, pauvre toujours, honnête quelquefois, vent, pour cesser d'être pauvre, cesser d'être honnête.
Un individu se trouve sur sa route, lequel a du linge, des gants, quelquefois dans sa poche un ou deux louis de provenance obscure. Elle s'imagine avoir trouvé l'entreteneur de ses rêves. Erreur !
Un beau jour, quand il a suffisamment défloré, dégrossi, sa conquête, le susdit la conduit à la rue, et, lui désignant les passants : « Voilà ton travail. ! Tire de là de quoi me faire vivre.»
Et pendant que la fille accoste au coin des boulevards l'homme chez lequel son flair lui fait deviner le plus de braise, Alphonse, lui, hume à quelques pas de là un cigare, son chapeau ou sa casquette sur l'oreille.
Ah ! Ils me font rire les moralistes quand ils parlent de supprimer la cause pour anéantir l'effet, de tuer la prostitution pour voir périr les souteneurs.
Mais neuf fois sur dix, le souteneur est lui-même cause et effet et c'est à peine si l’on constata sur ces dix fois un cas d'entraînement spontané. Et tandis qu'on s'acharne sur les filles qui en somme ne sont que les victimes, on laisse Alphonse faire tranquillement son petit métier et compter ouvertement la recette du soir en se carrant dans sa putréfaction comme un ver sur son fumier.
Du coup de poing avec lequel il châtie le timide qui n'a pas assez casqué au coup de couteau avec lequel il sondera plus tard la panse du bourgeois attardé auquel il veut soutirer son portefeuille, il n'y a qu'un pas et ce pas il a vite fait de le franchir.
Le proxénétisme est cependant prévu par la loi ; d'où vient donc que tant d'individus peuvent sans vergogne exercer au grand jour ?
Pour finir, je renvoie le lecteur au dictionnaire, réaliste, il y lira au mot souteneur, graine de voleurs, d'assassins, pour lesquels la fainéantise est l'embarcadère, le soutenage un voyage plus ou moins long, et l'assassinat la gare d'arrivée.
Maboul.
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ABOMINATION !!
Avril 62 - Avril 2022
"Avril 62, Daniel, un soldat Français fait son service dans la Marne. Il se voit confier la mission de ramener en Algérie des harkis réfugiés en France depuis plusieurs mois.
Témoignage :
« Nous les avons descendus jusqu'au port de Marseille dans les fameux camions FIAT et lorsqu’on est arrivé, on a vu arriver d’autres camions qui venaient de plusieurs villes de France dont Tours, Orléans et Clermont-Ferrand et qui transportaient, aussi, des harkis à renvoyer en Algérie. On s’est retrouvé avec 400 ou 500 harkis. On a eu beaucoup de mal à les canaliser pour les faire monter dans le bateau, le soir même sur « Le ville d’Alger ». C’est sûr que là, il y en a qui reculaient… Il y a eu des regards qui étaient terribles…
On a passé avec difficulté la nuit de la traversée parce qu’ils ne voulaient pas rentrer. C’était une décision militaire et politique à laquelle, nous, nous étions obligés d’obtempérer. D’ailleurs, on nous a imposé un comptage régulier de l’effectif la nuit, pendant le voyage en mer. On n’avait jamais le même nombre. On ne savait pas forcément où ils étaient.
La traversée de nuit a été angoissante parce qu’il y avait là plusieurs centaines de types couchés, debout, accroupis dans des conditions pas toujours très propres et nous avions une trouille terrible car nous étions seulement une dizaine d’hommes de troupe et trois sous-officiers pour tout ce monde. S’ils s’étaient rebellés, je l’aurais compris.
On sentait chez ses hommes une certaine rancœur. Ils étaient prêts à se révolter. Avec un copain sous-officier, on a vraiment eu la trouille et ça nous prenait aux tripes. Les harkis nous disaient mais pourquoi ? Pourquoi ?
Pourquoi ils nous renvoient ?
Et le problème est que nous avions les PM (des pistolets mitrailleurs) armés. Nous les avions parce que c’était un ordre. S’il avait fallu tirer… J’avais 20 ans et je ne sais pas ce que j’aurais fait… Je n’aurai sûrement pas tiré… mais avec la peur ?... On ne sait jamais quelle attitude adopter dans ce genre de situation surtout à 20 ans… On a eu la trouille parce qu’on a senti une espèce de haine… On était devant un fait…
Ce qui a été terrible, c’est lorsqu’on les comptait dans la nuit et que l’on ne retrouvait pas un que l’on avait repéré, on nous disait« Il n’est plus là… ».
On demandait « Mais il est où ? ». On nous répondait : « Il a sauté du bateau ». Je répliquais « Ce n’est pas possible ! ». On avait du mal à croire qu’ils s’étaient suicidés. Lorsqu’on était au trois quart du voyage, on s’était rendu compte, qu’il en manquait vraiment… On ne pouvait pas dire le nombre exact parce que c’était une ruche… Ça bougeait de partout dans la cale…
On était ébahi, étonné que plusieurs aient sauté dans l’eau… C’était très triste…
J’ai voulu raconter cette expérience. C’était une injustice, même à l’époque… Et pourtant on ne parlait pas de politique à 20 ans… Mais cette injustice… Que de Gaulle prenne la décision de renvoyer des harkis, des gars qui normalement nous ont aidés certainement du mieux qu’ils pouvaient et de leur avoir promis de les loger, de les accueillir puis les renvoyer six mois après… Moi, j’ai trouvé ça, là maintenant, parce qu’à l’époque je ne savais pas… pour être clair…
J’ai trouvé ça dégueulasse… C’est pas normal, … C’est tout !
Nous sommes arrivés à Alger dans la matinée et ils ont été débarqués purement et simplement. Et là, vogue la galère, on ne sait pas trop ce qu’ils sont devenus. On n’a jamais eu de nouvelles particulières.
En fait on n’a pas su ce qu’ils sont devenus. Je sais, qu’il y en a qui m’ont dit en sortant que de toute façon ils auraient forcément le sourire kabyle (la gorge tranchée) dans très peu de temps. Ce qui était clair. Nous, on connaissait bien l’expression… A 20 ans, on ne mesurait pas…».
Le témoignage complet de Daniel est à retrouver dans le numéro 666 de la revue « Les Temps Modernes » de décembre 2011. "
Ce qu'ils sont devenus. Lettre de Voltaire.
LE MASSACRE DES HARKIS
"Loin d'oublier ces temps abominables,
il faut les remettre fréquemment sous nos yeux"
Privés par les Accords d’Evian de la nationalité française , dépouillés de leurs armes, sans protection de l'armée française qui a reçu l'ordre express de ne pas intervenir pour leur porter secours, isolés dans leurs villages au sein d'une population souvent hostile, les harkis sont à la merci de l'ALN (Armée de Libération Nationale), dont les troupes qui étaient stationnées en Tunisie et au Maroc, entrent en Algérie, après l'intervention du cessez-le-feu du 19 mars 1962. En nombre et avec leurs armes. Dans un premier temps, le nouveau pouvoir algérien alterne promesses d'amnistie et menaces. Puis les sévices, les assassinats, les enlèvements commencent, souvent du fait des "Marsiens", combattants de la 25ème heure qui veulent racheter leur passivité antérieure. Les harkis sont arrêtés et abattus. En masse, lors des deux principales vagues de répression en été et en automne 1962.
