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La fontaine du curé
Françoise SAMTMANN
ACEP-ENSEMBLE N° 227, avril 2001, pages 30 à 35


Tous ces souvenirs accumulés dans nos mémoires, font la richesse d'une vie vécue dans ce pays à la population si diversifiée qui avait su s'intégrer en Afrique du Nord. Le mélange de langage forma le fameux pataouète d'Alger, qui fit tant rire. Bône la coquette : " Si tu vas à Bône, n'oublie pas d'aller visiter le cimetière, car si tu vois le cimetière de Bône: envie de mourir, il te donne. "
Cette réflexion nous faisait sourire jadis, mais aujourd'hui elle nous fait mal au coeur, car nos tombes abandonnées sont profanées et saccagées ; beaucoup de cercueils furent sortis et des croix et des ossements jonchent sur le sol dans presque tous les cimetières des villages : cela, je l'avais constaté dès le ler novembre 1962, dans le petit cimetière de Bugeaud; il paraît qu'ils ont enlevé les marbres des tombes pour les transformer en table d'étalage de fruits et de légumes. Quand quelqu'un décédait à Bône, on ne disait pas qu'un tel est mort, mais qu'il est allé chez Taddo, ou qu'il est allé voir Taddo. C'était le nom du concierge, un homme très sympathique pesant plus de 100 kilogrammes, blagueur et farceur qui entretenait avec beaucoup de soin, les tombes, les caveaux et les chapelles où étaient exposées les photographies des chers disparus.
C'est sûrement avec un peu de nostalgie que certains doivent évoquer leurs souvenirs de cette belle ville du golfe méditerranéen, que les indigènes continuent d'appeler Annaba la ville du raisin, peut être à cause des très nombreux vignobles de la région de Bône.
je vais essayer de vous la faire visiter par la pensée et à ma façon.
En arrivant dans le port ressemblant à Port-Vendres, on peut apercevoir l'horloge de la nouvelle gare, de belles constructions, des bâtiments maritimes, des usines, etc. ; il faut traverser des quais animés et encombrés pour nous diriger vers le centre ville en passant sur le cours Bertagna à l'entrée duquel se trouvait la statue de Thiers dont l'index, à hauteur du bas ventre, indiquait la direction, et par temps de pluie, l'in... du Président.
À la sortie, un joli kiosque à musique toujours très fleuri, permit à nos musiciens d'exercer leurs talents en donnant des concerts ou des bals.
À droite, le palais Calvin et des maisons cossues à quatre ou cinq étages, avec de grandes arcades abritant de luxueux magasins qui nous permettaient, surtout en hiver, de faire du lèche vitrine.
Le défilé des mannequins venus de la métropole attirait cette jeunesse coquette et modeste qui se contentait de rêver et de réjouir ses yeux pour reproduire à peu de frais les modèles et pour être à la mode parisienne. Il y avait de nombreuses couturières, modistes et brodeuses très compétentes.
À gauche, le palais Lecoq, de grandes brasseries, les galeries de France et l'hôtel d'Orient: le plus grand hôtel où sont descendus des artistes venus de la métropole pour jouer, surtout des opérettes célèbres, dans le théâtre situé en face. Devant le théâtre, on trouvait le matin de nombreux étals à même le sol sur des sacs de jute, de tout petit tas de fruits exotiques vendus à prix très modérés, qui excitaient notre gourmandise enfantine: des jujubes pommettes, des karmouss, des figues, des dattes, du raisin (sec), des myrtes, des blabis, des arbouses, des gros berlingots caramélisés et toutes sortes de confiseries orientales : des toma-raguss et des adjoumars, les fruits et les racines des palmiers nains poussant en bordure de mer sur un terrain sablonneux ; il y en avait beaucoup au Cap de Garde.
Des pastèques, des melons, des grenades, des coings, des poivrons, des tomates, etc., étaient exposés dans des charrettes à bras ou dans des brouettes.
À partir de midi, tout devait être débarrassé, nettoyé et lavé à grands seaux d'eau grésillée.
Attardons-nous sur cette belle promenade carrelée de petites tommettes rouges et grises, ombragée par de gigantesques platanes et deux énormes hévéas dont nous nous amusions avec nos chaussures, à écraser les petites boules jaunes, marrons et noires, au grand désespoir de nos parents : cela nous faisait glisser et bien rire, mais cela usait nos souliers disaient-ils.
À la sortie de la grande messe, nous venions écouter les Concerts donnés par les différentes harmonies bônoises et tous les soirs on allait faire le cours ; mais ce va et vient sur le cours, ce bain de foule me donnait le tournis et je préférais me promener sur les quais ou m'attabler avec les plus âgés. Les marchands de nougats, d'oublis, de barbe à papa, de crème glacée, de sorbets, etc., attiraient jeunes et vieux en toutes saisons, sur le cours Bertagna.
Derrière le théâtre agrandi après la destruction de l'ancien marché, se trouvait la ville commerçante proprement dite : beaucoup de magasins de tissus ou de vêtements tenus surtout par des israélites, où des musulmans venaient aussi faire leurs achats ; même s'ils ne s'aimaient pas, ils étaient à l'aise pour mieux marchander et faire des affaires entre eux.
Quittons le cours Bertagna pour nous diriger vers le petit jardin artistement fleuri par des paysagistes : c'était un havre de paix, très parfumé et agrémenté d'un joli jet d'eau et des statuettes dénudées ; c'est à son entrée que se trouvait la statue du bienfaiteur de la ville, le Maire Jérôme Bertagna.
Des nurses en tenue impeccable promenaient dans de jolis landaus, les bébés des familles fortunées et les personnes âgées aimaient venir s'asseoir sur les bancs, à la sortie de l’Eglise située sur la Place Jeanne d'Arc, non loin des casernes des tirailleurs, qui fut construite en 1855 et détruite en 1966. À gauche de l'Église se trouve le Palais de Justice et la grande prison. Dans le prolongeaient de celles du cours, d'autres arcades abritent la belle mairie de Bône, dont la salle des fêtes était notre fierté.
II y avait foule devant la mairie et devant la cathédrale lorsque se célébrait un chic mariage, unissant des jeunes issus de familles riches.
Jadis, le suisse en tenue écarlate avec sa mitre et sa crosse dorée, en imposait lorsqu'il mettait de l'ordre pour conduire majestueusement vers l'autel illuminé et fleuri, le cortège nuptial.
Après des félicitations dans la sacristie, une prise de photographies et un lancé de dragées mêlées de toutes petites pièces que les enfants s'empressaient de ramasser en se bousculant, la noce avait l'habitude de faire le tour des plages et de la corniche.
Aux bras de leurs fiers et élégants cavaliers et derrière les nouveaux mariés, les demoiselles d'honneur descendaient avec beaucoup de grâce les marches de la grande Cathédrale pour prendre place sur les sièges des calèches, soulevant avec beaucoup de précautions leurs belles toilettes froufroutantes, aidées avec beaucoup de galanterie par leurs garçons d'honneur.
Les cochers en smoking et gantés de blanc, conduisaient leurs chevaux bien encapuchonnés et enrubannés de soie blanche, devant le plus grand photographe de la ville pour faire la photographie souvenir de la nouvelle mariée à longue traîne blanche, auréolée de la méritante couronne de fleurs d'oranger dont les parents étaient fiers.
Longeant le cours Bertagna où les admirateurs attablés faisaient rougir les plus timides, les cochers conduisaient leur attelage vers les quais puis vers des plages successives.

