Lettre d'une manman blonde et pas alphabête...
Texte d'origine inconnue et transcrit en Bônois
par J.P. BARTOLINI

Cher fils

Je t'écris cet' bafougne pour que t'chais que j't'écris. Alors, si t' reçois cet' bafougne c'est que t'la vu arriver. Si t'la reçois pas tu me préviens pour que je t'la renvoie. J't'écris lentement parce que je chais que t'lis pas très vite.

L'aut' jour, ton père a lu que selon les enquêtes la plupart des esquidents arrivent à 1 km de la maison, ainsi nous en'sommes décidés à déménager plus loin. La maison elle est joulie ; elle a une machine à laver, mais j'suis pas sûre qué ça fonctionne. Hier, j'ai mis le linge en didans, j'l'ai tiré le bouton, l'eau y l'a coulé et j'l'ai plus vu le linge depuis, mais bon !

Le temps ici il s'l'est pas trop mauvais. La semaine dernière il a tombé des cordes, ah ouah, deux fois... La première fois, la pluie elle a plu 3 jours, la deuxième 4.

A propos d'la veste que tu voulais, ton oncle Pierre m'a dit que si nous t'l'enoyions ac les boutons, comme ils sont lourds, ça coûterait plus cher; alors, nous avons s'enlevé les boutons et s'les avons mis dans la poche.

Nous avons enfin enterré ton grand-père ; nous avons trouvé ses osses lors du déménagement. Il était dans l'amoire depuis le jour où il a gagné en jouant à cache-cache.

J'te raconte que l'aut' jour il y a eu une esplosion à gaz dans la cuisine, et ton père et moi sommes sortis espulsés dans l'air au dihors de la maison ; quelle émotion !, c'est la première fois que ton père et moi sortons ensemble depuis des années. On z'etaient tout carabossés et le médecin y est venu à la maison pour ouar si nous étions bien bien et il m'a mis un tube en verre dans la bouche. Y m'a dit d'la fermer pendant 10 minutes, ton père lui a porposé d'lui racheter le tube.

Et pisqu'on parle de ton père, j't'annonce qui l'a du travail, il en est fier, il travaille en dessur d'à peu près 500 personnes. Ils s'l'ont pris pour couper le gazon dans le cimitière.

Ta soeur Julie, celle qui s'a mariée ac son mari, elle a enfin mis au monde, mais on sait pas encore le sexe, j'ne saurais pas te dire si ti es onc' ou tante. Si c'est une fille, ta soeur va s'l'appeler comme moi. Ça sera étrange d'appeler sa fille "manman".

Ton père a demandé à ta soeur Lucie si elle est enceinte, elle lui a dit que oui, de 5 mois déjà ; mais là , ton père a demandé si elle était sûre qui l'était d'elle. Lucie lui a dit atso, areusement. Qué fille solide, qué fierté, tel père telle fille.

Ton cousin Paul, ce baouèle, s'est marié et il prie tous les jours en devant sa femme, parce qué l'est vierge.

Par contre, on'a plus revu l'onc' Isidore, le joubass ac un schkoll didans la cabosse, çui là là qui s'est mort l'année dernière.
Et ton chien Pouky nous inquiète, à saouar, il continue à pousuive les voitures à l'arrêt. Mais ton frère Jeannot, ce calamar, c'est pire. Il s'a fermé la voiture et il s'a laissé les clefs à l'entérieur. Ah ouah ! Il s'a dû aller chez lui s'enchercher le doube pour pouoir nous sortir tous de là.

Bon, mon fils, esprès, j't'écris pas l'adresse sur la bafougne, j'la connais pas. En fait la dernière famille qui s'a habité ici est partie ac les numéros pour s'les remette dans leur nouveau domicile.

A de bon, si tu oies Marguerite, passe lui le bonjour. Si tu ne la oies pas, dis lui rien.

Atorment, oilà, ta mère qui t'l'adore.

Antoinette
P.S. J'allais te mette queques sous, mais j'ai déjà fermé l'envéloppe.

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