Quelquefois par unité entière, par village entier, par famille entière, les femmes et les enfants n'étant pas épargnés. Les massacres perpétrés sont d'une barbarie et d'une ampleur sans précédent.
L'HORREUR DES MASSACRES
Les supplices qui précédent la mort sont d'une cruauté inouïe et peuvent durer plusieurs heures, quelquefois plusieurs jours : corps ébouillantés, dépecés, enterrés ou brûlés vifs, énucléations, membres découpés en lanières et salés, anciens combattants contraints d'avaler leurs médailles avant d'être brûlés vifs dans le drapeau français....
Selon des témoignages rapportés par Camille Brière "certains harkis furent crucifiés sur des portes, les yeux crevés, le nez et les oreilles coupés, la langue arrachée, systématiquement émasculés... D'autres furent dépecés vivants à la tenaille, leur chair palpitante jetée aux chiens... Quant aux familles, voici ce qui les attendait : des vieillards et des infirmes étaient égorgés, des femmes violées puis éventrées, des nourrissons, des jeunes enfants avaient la tête écrasée contre les murs sous les yeux de leur mère..."
Dans un compte-rendu destiné à sa hiérarchie, M. Robert, sous-préfet en poste à Akbou, arrondissement situé en Kabylie, dresse de façon précise et détaillée la chronique macabre des exactions - supplices, assassinats, enlèvements, viols collectifs, enfermement dans des camps - subies par les harkis et leurs familles dans sa circonscription après le cessez-le-feu du 19 mars 1962, jusqu'à la fin décembre 1962.
Il note parmi les victimes "la proportion non négligeable de civils qui est de l'ordre d'un tiers, constitué d'élus de tous rangs, de chefs de villages, d'anciens combattants..." . S'agissant d'un document officiel, établi par un haut fonctionnaire concernant des faits dont il a été amené à avoir connaissance dans l'exercice de ses fonctions, il ne peut être soupçonné d'exagération.
L'aspect cathartique des massacres est souligné par Mohand Hamoumou :
"la plupart furent humiliés et torturés publiquement, longuement avec un luxe de raffinement dans l'horreur. La mort était une délivrance, d'où la recherche de morts lentes pour faire durer l'expiation. Le supplice est destiné à rendre infâme celui qui en est la victime et à attester le triomphe de celui l'impose. Plus le doute est permis sur le l'infamie de l'accusé plus le supplice doit être démesuré pour persuader l'assistance de la culpabilité de la victime".
D'autres sont faits prisonniers et enfermés dans des camps , dans lesquels la Croix Rouge recensera, en 1965, 13 500 personnes.
Certains seront employés à des taches dangereuses telles le déminage, à mains nues, avec une jambe coupée préventivement.
D'autres enfin sont enlevés : ce sont ainsi des milliers de harkis et de pieds-noirs qui disparaissent dès après le cessez-le-feu du 19 mars 1962, puis au cours des deux principales vagues de répression qui interviennent en été et en automne 1962, et de celles qui interviendront plus tard entre 1963 et 1966. Sans que les autorités françaises pourtant souvent informées des lieux de leur détention ne s'en inquiètent, et donnent même des ordres pour qu'aucun secours ne leur soit apporté (6), et pour que soient sanctionnés ceux des militaires, souvent anciens responsables de SAS, qui de leur propre initiative, achemineront leurs hommes et leurs familles vers la métropole et vers le salut . Et pour que soient chassés des bateaux les harkis qui auront embarqué clandestinement, et renvoyés en l'Algérie ceux qui seront parvenus à rejoindre clandestinement la France...
L'AMPLEUR DES MASSACRES : 150 000 VICTIMES
Les chiffres peuvent toujours donner lieu à controverse. Il est cependant possible d'avancer le nombre de 150 000 victimes, en s'appuyant sur différentes estimations rappelées notamment par Abd-El-Azziz Meliani, et par Mohand Hamoumou : celle du service historique des armées qui, dans une note officielle en 1974, estime à environ 150 000 le nombre des harkis et leurs proches disparus ou assassinés ; celle du chef du 2 ème bureau à Alger qui retient également ce chiffre de 150 000 ; celle de monsieur Robert, sous-préfet d'Akbou, qui dans le compte-rendu officiel où il relate les faits survenus dans son arrondissement après le cessez-le-feu, fait état de 2000 victimes en moyenne par arrondissement, soit 150 000 environ pour les 72 arrondissements algériens (3) ; celle de l'historien Guy Pervillé qui situe ce chiffre entre 30 000 et 150 000 ; celle d'Anne Heinis qui, dans un mémoire de 1977 sur l'insertion des français-musulmans (10) situe également ce chiffre entre 30 000 et 150 000 ; celle enfin d'André Santini Secrétaire d’état aux Rapatriés en 1986-1988 qui, pour les harkis et les pieds-noirs massacrés ou disparus au moment de l'indépendance de l'Algérie, donne les chiffres de 150 000 et 10 000.
Dans un rapport officiel de mai 1962 le contrôleur général monsieur de Saint-Salvy a pu écrire : "les crimes de guerre commis en Algérie depuis le 19 mars 1962 sont sans précédent depuis la dernière guerre mondiale, dépassant tout ce qui avait pu être constaté en Asie ou en Afrique noire" (10). De ces crimes de guerre, l’état français s'est rendu coupable de complicité par sa passivité volontaire, alors qu'il connaissait parfaitement la situation et qu'il disposait encore des moyens militaires suffisants en Algérie pour protéger et secourir ses ressortissants.
Raphaël DELPARD a enquêté sur le drame de ces 25 000 français enlevés et jamais retrouvés.
Communiqué pour ceux qui se réfèrent encore aujourd'hui à DE GAULLE.
Alain ALGUDO ex Président fondateur
Comités de Défense des Français d’Algérie
ex Vice Président du Comité et de la revue VERITAS VERITAS
Auteur de « Mon Combat »
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RAPPEL D'HISTOIRE
VERITAS N°71, mars 2003
Docteur Pierre Cattin
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L'OEUVRE MEDICALE DE LA FRANCE EN ALGERIE
L'histoire de l'Institut Pasteur d'Alger mérite une mention à part. D'origine très modeste, établi dans un pavillon au sein des jardins de l'Université où travaillaient depuis 1894 les Professeurs Soulié et Trolard, l'Institut Pasteur, sur l'initiative du Gouverneur Général Jonnard, fut ensuite transféré dans un bâtiment neuf sur les hauteurs du HAMMA et confié au Professeur Edmond Sergent, disciple de Pasteur en 1909 et dont la mission capitale pour l'étude des maladies tropicales fut fixée par décret de janvier 1910.