Cette promenade à petit trot était chaque fois un enchantement avant le repas et les festivités de la noce qui duraient jusqu'au matin, souvent pour les moins fortunés à la salle Borg non loin de la gendarmerie, en face du jardin de la colonne Randon.
Construit à la place du marché arabe, le nouveau marché à deux étages avec des arcades donnait le reflet d'une population laborieuse assez paisible à notre époque. L'animation était intense et les marchands de beignets marseillais, de caldis, de fougasses aux anchois, de fèves au kamoun, de marrons, etc., régalaient tous ceux qui après avoir fait leurs emplettes, pouvaient se permettre de paresser.
Derrière le marché se trouvait le quartier des Mozabites : genre de souk très coloré, très parfumé et assez bruyant avec ses gargotes, ses cafés maures qui ne désemplissaient pas nuit et jour; c'était une autre image de cohabitation paisible. La colonne Randon est un quartier célèbre par son dialecte grivois, gavroche et souvent accompagné par des gestes exubérants pas toujours appréciés par les plus snobs; à son entrée un magnifique jardin fut aménagé après la destruction des remparts : il faisait bon venir s'y reposer avec nos bébés à l'heure de la sieste, quand la chaleur torride était insupportable dans nos maisons de la vielle ville. Ce quartier était souvent inondé par des pluies diluviennes et par l'eau de la fonte de la neige recouvrant la montagne de Bugeaud.