En une cinquantaine d'années, il va attirer les chercheurs, non seulement de Métropole, mais aussi du monde entier. Il est impossible d'énumérer, même brièvement, l'étendue des recherches de cet Institut modèle en matière de pathologies infectieuses tropicales. Il va devenir le premier Institut de recherche pour I'étude et le traitement du paludisme dans le monde.
L’importance de l'activité de l'Institut Pasteur d'Alger justifie quelques chiffres tirés du livre du Docteur Raymond Féry (o.c.) dans une période où son action fut décisive pour la santé, du fait de la guerre de 1942 à 1945. Trois millions de doses de vaccins contre le typhus, cent vingt-mille doses de vaccins contre la peste, près de dix millions de doses de vaccins antivarioliques (cette terrible maladie, presque toujours mortelle n'était pas encore éradiquée à cette époque) et beaucoup d'autres sérums furent livrés aux troupes alliées opérant alors en Méditerranée et, aussi, envoyés, clandestinement, à la résistance française par des parachutages dans le midi de la France.
Lorsque parurent en 1964, sous la signature du Professeur Sergent. Les travaux scientifiques de l'Institut Pasteur d'Alger de 1900 à 1962,, cette publication comportait 2.276 titres et comptes-rendus, et elle fut accueillie dans le monde médical comme une des plus belles contributions de la France dans cette première moitié du XXème siècle.
Le bilan sanitaire de la médecine française en Algérie paraÎt considérable. Il est bien rare de voir les conditions de vie d'une population donnée, transformées de fond en comble en moins d'un siècle. Le paludisme endémique atteignait près de 50 % de la population musulmane dans certaines régions. Il recula dans d'énormes proportions et la mortalité des sujets atteints (adultes et enfants) tomba de 25 à 5 % grâce aux travaux et recherches du médecin-colonel Laveran (prix Nobel de médecine) et du médecin commandant Maillot. Le nom de ce dernier fut donné à l'hôpital militaire d'Alger, mais le F.L.N. débaptisa ce dernier, la révolution algérienne n'ayant sans doute pas besoin de ce grand savant français.
Le trachome était une conjonctivite granuleuse et ulcérante redoutable dont un grand nombre de nouveau-nés et de nourrissons étaient atteints en Afrique du Nord. Les trois quarts d'entre eux restaient aveugles définitivement. Les premiers médecins militaires en Algérie avaient été frappés par le grand nombre d'aveugles qui peuplaient les rues d'Alger. Mendiants assis au pied d'un palmier, le visage tourné vers un ciel invisible, psalmodiant des versets du Coran en sollicitant la charité publique. On les prenait parfois pour des prophètes ou des marabouts.
Ils soignaient, jusque dans les bleds les plus reculés
La médecine coloniale française entreprit une campagne d'éradication qui dura quarante ans :
1) Création de centres de dépistage précoce ( les fameux Biout el Aïnin : Maisons des yeux) jusque dans les plus petites communes.
2) Equipes itinérantes visitant les familles jusqu'au fond des bleds Ies plus reculés et des mechtas les plus dispersées sur deux millions de kilomètres carrés.
Une femme médecin se distingua particulièrement dans cette œuvre qu'elle considérait comme un apostolat, le Docteur Renée Antoine y consacra plus de vingt ans de sa vie. Elle était extrêmement populaire dans les territoires du Sud auprès des Touaregs. Avec Emilie de Vialar, elle devrait être considérée comme une apôtre de la civilisation française en Afrique. Le trachome devait disparaitre à peu près complètement et les aveugles du même coup. Avec plus de cinquante ans d'avance sur les autres pays arabes du Moyen Orient, l'éradication du trachome en Algérie fut une des plus belles victoires de la médecine coloniale.
La syphilis faisait des ravages en Afrique du Nord et se traduisait par ces nez ronges, parfois jusqu'à la racine tandis que Ies enfants hérédosyphilitiques mouraient en très bas âge. L’organisation de dispensaires, I'emploi de médicaments efficaces déjà avant la Première Guerre Mondiale, la formation des sages-femmes à l'européenne, la surveillance sévère des maisons de tolérance, placèrent l'Algérie au premier rang de la lutte anti-syphilitique dans tout le monde arabe. La surveillance et le traitement des femmes enceintes syphilitiques furent très efficaces sur la prévention de la mortalité infantile.
Le typhus exanthématique, affection grave, mortelle le plus souvent, avant les antibiotiques, régnait en petits foyers endémiques avant 1830 : la lutte fut très longue mais I'efficacité en fut déterminée par l'amélioration du niveau de vie, avec des rechutes dans les périodes de sécheresse qui entraînaient des famines. Le médecin-colonel Charles Nicolle (prix Nobel de médecine 1928) découvrit les germes, les rickettsies, intermédiaires entre les bactéries et les virus ainsi que la transmission par les poux. La vaccination entreprise sous l'égide de l'Institut Pasteur d'Alger, en 1942-1943, dont quatre millions de personnes furent bénéficiaires en Afrique du Nord, évita l'extension de la maladie, comme ce fut malheureusement le cas à Naples où une terrible épidémie survint dans la population civile au début de I'hiver 1943-1944, après le débarquement des troupes alliées.
La peste bubonique ravageait périodiquement les pays riverains de la Méditerranée au moment des guerres et des déplacements de populations. Cette maladie, que Camus a popularisée dans un roman célèbre, est due au bacille de Yersin (encore un médecin militaire français) et était transmise par les rats. La peste bubonique n'a jamais ravagé l'Afrique du Nord comme elle l'a fait au Moyen Orient, ceci grâce aux mesures prophylactiques, la dératisation, la vaccination par virus atténué et l'hygiène générale des populations. La peste s'observait souvent, par contre, dans les pays orientaux soumis à la domination turque, par suite de la misère et de I'incurie qui régnaient dans ces populations. Il est utile de rappeler que, peu d'années avant 1830, dans le cloaque où vivait la population d'Alger, une terrible épidémie avait emporté le tiers des habitants !
La tuberculose : son dépistage fut entrepris aussi sur une très grande échelle avec de très nombreux dispensaires, cinq sanatoriums dont celui très moderne de Tizi-ouzou, en pleine Kabylie, construit en 1936, trois préventoriums et quatre aériums. Entre 1949 et 1955, un million cinq cent mille enfants algériens reçurent le vaccin du B.C.G. fourni par l'Institut Pasteur d'Alger.
Dans aucun pays musulman au monde, à cette époque, un tel effort de prophylaxie de la tuberculose ne fut comparable... Dans Le Monde, de septembre 1998, le journaliste algérien Djillali Hadjadj écrivait. La couverture vaccinale des enfants a régressé, le taux de mortalité infantile connaît une courbe ascendante représentant dix fois celui de la France. Le fléau de la tuberculose connaît un retour inquiétant.
Un très grand nombre de maladies parasitaires traitées en Algérie, souvent de façon originale (kyste hydatique) est à mettre au palmarès des nombreuses conquêtes de la médecine française dans ce pays, comme dans les territoires de I'Afrique occidentale et équatoriale administrés par la France. On peut les énumérer ici :
En 1962, la France laissait à l'Algérie indépendante le plus moderne des équipements hospitaliers avec 48.000 lits, équipement supérieur en nombre et en qualité à celui de la Métropole ! Grand a été notre étonnement, lorsqu'en 1962, nous avons, au cours de l'exode, découvert les établissements hospitaliers de Métropole dont le niveau était loin d'atteindre celui de notre Mustapha, écrit le Professeur Félix Lagrot, membre de l'Académie de Médecine dans la préface du livre du Docteur Raymond Féry. Que sont devenus ces hôpitaux sous le règne du F.L.N.
En conclusion, il faut rendre un vibrant hommage, aussi, à la conduite des médecins et infirmiers de toute l'Afrique du Nord pendant la deuxième guerre mondiale. Sur le plan technique d'abord, le Professeur Benhamou créa de remarquables équipes de transfuseurs réanimateurs qui, dans les combats de Tunisie, d'Italie et lors de la libération de la Métropole, recueillirent et sauvèrent plus de trente huit mille blessés de 1942 à 1945. Père de la transfusion sanguine moderne, le Professeur Benhamou fut secondé très efficacement par la générosité de M. Henri Borgeaud qui finança, dans son domaine de Staouéli, une usine et un laboratoire pour la lyophilisation du plasma sanguin, laquelle servira, plus tard, de modèle, en Métropole.
Le corps médical mobilisé d'Afrique du Nord comptera dans ses rangs soixante quinze morts et près de deux cents blessés graves invalides pour la libération d'une ingrate patrie... Pourcentage bien supérieur à celui des pertes du service de santé pendant la Première Guerre Mondiale.
Nous laisserons au Professeur Pierre Goinard la conclusion de cet article :
Le nombre des musulmans ne dépassait guère les deux millions en 1872. Il allait quadrupler en moins d'un siècle. Sans l'œuvre sanitaire de la France, trois musulmans sur quatre n'auraient pas existé, si la médecine française n'avait pas seulement refoulé les épidémies, éradiqué les endémies diffuses, réduit la mortalité infantile, sauvé des vies condamnées. Les médecins français avaient conquis le cœur des populations. ,.
Que reste-il de tout cela ? Le bilan sanitaire de l'Algérie d'aujourd'hui est désastreux. Tous les témoignages sont concordants : ce désastre symbolise bien le degré de régression humaine et sociale qu'a entraîné la brutale séparation de I'Algérie et de la France. La révolution algérienne, entre autres méfaits, a détruit l'œuvre sanitaire de la France.
Docteur Pierre Cattin
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RAPPEL D'HISTOIRE
VERITAS N° N° 9
Par Michel SAPIN-LIGNIERES
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L'HISTOIRE SECRETE DES BARRICADES
En Algérie, si paradoxal que cela puisse paraître, la situation est, chaque jour, meilleure. Les grands élans de fraternisations que suivirent le 13 mai laissèrent décontenancée une rébellion qui avait perdu son âme.
Sur les frontières de l'Algérie, les barrages étranglent la dissidence. La situation militaire s'améliore rapidement et d'autant plus vite que la symbiose Armée- population fait tache d'huile. La population musulmane, qui avait appris par la terreur à se taire et à s'éloigner de nous, revient, soulagée. Partout, des groupes d'autodéfense se créent et, désanimée, la rébellion s'effrite.
Et, en novembre 1959, une organisation nouvelle a vu le jour, qui va compléter, renforcer tout ce qui existe déjà, c'est la fédération des unités territoriales et groupes d'autodéfense. Son rôle, c'est de grouper, c'est d'unir, c'est d'expliquer, c'est de, finalement constituer le « partie de la France » mais un parti en armes et qui va prolonger l'action de l'armée.
Son ambition, c'est, avec les anciens combattants, avec la D.P.U. du Colonel Trinquier, avec le F.N.F. de Joseph Ortiz, avec la Fédération des étudiants, avec les multiples associations, de créer ce réseau de hiérarchies parallèles dont nos adversaires nous ont appris l'emploi et, aussi, de tisser un filet dont les mailles de confiance réciproque, ne laisseront plus passer le terrorisme afin de retrouver, avec la paix, la sécurité et le bonheur.
La paternité de cette idée revient au Colonel Gardes pour qui, rien de ce qui est généreux n'est étranger. Au premier étage de l'immeuble de la Compagnie Algérienne, au coin du Boulevard Laferrière, un vaste local réquisitionné par l'Armée sera le siège social. En novembre 1959, les assemblées générales constitutives sont réunies. J'en suis élu président. L'outil se crée, il va mettre en place ses hommes et ses moyens, commencer à se développer... Pas longtemps.
Le Général Challe avait accueilli avec élan l’idée de cette fédération, conscient de tout ce qu'elle pouvait apporter sur le plan de la pacification « Mon rôle – me dit-il à l'une de nos premières entrevues - c'est de gagner la guerre, mais le vôtre, c'est de gagner la paix. »
Chez tous les chefs militaires, la réceptivité fut excellente - tous, sauf le Général Gambiez qui parut ne pas comprendre. En revanche, du côté du délégué général, l'accueil fut, beaucoup plus, réticent.
Delouvrier connaissait évidemment déjà les intentions d'abandon du pouvoir, bien qu'il les tint, strictement, secrètes et il redoutait cette structuration de toute la population de l'Algérie qui pouvait y faire échec. Sans doute, n'avait-il pu s'y opposer - c'eut été dévoiler, prématurément les objectifs du pouvoir - mais il entendait en surveiller, aussi étroitement que possible, les activités et mesurer les indispensables moyens.
De son côté se développait le Front National Français de Joseph Ortiz. On a beaucoup dit que ce F.N.F. s'employait à recruter ses adhérents au sein des unités territoriales, laissant, volontiers, entendre une sorte de complicité entre celles-ci et le F.N.F. mais c'est là une fausse interprétation car où Ortiz aurait-il recruté ses adhérents si ce n'est au sein de la territoriale puisque celle-ci représentait toute la population mobilisable de I'Algérie. Ce recrutement fut, d'ailleurs, facilité par le fait que les slogans du F.N.F. n'étaient autres que la formulation des idées répandues par l'Armée dans les U.T.
Ortiz en était, tellement, conscient qu'il ne cessa d'être en contact étroit avec le commandement militaire et I'Armée, de son côté, ne pouvait voir d'un mauvais œil la création d'une organisation qui, sans doute, sur un ton plus véhément mais sans contradiction de base, reprenait ses propres slogans et s'insérait dans un vaste ensemble de bonnes volontés qui, toutes, tiraient le char d'une Algérie indéfectiblement, liée à la France.
Ainsi, par tous les moyens, la symbiose Armée-population se trouvait, parfaitement réalisée. Au-delà même de ce qu'aurait voulu le commandement car la population en était venue à considérer que l'Armée était devenue « son armée » puisqu'elle y était, intimement, incluse et que, donc, cette Armée ne pouvait avoir d'autres vues ni d'autres sentiments que les siens.