Les Bugeaudois étaient obligés de laisser leurs véhicules sur une colline en face du nouvel hôpital aux quatre chemins et d'emprunter des barques pour se rendre en ville et faire leurs courses.
Sur la route conduisant au cimetière, une petite chapelle vouée à Sainte Anne était un lieu de pèlerinage pour les mères dévotes : quarante jours après la naissance de leur bébé, lors de leur première sortie autorisée, elle venaient brûler des cierges et remercier la mère de la Vierge de leur avoir accordé une bonne délivrance.
Les pieds noirs étaient dévots, leurs Eglises étaient pleines à tous les offices et les processions de Saint Augustin, en ville et en barques dans le port, étaient très édifiantes.
Les musulmans faisaient aussi une sorte de procession en traversant nos ruelles de la ville avec des bannières, des drapeaux et des oriflammes en chantant: " Allah gih el ma imch Allah! " soit "Dieu, donne nous de l'eau s'il te plaît ! " ; ils imploraient Allah pour qu'il pleuve afin d'arroser les céréales.
C'est aussi en courant et en chantant qu'ils se rendaient au cimetière situé au lever de l'aurore, en passant devant la Fontaine romaine pour enterrer avant midi, leur défunt allongé sur une échelle et recouvert d'un linceul blanc. Sur place, ils mangeaient le traditionnel couscous et devaient en laisser une portion ainsi que de l'eau pour rafraîchir l'âme du défunt.
Pour la fête des morts, ils portaient aussi des friandises qui faisaient le régal des mendiants et des oiseaux de passage.
Les tombes blanches de la verte colline de cyprès offraient un spectacle extraordinaire et inoubliable dès que le soleil se levait dans cette région du lever de l'aurore où se trouvait un grand restaurant "Le Petit Mousse" et le collège d'Alzon. Au Petit Mousse comme au Cap de Garde, nous venions nous régaler de ces bons fruits de mer qui abondaient en Algérie, où l'on ne parlait pas encore de pollution.

Les juifs comme les musulmans, n'utilisaient pas de cercueil, mais ils creusaient une fosse cimentée pour enterrer leurs morts, entourés d'un linceul après leur toilette funéraire.
J'avais assisté à l'enterrement de la grand-mère d'une amie, ainsi qu'au mariage de sa soeur dans une synagogue, et c'est en France lors d'une messe œcuménique, que j'ai pu rentrer dans un temple, à Perpignan.

La Mosquée était interdite aux infidèles, mais nous passions toujours devant elle avec respect et assez intrigués.
La vieille ville avec sa Place d'Armes était pittoresque, c'était le quartier le plus populeux, animé et bruyant: des haut-parleurs diffusaient dans une cacophonie pas toujours très supportable à nos oreilles, un mélange de musique orientale et occidentale; mais nous étions habitués à leurs moeurs et cela ne nous empêchait pas de venir nous attabler sous les arcades ou sur la place, pour y déguster une savoureuse cuisine très épicée : couscous, brochettes, merguez, fèves, haricots, pois chiches au kamoun, rognons blancs ou bruns et toute cette délicieuse confiserie orientale.
Sur la place modernisée après la destruction par le feu de l'unique cinéma muet (qui avait remplacé une grande poissonnerie et où pour deux sous nous allions voir jouer Charlot, le comique Charlie Chaplin), furent aménagés un joli jet d'eau et des vespasiennes souterraines : cela était nécessaire pour ce quartier à la population si cosmopolite.
Des arcades abritaient des magasins orientaux aux devantures gaies, de nombreux artisanats, des gargotes et des cafés maures ou européens.
La grande Mosquée Salah Bey occupe toute une façade.
Devant son entrée, sous des arcades, une grande quantité de babouches de différentes couleurs attend la sortie des fidèles.
Il me semble entendre la voix à haute portée du Muezzin perché sur un haut minaret où nichaient des cigognes qui construisaient leurs nids avec du crin et des maillots blancs pris au vol dans leur bec par survol de nos terrasses.
Ce notable religieux appelait jour et nuit, cinq fois, les fidèles à la prière et leur rappelait sans cesse la grandeur de Allah et la loi du prophète Mahomet.
Divers produit étaient vendus à prix très abordable sur cette place enfumée par des fritures et des grillades dont on avait l'eau à la bouche.
Il fallait vite traverser ce quartier certains soirs, lorsque des bâtons (tabouss) voltigeaient pour corriger des tricheurs aux cartes fronda) ou aux dominos et qui s'enfuyaient. Heureusement que la police intervenait vite pour nous aider à nous mettre à l'abri car c'était notre passage.
Nous n'habitions pas très loin des casernes de Tirailleurs dont la fanfare nous réveillait le matin et attirait la marmaille lorsque les soldats revenaient de leurs exercices à la Casbah située aux Santons, non loin de l'hôpital civil des Caroubiers, surplombant les quais.
C'était la voix fluette d'un gamin qui traversait nos ruelles en chantant, pour vendre des petits balais servant à ramasser les cendres devant le kanoun à charbon, qui nous faisait sortir du lit afin de nous préparer à partir à l'école. Après le passage d'une grande poubelle municipale, de balayeurs et d'une arroseuse (qui passait aussi l'après midi en été pour rafraîchir nos rues), de nombreux marchands ambulants circulaient en chantant pour appeler la clientèle tout en ventant leur marchandise: " Moul arlip ! ", du lait, " Moul frame ! ", du charbon, " Moul patates ! ", des pommes-de-terre, " Moul zebda ! ", du beurre, " Moul ardame ! ", des œufs, " Moul rote ! ", du poisson, " Moul chiffons ", des chiffons, etc. Divers corps de métiers : des vitriers, des rempailleurs de chaises, des rétameurs et des aiguiseurs, rendaient bien service à cette population éloignée du grand marché.