En face de cette étroite imbrication, la marge de manœuvre du pouvoir pour réaliser ses vues devenait tellement étroite que pour les réaliser, il lui faudra, avant tout, briser cette structuration.
Dans l'entourage du pouvoir, quelques « habiles » vont s'y employer et mettre au point un plan d'un machiavélisme savant qui, inéluctablement, devait conduire à un affrontement entre l'Armée et la population, à un clash entre les parachutistes de la 10ème D.P., celle de Massu, et les territoriaux. Un plan à plusieurs phases successives.
Mise en condition - Une brutale flambée de terrorisme doit mettre à vif les nerfs des Algérois et, dans le même temps, une autre opération va s'employer à mettre le Général Massu dans une situation telle que son rappel sera inévitable. Aux yeux des Algérois, le Général Massu passe - à tort mais on ne le saura que plus tard - pour le dernier rempart de l'Algérie Française. Alors, tout naturellement et parce que telle est la tradition née d'une longue habitude, la population d'Alger, angoissée, se groupera autour du Monument aux morts, sur le plateau des Glières et manifestera ses craintes et sa volonté de demeurer française.
Scénario - Ces manifestants rassemblés, on les fera charger par des gendarmes dévalant du Forum et au moment précis où le combat sera engagé, on fera intervenir les parachutistes dans une action en tenaille. Débouchant du tunnel des Facultés, les légionnaires du 1er R.E.P. ( Colonel Dufour), par le simple jeu de leurs réflexes de bons guerriers, prendront le combat à leur compte, cependant que les chasseurs parachutistes du Colonel Broizat, sortant du Boulevard Baudin, verrouilleront I'autre extrémité du plateau des Glières. Ainsi sera réalisé ce clash que le pouvoir estime indispensable pour briser la volonté de la population, mais aussi, pour briser l'Armée.
Détonateur - La réussite de ce plan fort habile nécessite le parfait déroulement de chaque phase – des variantes ont du être prévues - et elle exige surtout un minutage très précis dans l'intervention des parachutistes prenant le combat à leur compte. Mais, bien sur, elle exige, avant tout, qu'il y ait combat.
Quelques provocateurs disséminés dans la foule survoltée et armée, comme beaucoup de gens le sont alors, peuvent ne pas suffire. Alors, on placera dans les bosquets limitant le Forum un fusil mitrailleur dont les servants seront habillés en C.R.S. qui tireront dans le tas. Le tas de gendarmes autant que celui des Algérois. Nul doute que ce feu ne déclenche la riposte des U.T
Raffinements - Tel - qu'il est monté, ce plan a toutes les chances de réussir. Choisir la 10ème D.P. qui était, pourtant, en opération plutôt que toute autre, était habile. Depuis la Bataille d'Alger cette 10ème D.P. était particulièrement chère au cœur des Algérois. Mettre en tête des gendarmes les escadrons originaires d'Algérie et leur faire supporter la tuerie était une autre habileté qui ne manquèrent pas d'avoir son prolongement dans la population car ces gendarmes ont de la famille. On pourra, ensuite, s'offrir le luxe de leur faire passer au préalable une minutieuse inspection de leurs armes pour s'assurer qu'elles ne sont ni approvisionnées, ni chargées, préparant, ainsi de bons arguments pour les lendemains et, enfin, on pourra prévoir des commissaires de police, (algérois, eux aussi) pour donner à cet attentat toutes les apparences de la légalité.
Dans ses premières phases, I'affaire dut donner beaucoup de satisfactions à ses organisateurs. Des attentats spectaculaires ont effectivement, fait monter la fièvre à Alger et I'exploitation de I'affaire Kempski aboutit au résultat prévu : le rappel du Général Massu.
Ici se place, pourtant une première bavure. Au Consulat d'Allemagne où il se rendit, après avoir interviewé le Général Massu, Kempski, devant quelques personnes dont un professeur de nos amis, déclara que l'Armée française, qui était le seul obstacle à une solution correcte du problème algérien, allait, bientôt, être brisée. Malgré le vocabulaire marxiste de ce propos, nous ne sûmes pas y prendre garde.
Un deuxième avertissement, plus sérieux" parvint à Alger, peu avant le drame. A Paris, un journaliste eut plus ou moins, vent de ce qui se préparait. Il publia dans Juvénal un article angoissé, adjurant les Algérois de s’abstenir de toute manifestation pour ne pas tomber dans un piège. Mais Juvénal n'était que très peu lu en Algérie et les propos de ce journaliste trop peu précis. Ce ne fut que plus tard qu'on sut s'en souvenir.
Le rappel du Général Massu provoqua le résultat escompté et une manifestation s'organisa, spontanément. Lors du « procès des Barricades » on ergotera, beaucoup, pour savoir si cette manifestation fut ou non autorisée. En fait, elle n'eut pas à être interdite puisque personne ne demanda l'autorisation de la faire mais, comme tout le monde savait qu'elle aurait lieu, elle fut, officieusement, tolérée.
Convoqué au Gouvernement Général, le samedi 23 janvier en fin de matinée, je fus reçu par le Général Challe et Delouvrier. Comme je disais mes craintes, étant donné le survoltage de la population, de voir le moindre affrontement se transformer en émeute, le Général Challe précisa, fortement. « Je ne suis pas un provocateur, les gendarmes resteront consignés à I'intérieur du G.G. Ils ne bougeront que si les manifestants veulent s'en emparer. » Le Général Challe pensait au 13 mai. Il y pensait, encore, quand, le lendemain il tiendra à Joseph Ortiz des propos semblables et comme il n'était pas dans les intentions de personne de refaire le 13 mai, la manifestation aurait pu se terminer sans heurts..../...
.../... Certes Pierre Lagaillarde s'est enfermé dans les Facultés ; ce n'est guère une preuve d'agressivité.
Bientôt tout sera terminé... Non car les « habiles » du pouvoir ne veulent pas laisser passer cette occasion d'agir. Les ordres sont envoyés à la 10ème D.P. et aux gendarmes qui occupent le G.G. Les commissaires de police reçoivent l'ordre de faire les sommations réglementaires mais trouvant cet ordre dément, ils refusent de I'exécuter et se retirent. Sans sommation donc, vingt escadrons" de gendarmerie, Algérois en tête, dévalent les escaliers du G.G. et lancent des grenades. Du Forum, le fusil mitrailleur des C.R.S. - ou pseudo - C.R.S. - ouvre le feu auquel répondent une ou deux armes automatiques des U.T. Quelques minutes d'une extraordinaire densité de feux et les gendarmes, victimes, autant que les manifestants, de l'horrible attentat, tournoient, s'abritent comme ils peuvent, puis refluent, en désordre. Les paras ne sont pas là.
Que s'est-il, donc passé ? Au P.C. de la 1Oème D.P. à Hydra, l'ordre a bien été reçu mais l'officier qui, en l'absence du titulaire, fait fonction de chef d'état-major, n'a nullement le sentiment qu'il se passe des événements graves et, occupé à d'autres tâches, il ne lit pas tout de suite l'ordre qu'il vient de recevoir.
Quand il le fera, dix minutes plus tard, ce sera trop tard et quand, enfin, les légionnaires du Colonel Dufour, déboucheront du tunnel des Facultés, le combat sera terminé et il n'auront pas à le reprendre à leur compte. Sur le plateau des Glières, il n'y a plus que les morts et les blessés et les paras ne feront que tendre, entre les gendarmes qui refluent et les U.T. qui n'ont, nullement, l'intention de les poursuivre, un rideau de protection en deçà duquel on relève les victimes. Elles sont nombreuses. Vingt morts, près de cent cinquante blessés, tel est le prix de l'échec – car c'est bien un échec pour les « habiles », l'affrontement entre l'Armée et la population n'a pas pu se produire. C'est, aussi, un échec pour les manifestants car, traumatisés par ce drame, ils n'imagineront d'autre solution que de s'enfermer derrière des barricades qui cette fois, s'élèvent et cette attitude statique ne peut que déboucher sur rien.
Le Général Challe sut, tout de suite, comment les choses s'étaient passées. mais les preuves, irréfutables, ne viendront qu'un an après, lors du « procès des barricades » Le pouvoir n'avait, pas encore, imaginé la constitution d'un tribunal d'exception, ce que sera, plus tard, la Cour de sûreté de l'Etat. Aussi, fut-ce un tribunal militaire, réglementaire qui eut à juger ce premier d'une longue série de procès de l'Algérie Française. Lorsque vint déposer le Capitaine de la Bourdonnaye, il révéla, très calmement, qu'il avait vu un fusil mitrailleur en batterie sur le bord du Forum. Les juges militaires réagirent vivement à cette déclaration qui fut confirmée par le Colonel Godard, mais aussi, le 10 décembre 1960, par Monsieur Prost et le 3 février 1961 par Monsieur Pierre Ville. Curieusement, la fusillade n'était reprochée à aucun des inculpés présents, de sorte que la question fut abandonnée par I'avocat général.
Très récemment, un officier d'un haut grade me confirma qu'il avait eu, en main, les douilles recueillies sur I'emplacement de tir de ce fusil mitrailleur. Elles provenaient d'un lot de cartouches qui avait été délivré à une unité de C R.S. mars comme certains dépôts, en particulier celui du 5ème chasseur d'Afrique, reçurent l'ordre de recompléter, en munitions, les unités qui avaient été engagées le 24 janvier, les enquêtes ultérieures purent conclure, en toute sérénité, que la consommation de munitions avait été nulle.
Les suites : Malgré leur échec, les « habiles » ne pouvaient renoncer à un si beau montage. Il y eut, d'abord, quelques jours après, la réussite de Michel Debré à Alger, le mardi 26 janvier, une tentative pour remplacer les parachutistes de la 10ème D.P. par des régiments du contingent et, à cette occasion, reprendre l'idée de l'assaut des barricades. Ce n"était pas une mauvaise idée. Si cela avait réussi, on aurait pu lire dans la presse métropolitaine : « Mères françaises, les Algérois tirent sur vos enfants qui étaient venus les défendre » ; mais les officiers s'opposèrent à cette solution. Alors, pour reprendre toute cette affaire, on attendra le 26 mars 1962. La fusillade de la rue d'Isly verra réussir ce qui avait été raté le 24 janvier 1960 et, ce jour-là, la résistance des Algérois achèvera de s'effondrer, définitivement.
Michel SAPIN-LIGNIERES
L'Histoire secrète des Barricades
Historia magazine N° 303
(avec l'autorisation de I'auteur)
N.D.L.R. La version que donne ici, Michel SAPIN-LIGNIERES, ancien commandant des Unités Territoriales d'Alger, est, vraisemblablement, la plus conforme à la vérité historique et au machiavélisme dont a fait preuve le Chef de l'Etat pour mettre à mort l'Algérie Française
N.D.L.R.
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LES DISPARUS DE L'ALGERIE FRANCAISE
COMMUNIQUE DE J.C. ROSSO
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La douloureuse question des enlevés portés disparus reste toujours oppressante pour les familles
Le deuil est impossible tant que l'absence de preuves de décès perdure.
Le temps qui passe n'efface pas les interrogations.
La quête des réponses à nos questionnements doit être inlassable.
Nous citerons la dernière phrase du livre émouvant d'Andrée MONTERO, Le cri retenu : " Depuis des années déjà septembre a enfoui cet espoir fou sous ses tapis de feuilles mortes, mais au plus dur de l'hiver, quand le vent hurle et gémit à mes fenêtres.. souvent je crois entendre un appel."
Mesdames et Messieurs,
J’ai l'immense plaisir de vous proposer la parution du numéro 1000, jalon significatif dans ma diffusion hebdomadaire de nos villes et villages d’alors, consacrée aux disparus de la Guerre d'Algérie (1954-1962). Ce moment est l'occasion de réfléchir à notre engagement continu envers la mémoire de ceux qui ont disparu et de leur rendre hommage.
Ce numéro 1000 est aussi une demande de votre participation à la recherche des familles dont je n’ai pu retrouver trace pour obtenir des informations : Il s’agit de tous les Incertains mentionnés (INC) et également des familles : BAUSSAC née MARCAS – CONTON (fille de Manuel CONTON) – FAVIN Albert – LEIBER Francis – POZZO-DI-BORGO Jacques.
Bien entendu, si vous relevez une erreur ou anomalie, MERCI de bien vouloir me contacter.
Je tiens à remercier tous ceux qui ont soutenu mon initiative au fil des ans. Votre intérêt pour cette cause est essentiel pour continuer à faire vivre la mémoire de ceux qui ont été martyrisés.
NB : Il existe aussi d’autres sites relatifs aux disparus : Celui de Madame DUCOS-ADER dont voici le lien : https://grainesdememoire.org
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LIVRE D'OR de 1914-1918
des BÔNOIS et ALENTOURS
Par J.C. Stella et J.P. Bartolini
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Tous les morts de 1914-1918 enregistrés sur le Département de Bône méritaient un hommage qui nous avait été demandé et avec Jean Claude Stella nous l'avons mis en oeuvre.
Jean Claude a effectué toutes les recherches et il a continué jusqu'à son dernier souffle. J'ai crée les pages nécessaires pour les villes ci-dessous, j'ai fait des mises à jour et ajouté d'autres communes, des pages qui seront complétées plus tard par les tous actes d'état civil que nous pourrons obtenir. Jean Claude est décédé, et comme promis je continu son oeuvre à mon rythme.
Vous, Lecteurs et Amis, vous pouvez nous aider. En effet, vous verrez que quelques fiches sont agrémentées de photos, et si par hasard vous avez des photos de ces morts ou de leurs tombes, nous serions heureux de pouvoir les insérer.
De même si vous habitez près de Nécropoles où sont enterrés nos morts et si vous avez la possibilité de vous y rendre pour photographier des tombes concernées ou des ossuaires, nous vous en serons très reconnaissant.