Le chasseur de mauvais sort parfumait la rue, il balançait sur la tête de certains crédules, sa petite cassolette cuivrée. Il attendait devant l'entrée d'une petite maison mauresque, de la soupe et du pain.
Papa Doua un vieil israélite qui le matin, avait vendu du fil et des aiguilles, vers midi, transportait dans une brouette un kanoun et une marmite de fèves au kamoun bouillantes et aussi des ustensiles pour la dégustation sur place. Ce vieil homme qui avait perdu un enfant, une fille, et dont la femme n'avait pas réussi à en avoir d'autre, aimait s'entourer d'enfants pour leur raconter des histoires et poser des devinettes amusantes.

La petite corne de berger et les cloches des petites chèvres maltaises annonçant leur arrivée matinale à l'angle de la rue, nous faisaient descendre en vitesse afin d'arriver parmi les premiers pour avoir un peu de lait économique, vendu meilleur marché que le lait de vaches, que l'on ne faisait pas bouillir, la police n'autorisant que peu de temps de stationnement. Da
ns l'escalier à même la casserole, nous en buvions une toute petite gorgée en prenant soin d'essuyer nos lèvres car c'était défendu, il fallait qu'il y en ait pour tous. Pendant la grande guerre de 1914, nous mangions du pain cuit dans de l'eau de cuisson de haricots blancs avec un soupçon d'huile d'olive.

Devant les casernes, à midi et à 17 heures, des miséreux présentaient de vieilles boîtes de conserve ou des casseroles rouillées pour obtenir du ragoût ou de la soupe ; on leur donnait du pain et quelquefois un fruit, de la confiture, de vieilles chaussures ou de vieux effets militaires.
Souvent il y avait une distribution de blé ou d'orge, même dans les villages. À la crèche des Sueurs de Saint-Vincent de Paul et à la synagogue, les indigènes étaient aussi secourus.
Tous les vendredis, un israélite circulait avec un grand sac, il entrait dans les couloirs pour appeler les donateurs de pain.
Au temps du carnaval, les chanteurs costumés nous distribuaient des partitions pour nous apprendre à chanter et pour assister au défilé du corso, assez burlesque, au centre ville.
À une certaine époque, ils osaient faire la sérénade sous la fenêtre de leur bien aimée, mais il nous était interdit de regarder à travers les persiennes pour savoir à qui elle était adressée, notre mère venait nous tirer les tresses si on osait se lever du lit.

Les livreurs de beignets, zlabias, makroutes, etc., transportaient avec beaucoup de dextérité une superposition de plateaux bien équilibrée sur leur tête protégée, se méfiant d'être bousculés par cette jeunesse turbulente qui vivait dans la rue. Nous préférions aller manger sur place, le matin des beignets et dans la soirée des makroutes et des zlabias cuits au fur et à mesure devant nous.
En hiver, c'est le marchand de châtaignes croustillantes qui nous permettait de faire des rencontres.
Sur la petite place des Numides entourée de vétustes bâtiments administratifs transformés en maisons d'habitations (à loyer très modéré), des saltimbanques amusaient les gosses de toutes confessions.
" La figue, la figue ! ", scandait celui qui agitait son long roseau au bout duquel était attachée la ficelle supportant le fruit convoité gracieusement offert. C'était une figue sèche ou une poire enrobée de sucre rosé. C'était assez comique de voir se bousculer ces enfants, avec leur bouche ouverte, essayant d'attraper sans le secours de leurs mains cette petite friandise.
Celui qui les effarouchait, c'était l'homme sauvage, coiffé d'une tête de renard et ceinturé de plusieurs petites peaux de bêtes séchées. Heureusement, il y avait toujours là un grand-père pour venir en courant se réfugier dans ses bras. Il les consolait en leur achetant, pour dix centimes, un morceau de ralloua que déta-chait le confiseur d'un long ruban de sucre multicolore enroulé autour de son bras.
De généreux donateurs jetaient des piécettes dans les sébiles de ces amuseurs publics, mais ceux qui osaient tendre la main pour obtenir une obole gratuite, n'avaient pas autant de succès. Ils étaient rabroués : "Va rabbinob, va, Dieu te donnera ou alors va travailler paresseux ! ", car justement souvent la police venait les recruter pour les faire embaucher.

Il y avait de belles promenades à Bône, mais les cités où toutes misères se confondaient, contrastaient avec les récentes cités aux villas fleuries et les plages non polluées étaient très fréquentées.

LA SUITE...



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