Ce travail fait pour Bône, Guelma, etc. a été fait pour d'autres communes de la région de Bône et de Constantine.
POUR VISITER le "LIVRE D'OR des BÔNOIS de 1914-1918" et du Constantinois
Le site officiel de l'Etat a été d'une très grande utilité et nous en remercions ceux qui l'entretiennent ainsi que le ministère des Anciens Combattants qui m'a octroyé la licence parce que le site est à but non lucratif et n'est lié à aucun organisme lucratif, seule la mémoire compte :
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NOUVELLES de LÁ-BAS
Envois divers
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Port de Béjaïa :
Envoyé par Elise
https://www.jeune-independant.net/port-de-bejaia-
mise-en-service-du-quai-la-casbah/
jeune-independant.net - Par: N. Bensalem le 14 déce. 2024
Mise en service du Quai La Casbah
Le wali de Béjaïa, Kamel Eddine Karbouche, a procédé à la mise en service du Quai La Casbah, une nouvelle infrastructure dont a bénéficié l’entreprise portuaire de Béjaïa (EPB). L’aménagement de cette nouvelle infrastructure, dont les travaux ont duré un peu plus d’une année, a coûté 2,5 milliards de dinars. Cet événement s’est déroulé à l’occasion des festivités du 11 Décembre 1960.
Il s’agit, en fait, de la première phase de l’extension du Quai La Casbah au port de Béjaïa. Le but de ce projet est d’augmenter la capacité du port, en termes d’EVP (équivalent vingt pieds) pour accueillir de grands navires, réduire les coûts des navires de transport de marchandises qui attendent beaucoup de temps en rade avant leur entrée au port. Le Quai sera, également, le point de chute des minerais qui seront soustraits dès l’entame de l’exploitation de la mine de zinc et de plomb de Tala Hamza et Amizour, dont l’exploitation est prévue en 2026.
«Le Quai a, pour rappel, subi des travaux d’aménagement et extension selon les normes en vigueur», a souligné la wilaya dans un communiqué. Et d’ajouter : « Il s’agit d’une opération visant à créer une dynamique et stimuler l’activité portuaire en général. » La mise en service de cette nouvelle infrastructure s’est déroulée en présence du directeur des travaux publics, du directeur des transports et du directeur par intérim de l’entreprise portuaire (EPB), des organisations des moudjahidine et des enfants de chouhadas, du maire, du président de l’APW de Béjaïa et des parlementaires.
Selon toujours la wilaya, «cet ouvrage revêt un caractère stratégique pour les activités économiques et commerciales locale, régionale et nationale». Pour sa part, la Société algérienne des travaux d’arts (SAPTA), engagée avec l’entreprise chinoise «China Railway Construction Corporation» (CRCC), a réalisé une avancée dans les travaux de la pénétrante de Béjaïa avec la pose de poutres de l’échangeur de Sidi-Aïch qui devrait relier la pénétrante de cette autoroute à la RN26.
L’entreprise SAPTA a procédé à la pose des poutres de l’échangeur N°04 la semaine dernière pour relier la pénétrante de Béjaïa (A20) à la RN26 qui est implantée à la sortie ouest de Sidi-Aïch, commune d’El-Flaye. Cet ouvrage est essentiel pour fluidifier le trafic et relier le réseau routier local à l’autoroute Est-Ouest. «Les travaux avancent dans de bonnes conditions», a rassuré l’entreprise via un communiqué de presse. Ceci en attendant qu’une solution soit dégagée pour l’entame de l’étude de l’échangeur de la commune de Boudjellil prévu au PK74 ou PK75. Un échangeur qui devrait, incontestablement, contribuer à désenclaver la région qui a déjà bénéficié, il y a trois mois seulement, de l’ouverture du Pont Sahel au lieu-dit Ichikar.
Un pont enjambant l’Oued Soummam et reliant directement la ville de Tazmalt à la commune de Boudjellil, toutefois, une opération de réaménagement de certaines sections du chemin reliant ces deux communes, qui s’étale sur trois kilomètres environ, est plus que nécessaire en raison de leur délabrement. Par ailleurs, de nombreuses infrastructures de base qui ont été réalisées à la faveur de plusieurs programmes de développement (PSD PCD, FCCL et zones d’ombre) ont été mises en service dans plusieurs municipalités, telles que Kherrata, Adekar, Toudja, Aït M’likeche, Akbou, Tourirt-Ighil et Souk El-Tennine. Entre autres, opérations, la mise en service du réseau de distribution de gaz naturel au profit de 776 foyers du douar Aït Garet, commune d’El Kseur, qui compte 17 villages. Selon la wilaya, «ce programme rentre dans le cadre des engagements de l’Etat qui compte poursuivre aussi le raccordement des milliers de foyers au gaz de ville les prochains mois», sachant que le taux de pénétration du gaz de ville à Béjaïa est à actuellement à hauteur de 80%. Plusieurs programmes ont, récemment, été initiés à l’est de la wilaya.
Le raccordement de ces hameaux, situés dans des zones de hautes altitudes, n’a pas manqué de provoquer une grande liesse chez les habitants qui attendent avec beaucoup d’impatience l’arrivée de cette énergie dans leurs foyers, surtout en cette période de grands froids. Plus de 132 foyers, relevant du village Tala Hamdoune, ont, également, été raccordés, jeudi dernier, au réseau de distribution de gaz de naturel.
On compte aussi, à l’occasion, la mise en service d’une grande polyclinique au village Merouha, commune de Kherrata. Une nouvelle structure médicale qui compte 9 services au total et qui devrait mettre fin au déplacement récurrent des malades vers les autres polycliniques de la région séparée du village d’au moins 20 km.
N. Bensalem
Alger du futur
Envoyé par Marcel
https://www.tsa-algerie.com/voici-a-quoi-pourrait-
ressembler-alger-du-futur-video/
- tsa-algerie.com - Par: Rafik Tadjer 16 Déc. 2024
Voici à quoi pourrait ressembler Alger du futur
Alger va changer d’aspect. La ville blanche pourrait retrouver sa blancheur, et bien plus. Elle sera dotée de hauts immeubles ultramodernes et d’infrastructures touristiques et autres qui lui confèreront une autre place dans le bassin méditerranéen et au-delà.
C’est la promesse du plan de modernisation de la capitale algérienne, dévoilé ce lundi 16 décembre devant le président de la République, Abdelmadjid Tebboune.
Les images des maquettes présentées lors d’une cérémonie au Palais de la culture sont simplement sublimes. A peine dévoilées, elles font déjà rêver les Algérois et toute l’Algérie.
Sous la pression d’une démographie galopante, Alger a oublié de se faire belle. L’urgence, il est vrai, était de loger tout le monde, avec tout ce que cela nécessite comme voiries et réseaux, écoles, structures de santé, transports…
La ville s’est développée, s’est agrandie vers les hauteurs et la plaine de la Mitidja, mais, hélas, pas de la meilleure des manières.
Place donc à un développement harmonieux, étudié dans le cadre d’une stratégie aux contours et aux objectifs clairs.
Les maquettes impressionnantes du plan de modernisation d’Alger
Si le plan tient toutes ses promesses et les maquettes traduites dans la réalité, la capitale algérienne du futur sera unique en son genre avec cette troisième strate qui s’ajoutera à la vieille Casbah, héritée de la présence turque, et au centre-ville à l’architecture haussmannienne datant de la période coloniale, le tout rafraîchi.
Alger a déjà franchi ces dernières années plusieurs étapes dans son processus de modernisation. Elle s’est notamment dotée d’un métro qui couvre presque tout le centre-ville et une partie de la banlieue est, d’une nouvelle aérogare internationale, de grands stades de football ultramodernes, d’une mosquée parmi les plus belles et les plus grandes au monde, un tramway…
De très hauts immeubles vitrés se sont mis aussi à sortir de terre, comme celui qui abritera le futur siège du ministère de l’Habitat, du côté de Dely Brahim, ou encore celui, fonctionnel, d’une banque arabe à El Biar, tout près d’une nouvelle faculté de médecine ultra moderne, un centre d’habitations et universitaire gigantesque à Sidi Abdallah… De grands travaux d’aménagement ont été aussi lancés, sur l’Oued El Harrach et surtout la baie d’Alger, un site naturel unique.
Pour Alger, le temps est venu de se faire belle
Le plan dévoilé ce lundi s’inscrit dans la poursuite de cette dynamique de modernisation, avec l’ambition de faire d’Alger une ville moderne encore plus attrayante.
La Casbah ne sera pas en reste. C’est « l’âme et le socle de la capitale du pays », a souligné le président Tebboune, aux responsables du projet. Cette « cité antique » doit retrouver « son lustre d’antan » et son identité architecturale et historique préservée, a-t-il insisté. Un haut lieu de la culture en perspective.
L’Etat doit intervenir pour racheter les vieilles bâtisses auprès des particuliers pour en faire des centres d’activités culturelles, artistiques, touristiques et artisanales, a suggéré le chef de l’État.
Le plan est tout en couleurs. D’abord « blanc », pour redonner à la ville sa blancheur qui faisait sa réputation. Il s’agit de réhabiliter les bâtisses existantes. Il est aussi prévu un « plan jaune » destiné à améliorer la mobilité, un « plan vert » pour les équilibres écologiques et un autre « bleu » dont l’objectif est de « reconnecter Alger à la mer ».
Pour quel coût ?
Face à la Méditerranée, la baie d’Alger, l’une des plus belles au monde, changera d’aspect et tout le front de mer fera peau neuve. En blanc évidemment. Ryad El Fethi, qui abrite le plus grand monument de la capitale, sera aussi mis au diapason de ce qui se fait de par le monde.
Surtout, Alger se dotera d’un aquarium, et pas n’importe lequel. « Le plus grand de tout le bassin méditerranéen", selon le vœu du président Tebboune.
Ce sont quelques projets, parmi de nombreux autres, qui contribueront à concrétiser l’ambition qu’Alger ne cache plus : garantir à ses habitants « un cadre de vie agréable avec des installations et des infrastructures modernes dignes des grandes capitales dans le monde ». Et surtout devenir un « pôle de rayonnement arabo-musulman, africain et méditerranéen ».
Il reste les délais de réalisation et le coût d’un tel projet qui n’ont pas été dévoilés. Lors de la présentation, le président Tebboune a insisté sur la « nécessité de définir les délais et de prévoir des plans quinquennaux » pour évaluer l’avancement de la réalisation et déterminer le budget.
Rafik Tadjer
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Expérience d'un prof d'économie
Envoyé par R. Sanchez
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Le professeur d'économie d’un collège, dont nous tairons le nom, s’est retrouvé un jour à devoir arrêter ses cours à une classe entière, celle-ci ayant affirmé et insisté pour dire que le socialisme était le système idéal et que personne n'étant plus ni pauvre ni riche, tout le monde serait heureux !
Extraordinaire, non ? Alors le professeur annonça :
"OK ! nous allons, si vous le voulez bien, tenter une petite expérience en classe...
Dorénavant, je prendrai la moyenne de toutes vos notes, vous aurez alors tous la même note, ainsi personne ne sera mal noté, ni n'aura de très bonnes notes.
A l’issue du 1er contrôle, le professeur fit donc la moyenne des notes obtenues de tous les élèves et tout le monde s'est retrouvé avec un 13...
Ceux qui avaient cravaché fort pour réviser ont commencé à trouver cela injuste et étaient déçus, tandis que ceux qui avaient moins forcé étaient ravis.
Après le 2ème contrôle, ceux qui avaient moins forcé révisèrent encore un peu moins et décidèrent de profiter de l'occasion pour s’amuser un peu plus tandis que ceux qui avaient cravaché étudièrent moins vu qu’ils ne seraient pas récompensés de leurs efforts : toute la classe se retrouva avec un 9 !...
Personne ne fut content !
Le processus étant engagé, la moyenne du 3ème contrôle fut 4 !
Par la suite, les notes ne remontèrent jamais : les pointages de doigts commencèrent, les jugements dominaient les conversations et tout le monde se sentait mal...mais personne ne voulut étudier pour le bénéfice de l'autre.
À leur grande surprise, ils faillirent tous !
Alors le professeur déclara :
“La récompense est à la mesure de l'effort pour réussir, mais lorsque les gouvernants enlèvent toute forme de récompenses, personne ne voudra plus fournir l'effort nécessaire à la réussite et le pays s'en ira à vau l'eau ! “
Conclusion de cette petite expérience:
1. Ce qu'une personne reçoit sans avoir à travailler, une autre personne doit travailler sans en recevoir la récompense.
2. On ne peut donner quelque chose à quelqu'un sans l'avoir auparavant enlevé à quelqu'un d'autre !
3. Il n’est pas possible de multiplier ni la richesse, ni le travail en les divisant !
4. Enfin, lorsque la moitié d’un peuple prend conscience de l'idée qu'il n'a plus besoin de travailler, puisque l'autre moitié va s'occuper d'eux cette dernière moitié comprend alors que ça ne vaut plus la peine de travailler, car l’autre moitié récoltera le fruit de ses efforts :
C'est le début de la fin !
Le RSA c'est déjà le début de la fin, ainsi que les allocations chômage durant 2 ans pour avoir travaillé pendant 6 mois !
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Notre liberté de penser, de diffuser et d'informer est grandement menacée, et c'est pourquoi je suis obligé de suivre l'exemple de nombre de Webmasters Amis et de diffuser ce petit paragraphe sur mes envois.
« La liberté d'information (FOI) ... est inhérente au droit fondamental à la liberté d'expression, tel qu'il est reconnu par la Résolution 59 de l'Assemblée générale des Nations Unies adoptée en 1946, ainsi que par les Articles 19 et 30 de la Déclaration universelle des droits de l'homme (1948), qui déclarent que le droit fondamental à la liberté d'expression englobe la liberté de « chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit ».
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